OBLIGATOIRE
L’Assemblée nationale vient de voter le « Projet de modernisation de la justice du XXIe siècle » qui prévoit, entre autres dispositions, l’obligation pour les entreprises de communiquer, dans l’hypothèse d’une infraction sans interception, l’identité du conducteur, salarié ou non, ayant commis une infraction routière avec le véhicule d’entreprise. Le futur article Art. L. 121-6 du Code de la route sera ainsi rédigé de la façon suivante : « Lorsqu’une infraction constatée selon les modalités prévues à l’article L. 130-9 a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d’immatriculation est une personne morale ou qui est détenu par une personne morale, le représentant légal de cette personne morale doit indiquer, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou de façon dématérialisée, selon des modalités précisées par arrêté, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, à l’autorité mentionnée sur cet avis, l’identité et l’adresse de la personne physique qui conduisait ce véhicule, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou de tout autre événement de force majeure. Le fait de contrevenir au présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. » Même si ce projet est annoncé depuis plusieurs mois, son adoption définitive a fait, à juste titre, bondir bon nombre d’employeurs et ce, principalement en raison de l’application d’une très forte amende dans l’hypothèse d’un refus de désigner les salariés flashés : amende pour ledit employeur s’élevant à 90 euros pouvant aller jusqu’à 1 875 euros ! Dans la pratique, il n’est pas toujours évident de connaître l’identité exacte du conducteur, notamment lorsque plusieurs salariés se retrouveront dans le véhicule, les salariés étant parfois incapables, le jour de réception de l’avis d’infraction par l’employeur de savoir qui conduisait... Et que penser de l’employeur qui désignerait à tort et ce, volontairement, un salarié, alors que le véritable conducteur pourrait ainsi s’en sortir, puisque non désigné... Il ne s’agit pas d’hypothèses d’école ! La prochaine étape sera vraisemblablement l’obligation pour toute société dotée de véhicules d’entreprise de prévoir dans chacun d’entre eux un carnet de bord, permettant l’identification précise du conducteur au moment de l’infraction. L’employeur dénoncera donc le salarié susceptible de conduire au moment des faits ; ce dernier recevra quelques jours plus tard un procès-verbal d’infraction établi à son nom. Il lui sera alors très simple de contester l’infraction, par voie recommandée avec accusé de réception, dans les 45 jours, en joignant le procèsverbal d’infraction en original, et en indiquant sur papier libre qu’il n’était pas au moment des faits au volant du véhicule et qu’il ignorait qui conduisait. Résultat, et au-delà d’un gros bazar en perspective, l’administration sera bien incapable de connaître l’identité exacte du conducteur et ainsi, aucun point ne sera retiré. En voulant trop en faire, nos élus n’ont pas imaginé « l’usine à gaz » pour laquelle ils ont voté... Reste la prochaine étape : l’instauration d’un carnet de bord dans chaque véhicule de société. Affaire à suivre.
Spécialiste du droit pénal routier, maître Jean-François Changeur évoque ici la mesure qui deviendra effective à compter du 1er janvier 2017, et qui vise à obliger l’employeur à dénoncer un salarié qui aurait commis une infraction routière. Mais des parades seront possibles...