Moto Revue Classic

STUDIO HARCOURT

Motard dans l’âme, le boss du célèbre Studio Harcourt invite le monde de la moto à prendre la pose. Sans jeu de mots.

- Par Alain Lecorre. Photos Jean-Aignan Museau.

Le célèbre studio photo parisien nous a ouvert ses portes. Découverte.

L’endroit est splendide, baigné de lumière et constellé de portraits de stars que le monde entier nous envie. Créé en 1934, le studio s’est posé en 2016 dans un hôtel particulie­r du

16e arrondisse­ment, à Paris, refait de A à Z il y a trois ans. Sur cinq étages (dont trois sont ouverts au public), on entre dans l’univers « Harcourt ».

C’est Francis Dagnan, patron du studio depuis 2007, photograph­e lui-même, mais également motard (possesseur d’une

Royal Enfield, d’une Street Scrambler et d’une Yamaha XT 550), qui nous guide. « J’ai commencé la moto avec un Fantic 50 Cabalero Regolarita, puis une Yamaha 125 S3 à 16 ans et plein d’autres ensuite. Je roule dès que j’ai un moment. Cet été, on a traversé les Pyrénées à quatre motos. J’avais une R nineT pour l’occasion. Et on fait ça tous les ans. J’ai l’impression de rester ado… Quand on fait chauffer les motos le matin en sortant de l’hôtel et qu’on va vivre une journée d’aventure, j’adore ça. » Francis, ditesnous en un peu plus sur cette fameuse photo « Harcourt »... « Notre photo est chronophag­e (2 heures de prise de vue, une vingtaine d’heures en tout, ndlr), il faut tout régler à la main, ça prend beaucoup de temps mais les modèles ont du mal à partir. Il faut dire que pour chaque prise de vue, toute une équipe est à leur service et prend soin d’eux : photograph­e, maquilleus­e, assistant, etc. Ils adorent. Ce qui nous différenci­e avant tout, c’est l’éclairage. Savoir sculpter une image avec de la lumière, travailler le modelé, la pose, le regard. Un portrait peut rendre compte d’une personne de manière très différente. Dure, virile, raffinée. » passionné, Francis enchérit : « Les photograph­es et les modèles ne sont jamais cités ici. C’est une école d’humilité. La vedette, c’est l’image. C’est pourquoi Harcourt est le seul à avoir perduré depuis 1934. » Il est vrai que Paris compte de nombreux studios photos à l’époque. « La technologi­e était très moderne et en plus, Harcourt photograph­iait les acteurs comme des dieux... Toujours au repos, on disait “à la ville”, le regard dans le vide parce que les dieux ne sont pas traversés d’émotions. L’iconograph­ie Harcourt naît de ça et des éclairages de cinéma. Au tout début, on photograph­iait directemen­t sur les plateaux de cinéma avec la lumière cinéma. Et l’acteur est là, encore maquillé. » Aujourd’hui, bien sûr, maquillage et prises de vue sont faits sur place. « Tout à fait, puis on passe

à la deuxième étape : celle des planches contact. Même si le studio est passé au numérique en 2007, on perpétue cette tradition. On montre entre 40 et 50 photos à nos clients puis on choisit ensemble celles qu’on va utiliser pour passer à la troisième partie du travail. En effet, après, commence la phase de retouche : on révèle, on accentue l’éclairage voire on corrige quelques défauts. Au stade des planches contact, on assiste déjà à des choses incroyable­s : observer le modèle face à son image, comprendre toute la complexité du rapport à l’image. Beaucoup de nos clients ne sont pas “éduqués” à l’image, choisissen­t mal et peuvent passer à côté d’un cliché exceptionn­el.

C’est pourquoi cette étape est toujours chapotée par un photograph­e qui va guider le client vers le bon choix. » Quand Francis décide de passer au numérique en

2007, tout le monde lui tombe dessus, l’accusant de vouloir tuer le studio... «J’ai alors échangé avec des galeristes et des grands photograph­es qui m’ont conforté dans mon choix. Et j’ai aussi rencontré un informatic­ien de génie qui m’a dit : “On peut recréer tous les défauts de l’argentique.” C’était parti. Cela dit, on s’est remis à l’argentique récemment parce que beaucoup de clients chinois le demandent.

Ils adorent cette tradition d’élégance et de vintage. » Le studio fait aussi des images couleur et des « portraits d’objets » mais la plupart des clients sont intransige­ants avec la tradition et demandent des photos noir et blanc marquées de la signature Harcourt.

« On a travaillé avec Harley et Kawasaki côté moto. On photograph­ie aussi des collection­neurs (voitures et motos) avec leurs machines. Ce qu’on fait, c’est répondre au désir universel de laisser une belle image de soi. Nous sommes portraitis­tes, on se donne beaucoup de mal pour mettre le visage en valeur, le sculpter, l’idéaliser même. À l’heure où l’on fait des photos ignobles en deux secondes qui restent stockées au fond d’un disque dur, nous proposons strictemen­t le contraire, ici. Quatre ou cinq personnes vont passer du temps à rechercher la beauté, à révéler l’être qui est derrière un visage, à en rendre compte et à l’imprimer. Toutes les images Harcourt sont toujours éditées. Bien sûr, ces prestation­s ont un coût, mais il est tout à fait raisonnabl­e (1 998 € le portrait prestige mais les tarifs débutent aux alentours de 800 €, ndlr). Aucun photograph­e de renom ne sortira son appareil photo pour ce montant et pour le même résultat. Harcourt est un véritable artisanat à la française, pas du tout un produit de luxe spéculatif. » Et c’est ouvert à tout le monde. Aux amoureux de l’exceptionn­el, aux motards, à vous, à nous. Une expérience à tenter assurément.

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 ??  ?? 1- Francis Dagnan roule dans Paris au guidon de sa Royal Enfield 500 monocylind­re. 2- Kawasaki a fait appel au studio Harcourt pour mettre en avant cette préparatio­n sur base de machine de dirt. 2
1- Francis Dagnan roule dans Paris au guidon de sa Royal Enfield 500 monocylind­re. 2- Kawasaki a fait appel au studio Harcourt pour mettre en avant cette préparatio­n sur base de machine de dirt. 2
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3- La salle d’exposition à l’étage où les tirages peuvent être remontés à loisir. 4 et 5- Dans toutes les pièces de l’hôtel particulie­r, des portraits magnifique­s, pas toujours en noir et blanc, siglés Harcourt. 5
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