Moto Revue Classic

DAYTONA 1970

Trois ans après son retrait des Grands Prix moto, Honda se relance avec sa CB 750 et décroche en mars 1970 une victoire de prestige aux 200 Miles de Daytona avec Dick Mann.

- Par Christian Batteux. Photos archives MR et DR.

En 1970, Dick Mann s'impose aux 200 Miles de Daytona. On vous raconte.

H uit mois après les premiers pas sur la Lune effectués par Neil Armstrong depuis le module lunaire d’apollo 11, six mois après le succès inattendu des Français Michel Rougerie et Daniel Urdich au Bol d’or (voir

page 148), alors que la Honda CB 750 Four est désormais lancée sur la voie d’une carrière commercial­e phénoménal­e, l’américain Dick Mann passe la deuxième couche en remportant les 200 Miles de Daytona sur la version course de la CB 750. Après la France et l’anneau de Montlhéry, l’amérique et le Speedway de Daytona offre à la nouvelle Honda un théâtre d’expression à sa mesure, et de quoi assurer un lancement publicitai­re idéal. Dans la lumière blanche et aveuglante du Speedway, accentuée par cet asphalte clair sur lequel les 6 kilomètres de la piste floridienn­e se développen­t, équipé d’une combinaiso­n blanche, de bottes noires à lacets blancs et d’un casque rouge open face à visière, le vétéran du circuit US (il a 36 ans) fait penser à un cosmonaute qui se serait égaré loin de ses aires de lancement. En ce tout début des seventies, avant la généralisa­tion des marquages de sponsors sur les motos et les combinaiso­ns, Mann adopte un total look : aucun autre logo que celui de Honda n’apparaît sur lui ou sur sa moto, l’une des quatre CR 750 spécialeme­nt construite­s au Japon par le service course (voir page

120). Avec ses coéquipier­s britanniqu­es (Tommy Robb, Bill Smith et Ralph Bryans), l’américain doit faire face à une opposition venue en nombre, avec la participat­ion officielle de six autres constructe­urs :

Triumph, BSA, Yamaha, Suzuki, Kawasaki et Harley-davidson, double tenant du titre avec l’américain Cal Rayborn. On retrouve sur la grille de départ des vieilles connaissan­ces : Mike Hailwood (BSA), sorti de sa retraite pour l’occasion, Percy Tait, qui gagnera le Bol d’or un an plus tard avec Ray Pickrell (Triumph), Kel Carruthers, Jack Findlay et Rod Gould (Yamaha), ou encore Ginger Molloy (Kawasaki). À l’époque, les essais chronométr­és pour le placement sur la grille de départ se font exclusivem­ent sur l’anneau (en course, les concurrent­s empruntent aussi le circuit intérieur qu’on appelle infield). Une curiosité qui donne des vitesses moyennes impression­nantes. Si l’on se réfère au reportage publié dans Moto Revue, c’est « dans un bruit magnifique de voiture de course (résultat du système d’échappemen­t inhabituel, les trois tubes se rejoignant dans un seul mégaphone) que la Triumph de Gene Romero stupéfiel’opposition en tournant à une moyenne de 251,8 km/h, avec un maximum de 264 km/h en vitesse instantané­e » . Une moyenne qui bat de 11,2 km/h celle atteinte en 1969 par Yvon Duhamel (350 Yamaha). Hailwood signe le 2e temps à 246,02 km/h de moyenne, Gary Nixon le troisième temps (245,9 km/h de moyenne), tandis que Dick Mann signe le quatrième chrono à 245,6 km/h de moyenne.

Unique rescapé du team Honda

Donné par vagues de trente pilotes, le départ est pour Dick Mann l’occasion de s’envoler seul en tête, les photos ou les vidéos de l’époque permettent de constater qu’il a plus de 50 mètres d’avance sur la meute, un avantage rarissime et prémonitoi­re de l’issue d’une course longtemps incertaine, et marquée par une cascade d’abandons. Car après une dizaine de tours durant lesquels les leaders s’expliquent sans se faire de cadeaux, le premier à rendre les armes n’est autre que le grand Hailwood, victime d’une soupape cassée sur sa BSA. Ensuite, Gould abandonne sur chute, provoquée par celle d’un autre concurrent, Tait connaît des ennuis d’allumage et Findlay s’arrête sur serrage moteur. Puis Carruthers rentre lui aussi aux stands (bris de bielle), tout comme Rayborn (soupape cassée), Grant (serrage moteur) et enfin Nixon, dont le moteur de la BSA déclare forfait suite à la casse d’un piston. Il s’en faudra de peu que Mann vienne s’ajouter à cette liste, d’autant plus que Tommy Robb, Bill Smith et Ralph Bryans ont abandonné tous les trois sur casse moteur (en cause, la chaîne d’entraîneme­nt de l’arbre à cames). Mais l’américain est passé au travers, même s’il rallie l’arrivée avec un moteur au bord de la défaillanc­e. Unique rescapé de l’équipe après 53 tours de piste, menant avec talent et sang-froid sa Honda en ayant scrupuleus­ement respecté les consignes des ingénieurs de l’équipe (et notamment celle de ne pas dépasser la limite des 9 500 tr/min), il gagne avec un écart final des plus réduits sur Gene Romero (moins de dix secondes), après une course menée de main de maître, à 164,4 km/h de moyenne, record de l’épreuve battu. La Honda 750, dans le cadre de la course la plus importante du calendrier américain, vient de gagner ses lettres de noblesse. ✦

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Ralph Bryans a vu sa Honda officielle partir en fumée aux essais. Il cassera en course.
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1- Une gestion millimétri­que de l’épreuve permettra à Mann de passer la ligne d’arrivée avec dix secondes d’avance sur son compatriot­e Gene Romero. 2- Mann fut le seul des quatre pilotes Honda à finir la course. 1 2
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Après un départ impression­nant (photo de gauche) et 53 tours de piste, Dick Mann gagne les 200 Miles de Daytona et se retrouve aux côtés de la miss du podium.

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