Remerciements
Un grand merci à Vincent Fages, patron de l’Auberge des Montagnes à Pailherols, qui nous a guidés sur les premières pentes caillouteuses de notre virée et nous a fait découvrir son fabuleux buron de Bâne (www.auberge-des-montagnes.com). Merci à Aurélien Szulek de SW-Motech France pour le prêt de la MT-07 ainsi que pour le prêt d’une partie de l’équipement (www.sw-motech.com). Merci à Bagster (www.bagster.com) pour le prêt de l’autre partie de la bagagerie. Merci à Antoine, Boss de Bike Shop Sphère à BoulogneBillancourt (tél. : 01 49 09 17 18) pour la pose des Continental TKC80 sur la Yamaha. Enfin, merci à Serge Fajol, patron du garage du même nom à Allanche, qui nous a permis de réparer le pneu de l’infortunée MT-07.
Aux dernières nouvelles, Gold va mieux mais il chausse toujours du 47 côté gauche. Pailherols : c’est la première étape de notre trip le lendemain. Le petit village à partir duquel on doit pouvoir commencer à quitter le bitume et emprunter des petits chemins de rocaille. Pour y aller rapidement depuis Saint-Flour, pas d’autre choix que la route sur une soixantaine de kilomètres. Mais la D990 offre des tronçons suffisamment sinueux pour se faire plaisir et apprécier accessoirement le grip surprenant des Continental sur un enrobé sec. Une fois passée l’appréhension liée à leur profil particulier (qui occasionne une mise sur l’angle plus vive qu’avec des pneus strictement routiers), il est vraiment possible de mettre du rythme et de l’angle sans que ça décroche. C’est ce que je me dis derrière Chignac et Bruno, notre photographe, en les voyant prendre le large à chaque courbe alors que je dois cravacher pour rester au contact. L’arrêt à Pailherols me permet de recoller aux deux locomotives. Dans ce petit village d’une grosse centaine d’habitants, un gars nous attend. Il s’appelle Vincent et connaît bien le coin puisqu’il y tient une auberge (l’Auberge des Montagnes) et possède un buron : un petit abri de pierres à flanc de montagne que les bergers occupaient autrefois une partie de l’année. Ça fait bien longtemps que les burons ne servent plus aux bergers. Mais alors que beaucoup sont en ruines, certains, comme celui de Vincent, ont été transformés en gîtes de charme. Y aller nous permet de poser enfin les crampons de nos roadsters sur autre chose que du macadam. Les premiers lacets des chemins de montagne sont recouverts d’une caillasse assez fine, ils sont pentus, sinueux mais peu accidentés : ça grippe sans problème et sans surprise, quelle que soit la moto. On trouve ça presque trop facile. Mais au bout de deux ou trois kilomètres, changement de donne ou plutôt de relief : de belles ornières font leur apparition. De belles ornières et surtout, de bonnes grosses pierres bien saillantes. En théorie, pour passer ça, c’est simple : il faut mettre du gaz. En pratique, ça l’est moins, et même si leurs pneus sont identiques, on commence à percevoir clairement les différences entre les machines : légère, équipée de suspensions souples et dotée d’un guidon relativement haut, la Duke
est celle qui s’en sort le mieux, d’autant qu’elle est entre les paluches plutôt expérimentées du chef Chignac. Plus ramassée sur elle-même, mais gratifiée d’un twin plein de santé et de suspensions elles aussi très souples, la MT-07 ne démérite franchement pas entre mes mains d’enduriste puceau. Je la cravache comme je peux, c’est-à-dire comme un bourrin, rassuré par le solide sabot alu SW Motech contre lequel je n’arrête pas d’entendre la pierraille s’écraser. Et à cette allure, je rattrape et je dépasse la Street Triple R emmenée par notre photographe, Bruno. Et rattraper le petit chauve, Dieu sait que ça ne m’arrive pas souvent. J’aimerais mettre ça sur le compte de mon « pilotage » (guillemets de rigueur), mais l’honnêteté m’oblige à reconnaître que c’est surtout la Triumph de mon collègue qui m’aide sur ce coup-là : car à l’évidence, l’anglaise, même chaussée en crampons, n’est vraiment pas faite pour le trekking : position basculée sur l’avant, suspensions fermes et à faible débattement, moteur très (trop) rageur. Rien de ce qui fait habituellement le sel de la Street R ne lui permet de tirer ici son épingle du jeu. Pire, en la dépassant et en lui jetant un coup d’oeil condescendant, je m’aperçois que la belle est dépourvue de sabot moteur et que son carter d’huile est, du coup, particulièrement exposé. Et Bruno l’a compris aussi, vu le regard anxieux qu’il me retourne.
