Essai dynamique L’HABILE TRIO
C’est fou ce qu’une moto typée trail et propulsée par un twin de moyenne cylindrée peut détenir comme atouts. La preuve suivant trois approches distinctes ayant, chacune, leur lot de dispositions appréciables.
Bon, admettons que le sujet concerne une hypersportive ultra-sexy avec laquelle on partagera seulement quelques week-ends au cours de l’été. Dans cette hypothèse, avouons que l’on pourra assez facilement imaginer se passer de certains aspects pratiques comme de considérations liées au confort. Et même si la belle devait rendre une vingtaine chevaux sur la plus exubérante de la catégorie, cela pourrait rester acceptable étant donné l’influence considérable du facteur esthétique en matière de déclencheur d’achat. Admettons que la réflexion porte maintenant sur une sorte d’attirance viscérale portée vers la famille des roadsters. Cette fois encore – on ne va pas se mentir –, la large majorité des utilisateurs épris de ce genre mécanique ne contribuera pas vraiment à relever la moyenne kilométrique annuelle nationale (d’à peine 3 500 kilomètres, on vous le rappelle). Look, design, cylindrée : dans ces deux cas précis, tels sont les seuls critères (le prix, oui, aussi) plébiscités pour réussir à filer la banane entre juin et septembre. Maintenant, quand on aspire à tailler la route plus humblement, depuis nos trajets quotidiens jusqu’aux frontières lointaines et sans nécessairement avoir envie et/ou les moyens de s’offrir l’ogre BMW R 1200 GS (il y en a d’autres certes, mais c’est pourtant bien elle que l’on croise le plus souvent sur les routes), le trio présenté ici mérite toute notre attention. Mécaniquement d’abord, il se trouve qu’avec des puissances s’étalant de 69 chevaux pour les V-Strom et Versys
à 74,8 chevaux pour la Tracer, on compare effectivement ce qui est comparable. De 6 mkg pour la V-Strom à 6,9 mkg pour la Tracer, en passant par les 6,5 mkg de la Versys, on devine toutefois se dessiner une hiérarchie entre protagonistes. Une hiérarchie cherchant toutefois à s’organiser plus clairement sitôt les masses relevées par la balance. Et c’est ainsi qu’avec ses 196 kilos tous pleins faits, la Tracer 700 parvient à renforcer le contraste de ses arguments, du moins sur le papier. Histoire de tester, durant un instant au moins, l’indécrottable ennui lié à l’emprunt du ruban autoroutier, nous décidons d’engager le combat sur le terrain des reprises et sur le sixième rapport. Top départ depuis 120 km/h : la V-Strom subit, la Tracer et la Versys ne se lâchent pas jusque bien au-delà de la vitesse limite autorisée en ces lieux... Nouvel essai depuis 100 km/h et le schéma se répète à l’identique. Félicitations, chère demoiselle Kawasaki ! Malgré un rapport poids/puissance en retrait, vous venez de signer une honorable performance moteur, tout en écrasant sérieusement votre plus récente rivale sur la question de la protection au vent ! Clairement, la fine et légère Tracer se fait nettement déventer dans cet exercice, ne parvenant pas à canaliser aussi efficacement que ses deux adversaires les contraintes aérodynamiques. Avec sa tête de fourche moins enveloppante, sa bulle certes réglable en hauteur mais définitivement trop minimaliste, la Yamaha lutte contre le vent mais les remous gagnent le casque et les épaules. Face aux mêmes contraintes, la Versys 650 ainsi que la V-Strom sont bien plus efficaces et quasi identiques. Idem concernant le confort de selle où, là encore, la Tracer se tient en retrait avec une
assise plus ferme et moins enveloppante. Quand, enfin, les voilà qui trempent leurs pinglots à la gomme dans un macadam de campagne, la Yamaha se prend à tracer des angles plus obtus, manifestant une belle agilité, doublée d’une sérieuse réactivité. Dotée d’un angle de colonne moins ouvert (24,8° et respectivement 25 et 26° pour les Versys et V-Strom), d’une chasse au sol réduite (98, 108 et 110 mm dans le même ordre) et d’une assise pilote avancée, la voilà qui manifeste un comportement décidément vif et joueur et ce, malgré sa généreuse monte pneumatique arrière en 180/55 x 17 (160/60 x 17 et 150/70 x 17 de la Kawa à la Suz’). Dans cet élan de conduite sportive, la mini-Tracer peut compter sur un freinage puissant et agréable, qui renvoie un bon retour d’informations jusque dans le levier.
Toutes les routes, toutes les humeurs, tous les styles
Très vite, les embouts de repose-pieds viennent grattouiller l’asphalte mais très vite aussi, les suspensions révèlent leurs limites. Tarées plus fermes qu’elles ne le sont à bord de la version roadster (la MT-07), surtout en matière de ressorts, elles souffrent des mêmes lacunes. L’hydraulique des éléments retenus à bord de la Tracer n’est donc pas à la hauteur et, à mesure que le rythme augmente, on se sent évoluer uniquement sur les ressorts de la suspension. Et avec la vitesse, celle-ci tressaute, engendrant du dribble, comme des petits rebonds secs et successifs des deux roues. Durant le même espace-temps, la Versys ne lui aura pas concédé le moindre petit mètre, sans jamais transpirer, tandis que