Moto Revue Classic

Au guidon des deux monstres

- Sensations fortes

La première fois que je suis monté sur une 1000 Koehler-Escoffier, c’était en 2003, du côté de Marseille. Avec mon photograph­e de l’époque, Fabrice Berry, on avait pris rendez-vous avec JeanPaul Marquinez qui possédait à l’époque une machine sur laquelle aurait pu rouler Eddoura, il faut bien entretenir la légende. Peu importe, Jean-Paul Marquinez, personnage haut en couleur, nous avait donné rendez-vous dans sa résidence secondaire, au pied de la fameuse «Gineste», route qui relie Cassis à Marseille. Malheureus­ement, ce n’est pas sur celleci que j’ai effectué mon galop d’essai mais sur le ruban d’asphalte menant à la propriété de Marquinez. Après un démarrage à l’aide de rouleaux entraînés par une voiture, le « quatre tubes » s’est mis à chanter et la garrigue s’en souvient encore ! Jean-Paul fit conscienci­eusement chauffer le bicylindre en V et puis me dit sans autre forme de procès. Je prends l’embrayage, raide comme sur une moto d’il y a un siècle, je pousse le grand levier, j’enclenche la première, et c’est parti mon kiki ! Inutile de vous dire que les premiers mètres incitent à la prudence, avec test des freins obligatoir­es. Tout semble fonctionne­r et je commence à monter les rapports. Il n’y en a que trois. Le charme du bicylindre en V longue course agit immédiatem­ent, on a l’impression que la moto va parcourir 10 kilomètres à chaque tour de vilebrequi­n ! Pourtant, on ne peut pas se «lâcher» complèteme­nt sur un tel engin car l’idée fixe, c’est de ne pas commettre d’impair qui pourrait provoquer une chute, une casse, voire les deux... En quelques allers-retours, j’ai quand même pu me rendre compte de la vaillance d’un pilote comme Eddoura, qui trompait la mort à chaque virage dans les courses de côte de l’époque. J’ai eu, quelques années plus tard, le privilège de rouler sur la machine de Monneret, qui est exposée au musée de Rochetaill­ée, près de Lyon. Cette moto, je l’avais vu tourner au début des années 90 lors des Coupes Moto Légende à Montlhéry, pilotée par le directeur du musée, Bernard Vaireaux. Elle est dans sa configurat­ion de 1952 avec les gros freins à tambours (vraisembla­blement des Rossignol), un réservoir Mottaz et une selle Aurora. Après que les deux mécanicien­s du musée l’ont mise en route, Bernard me donne les instructio­ns mais je n’entends pas grand-chose. Je sais juste que la première est en haut et que le sélecteur, à droite, est un peu compliqué à manoeuvrer. On est quasiment assis sur le moteur, en prise direct avec lui et on sent qu’il ne demande qu’à prendre des tours. On imagine comment les pilotes devaient faire corps avec elle : elle n’est pas si grosse et avec 145 kg, elle est relativeme­nt maniable. Rappelons que dans sa dernière version, le 1000 crachait 78 chevaux, du moins à l’époque. C’est largement suffisant pour faire quelques tours dans le parc du château, cette fois-ci casqué, comme Georges Monneret dans les années 50. À peine le temps de sentir qu’effectivem­ent cette version-là semble plus véloce que celle des années 20 que déjà, Bernard Vaireaux me fait signe de rentrer... Les photos sont dans la boîte mais, comme quelques années auparavant du côté de Marseille, je suis un peu frustré de ne pas avoir pu m’échapper pour plus longtemps, histoire de sentir réellement la puissance d’un des plus beaux moteurs que l’industrie française n’ait jamais produit. Il y a un proverbe qui dit :

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