« On va voir ce qu’elle a dans les bielles, la Ducat’ »
L’arrivée au buron est, pour lui, une petite délivrance. Pour Chignac et moi, c’est une halte moins méritée, mais quand même exceptionnelle : la vue sur le Puy Mary (un des sommets des monts du Cantal) est magnifique, la transformation du buron en gîte, admirable, le pique-nique de Vincent fait honneur aux produits du coin et cerise sur le gâteau : un coup de fil nous prévient que la Goldasse et son Scrambler Ducati sont en chemin. Une heure et demie plus tard, Boucle d’or et son pied-bot sont au buron. L’histoire de ce retour ? Elle est simple : aucune fracture du pied décelée sur les radios (une semaine plus tard, on verra que les radiologues ont mal regardé…) et un panard qui, durant la nuit, a fini par suffisamment dégonfler pour chausser une botte et donner envie à son propriétaire de nous rejoindre. D’ailleurs, ce n’est pas un retour, c’est une résurrection. Gold, si souffreteux la veille et d’ordinaire si tatillon à table, s’est transformé en aspirateur à boustifaille. Il dézingue les paupiettes de tripous comme si c’était des cachetons antidouleur et enfourne les saucisses de pays comme un avaleur de sabre en quête de record. Quand il est comme ça, le lascar est chaud. À table et à moto. C’est d’ailleurs ce qu’il confirme en lançant dans un renvoi parfumé à l’ail : « Et maintenant, on va voir ce qu’elle a dans les bielles, la Ducat’. » Le temps de nous laisser reprendre notre respiration et de prendre congé de Vincent, le voilà sur l’italienne. Autant le dire : malgré son appellation Scrambler, la Ducati semble la moins apte des quatre motos au tout-terrain. Mais ça, le Gold semble s’en soucier comme de son premier slider. Après avoir chaussé son jet à paillettes, arrangé sa sacoche latérale et mis ses valseuses en bandoulière,
le voilà qui part en trombe dans un nuage de poussière. Alors oui, on le suit. Mais pour ça, on se crache dans les mains. Parce que le pied gauche du blondin à beau être en vrac, la pogne droite fonctionne sans appréhension. Et les Pirelli MT60RS de sa Ducati ont beau être moins à l’aise que les Continental TKC 80 dans le caillouteux, ça n’empêche pas la bolonaise d’envoyer la sauce et de tenir son cap sur tous les chemins empruntés. Heureusement pour nous, la technologie italienne vient à notre secours. La technologie ou plutôt ses lacunes puisque par deux fois, le Scrambler se voit contraint à un arrêt technique : la première, pour rattacher le maigrelet sabot moteur qui a perdu une partie de sa visserie. La seconde, pour remettre en place le silencieux d’échappement qui s’est déboîté sur une compression d’amortisseur un peu plus forte que les autres. Rien de grave (ça améliore même plutôt sa sonorité, très discrète d’origine). Rien d’irréversible non plus. Juste la confirmation que, malgré son appellation Enduro, cette Ducati est un Scrambler des villes, pas des champs. Histoire de la préserver et de rattraper le temps perdu à la remettre d’aplomb, on décide de refaire un peu de départementale pour remonter vers le nord du département et le lac du Pécher où on a prévu de camper. Une fois encore, on constate avec plaisir la bonne polyvalence de nos pneus, qui, une fois revenus sur le bitume, permettent de rouler à un bon rythme sans appréhension. Histoire de finasser, on pourrait