PORTRAIT JACKY GROLET
Passionné par les sports mécaniques et la viticulture, Jacky Grolet propose depuis 25 ans une « cuvée racer » de son Beaujolais.
Visite dans le Beaujolais chez le plus sympathique des viticulteurs-motards.
Boire ou conduire, il faut choisir disait la prévention routière, et elle avait bien raison. Pourtant, depuis 40 ans, Jacky Grolet, producteur de Beaujolais, parvient à concilier les deux, tant son amour pour le vin et la moto est grand. Pour le rencontrer, je quitte l’autoroute A6 à Belleville-sur-Saône et je suis les petites routes qui serpentent à travers les vignes qui ont pris les couleurs de l’automne. Après un quart d’heure, j’arrive à Villié-Morgon, sur les terres de notre viticulteur. Jacky, dont le premier métier est cuisinier, m’attend pour déjeuner.
Dès l’arrivée dans sa salle à manger, on entre dans le vif du sujet : sur un mur s’étale une énorme photo du Grand Prix de Charade 1973. Sur la table se trouve évidemment l’une de ses bouteilles de Morgon. L’étiquette arbore la même typographie que Norton et l’illustration de Denis Sire, une Manx sur l’île de Man : « Ça fait maintenant 25 ans que j’ai eu cette idée et que Denis a accepté que j’utilise son dessin. » Si Jacky a réussi à marier ses deux passions, c’est grâce à son père, entrepreneur en travaux agricoles et fou de sports mécaniques : « Avec lui, j’ai écumé tous les circuits de France et d’Europe, que ce soit pour les Grands Prix moto ou ceux de Formule 1, voire le motocross. Je devais avoir 4 ans quand il m’a emmené pour la première fois au Grand Prix de Bourg-en-Bresse, à une heure d’ici. »
Arrive l’adolescence et, évidemment, Jacky rêve de machines de course, de cuir et de casque intégral. Pourtant, c’est d’abord avec le motocross, sur une Yamaha YZ 125, qu’il se lance dans la compétition : « Je voulais rouler en Challenge Honda 125 mais alors qu’on était à Montlhéry pour les Coupes du Salon, l’un des concurrents de cette formule de promotion s’est tué devant nous. Pour mon père, le circuit était trop dangereux, il a préféré que je fasse du tout-terrain… » Et puis, à la fin des années 70, les terrains ont fleuri un peu partout, même en Beaujolais, entre les vignes.
Motocross et enduro
Imprégné de cet environnement viticole et peu intéressé par la cuisine, le jeune Jacky abandonne son premier métier pour travailler dans une usine de mise en bouteille et quand il a fini sa journée, il se rend dans la vigne qu’il a louée : « C’est mon grand-père maternel qui m’a appris les bases du métier mais c’est mon patron, qui était oenologue, qui m’a aidé à faire du bon vin. » Concernant la moto, outre ses machines de route, Jacky s’est lancé dans le championnat de
À 4 ANS, J’ASSISTAIS À MA PREMIÈRE COURSE À BOURG-EN-BRESSE
France d’enduro avec des Honda XR puis il participe au premier Supermotard de Carole en 1981 : « C’était un grand moment car je me suis retrouvé sur la grille de départ aux côtés d’André Malherbe qui était l’une de mes idoles. En revanche, quand le feu est passé au vert, je n’ai pas pu le suivre… » Chaque année, il se rendra sur cette épreuve qui lui permettra aussi d’assouvir sa passion pour la vitesse. Dans un autre genre, son album de photos prouve qu’il est plutôt doué pour les wheelings et ainsi, lorsque le cascadeur Alain Brochery organise le championnat de France de roue arrière sur le circuit du Castellet, il se classe deuxième !
Morgon cuvée Racer
Jacky finit par quitter l’usine de mise en bouteille pour s’occuper d’un bar-restaurant avec sa soeur, à Laucié, commune voisine : « J’étais là le matin et l’après-midi, je m’occupais de mes vignes. » L’aventure durera 22 ans, jusqu’en 2007, date à laquelle il se consacre uniquement à son domaine de Villié-Morgon, où se trouve ses 4 hectares de vignes. À Lancié, son épouse Patricia s’occupe d’un gîte baptisé « Le pot de vin ». « Les vendanges sont exclusivement manuelles et les vinifications traditionnelles », précise Jacky. Sur les conseils d’un ami de Denis Sire, il propose ses vins sur les nombreux salons moto et cela porte rapidement ses fruits, la fameuse « cuvée racer » devenant célèbre dans le petit monde des motards : « Aujourd’hui, je vends la moitié de ma production, 25 000 bouteilles issues d’un cépage Gamay, sur les événements liés à la moto. Ce qui est rageant, c’est que beaucoup de gens croient encore que je me limite à faire faire des étiquettes ! »
De même, beaucoup pensent que Jacky possède une impressionnante collection de motos anglaises mais à part ses Triumph Tiger modernes avec lesquelles il a participé à plusieurs Rallyes du Beaujolais et une improbable BSA
Victor de motocross de son adolescence, il s’est offert sa première Norton, une
850 JPN, il y a seulement une dizaine d’années : « À 18 ans, j’ai acheté une Honda CB 750 parce que ça ne coûtait rien mais j’ai toujours été fasciné par la culture anglaise des sports mécaniques ; pendant 25 ans, j’ai transformé des japonaises en anglaises ! » Et puis, avant de sauter le pas, il a eu sa période Ducati mais toujours en lien avec l’Angleterre : « Je suis allé à Brands Hatch pour le championnat Superbike à l’époque où Fogarty gagnait tout sur les bicylindres de Bologne. Tout était rouge, dans les paddocks et sur les parkings et à mon retour, j’ai vendu ma Yamaha TRX 850 pour acheter une 916 et une 748 ! » Au début des années 2000, Jacky a aussi écumé l’Irlande avec sa Triumph Tiger pour assister à des courses sur route, des épreuves qui devaient lui rappeler celles de Bourg-enBresse, lorsqu’il était posté sur les épaules de son père à regarder passer les Norton Manx. ✦ Domaine Jacky Grolet :
04 74 69 10 25.
J’ÉCOULE LA MOITIÉ DE MA PRODUCTION PAR LE BIAIS DU MONDE DE LA MOTO