« Du fond de nos esprits embrumés, on explore avec prudence ce pandémonium pour motards »
le plus super carré de la production (80 x 49,7 mm) réalise l’exploit d’être le mieux rempli depuis les bas régimes, tout en assurant le service maximum là-haut dans les tours. Archi-puissante, la S 1000 RR peut toutefois compter sur un bagage solide en matière de contrôle général. L’électronique est efficace partout mais surtout, la machine profite d’un équilibre excellent avec un engagement prononcé pour la stabilité. A contrario, elle se montre moins incisive, plus lourde à placer et manifeste une inertie supérieure dans les changements de direction.
Affronter la route dans un esprit MotoGP
Sauf que dans l’exercice de la route, cette configuration a tout pour vous mettre en confiance. Sans doute la dernière génération de suspensions semi-actives DDC n’y estelle pas étrangère. Inscrite à un tout autre concours de danse, la Kawasaki ZX-10R se montre autrement plus réactive. Légère de l’avant, très rapide à se mettre en action, elle se révèle tranchante et précise, répondant instantanément aux ordres de son pilote. Son moteur, s’il trace des courbes moins généreuses que son opposé européen, avoue cependant une sacrée santé en bout de bargraphe. Pourtant discret à l’échappement et fort d’une rondeur de fonctionnement à rendre jaloux un compas, le bloc se révèle particulièrement communicatif dans les tours. Sous la charge, l’avant devient encore plus léger. L’électronique s’évertue à le reposer au sol (Traction Control) sans trop de remue-ménage (amortisseur de direction électronique). Le pilote se bouge au guidon, charge les repose-pieds pour canaliser la fougue du Ninja, ceci jusqu’à sentir poindre une once de cette adrénaline dont seuls les chevaliers de Man savent s’enivrer. Oui enfin, relativisons, je n’ai accroché qu’un petit 230 km/h compteur dans la montagne du TT, quelque part entre Bungalow Station et Creg-Ny-Baa... Eux, ils bloquent le compteur à 200... « miles per hour » (321,8 km/h) ! Ce qui nous ravit avec cette Kawa, c’est sa faculté à mêler vivacité et onctuosité globale. En effet, pour tendre vers la vivacité, on bascule l’assiette vers l’avant et on raffermit les suspensions pour, au final, en découdre avec une moto nerveuse, trop radicale pour être exploitée sereinement sur la route. Elle, et ceci sans avoir recours à une assistance électronique de ses suspensions, elle parvient à associer le meilleur des deux mondes ; bravo. Inscrite dans le groupe des « commandos ballerines », l’YZF R1 propose d’affronter le routier dans un esprit purement MotoGP : look engagé, gabarit ultra-contenu, poids sous les 200 kilos pleins faits, haut du corps clairement destiné à charger l’avant, hauteur de selle et de platine repose-pieds aériennes, fermeté et rigidité d’ensemble manifestes, sonorité grisante du Crossplane, bienvenue à bord de cette tireuse d’élite ! Reste à viser juste sur ce ruban de bitume moins coopératif que ne l’est celui d’un circuit de vitesse. Problème, la R1 n’est pas douée pour les compromis. Pour la vitesse d’exécution, il faut la régler dure, sauf qu’elle devient alors inconfortable, renvoyant les inégalités de la route synonymes de fatigue et d’instabilité. Cherchez à ouvrir les hydrauliques et vous constaterez que devant, ça reste très bridé alors que derrière, du mouvement apparaît aussitôt. Pas facile tout ça. Coincé dans cette lucarne de tir, il convient d’allumer la mèche de préférence dans les zones les mieux revêtues. Reste qu’avec son amortisseur de direction électronique et son moteur moins explosif que les deux autres, il y a largement moyen d’aller rafler une bonne salve de sensations sans baigner dans l’urée. Et puis l’urée, c’est mauvais pour le cuir, alors...