dire que, dans cet exercice routier, c’est la Duke qui s’en sort le moins bien avec un train avant devenu un peu flou sous l’effet des tétines. Celle qui met le plus en confiance, c’est en revanche la MT-07 qui, malgré une partie-cycle pas spécialement haut de gamme, s’avère facile et homogène en toutes circonstances. Au guidon de cette petite baroudeuse, je me sens gonflé à bloc, prêt à aller au bout du monde. Jusqu’au moment où, sur un chemin forestier… c’est elle que je ne sens plus du tout gonflée. Elle, ou plutôt son pneu arrière, devenu complètement plat. Une crevaison, une banale crevaison. Mais une grosse, pas colmatable à la bombe, et qui tombe mal : dans les bois, pile au moment où le soleil
se couche. Pas question du coup de dormir au lac, c’est ici qu’on campe, dans une petite clairière, en bordure d’un chemin de débardage. Gold voulait la jouer roots, il est servi et nous aussi. Chignac s’en fout. Je le soupçonne même de se réjouir d’étrenner enfin son fameux barbecue KTM. En deux temps trois mouvements, il le monte et même après avoir renversé la moitié du charbon à côté, réussit à faire cuire les saucisses. La soirée se passe entre déglutitions forestières et complainte du pied signée Gold dont l’arpion a viré au bleu et dégage une odeur proche d’un fromage du même nom. On ne lui en fait pas la remarque : il a promis de réparer la crevaison le lendemain. Et la promesse, il la tient.
Autour du feu de camp, il n’y a ni champion, ni héros
Avec pas mal de bonne volonté et un coup de bol : en réussissant à récupérer une mèche dans un petit garage perdu du côté d’Allanche (un conseil, ne faites pas comme nous : partez avec des mèches). Le gros trou dans le pneu se trouvant entre deux épaisses tétines, il paraît que la mèche a de bonnes chances de tenir. Il vaudrait mieux, il nous reste près de 500 bornes à faire d’ici notre retour à Paris. En attendant, que faire ? Rouler sur des oeufs pour essayer de préserver la réparation de fortune ou enrouler du câble en se remettant à une hypothétique bonne étoile ? Je choisis la première option pendant 500 mètres. Et comme les autres ne m’attendent pas, j’opte pour la seconde dans la foulée. Bien m’en prend : le pneu arrière de la MT-07 ne me causera plus aucun souci jusqu’à Paris. La suite du voyage emprunte le bitume de la D39, de la D721 et de la D32, les rails d’une voie ferrée désaffectée (pas ce qu’il y a de plus confortable) et la poussière des chemins de montagne qui nous font passer par des bleds aux noms aussi chantants qu’Anzat-le-Luguet ou La Godivelle. Poussière n’est pas un vain mot tant les nuages que nos machines dégagent dans les prairies d’altitude sont amples. Renseignements pris auprès d’un gars du coin, cette poussière est due à l’extrême friabilité de la terre, elle-même liée à une surpopulation de rats taupiers dont l’activité déstructure les sols. Même si la tentation est grande, à moto, mieux vaut donc rester sur les chemins bordant ces prés sous peine de les achever complètement. Histoire d’oublier un peu cette poussière, on pique vers un lac. Non pas celui du Pécher, qu’on a définitivement zappé, mais celui de Servières, plus au nord. Un lac dont le charme tient moins à la taille
75 ch à 9 000 tr/min - 7 mkg à 6 500 tr/min Diamètre Poids : de braquage NC kg à sec 5,250 m 179 kg pleins faits