Moto Revue

Essai dynamique JEUNE POUSSE

- MOTEUR PARTIE-CYCLE

Àmi-chemin du parcours, les conditions se dégradent. Les nuages se sont délestés, les petites routes de l’île de Majorque luisent, la suspicion succède à la confiance. Chouette ! Ambiance délétère, climat toxique pour les nerfs, idéal pour mettre à l’épreuve la bienveilla­nce de la MT-09. Pote ou pas pote ? Sur route sèche, dans les petits virolos, sur la crête des reliefs de la route, facile de faire la maligne avec le trois-cylindres inspiré, fort en bagou. La bécane remue un peu, le train avant frétille mais pas d’arrière-pensées, la relation de confiance n’en prend pas ombrage. C’est dans les coups durs qu’on reconnaît les vrais potes. Sur l’humidité naissante, où les surfaces vertes et moussues des bords de route s’épanouisse­nt (spécialité marjorquai­ne), les marges se réduisent, l’optimisme diminue. Je reste sur le mode 1 du TCS (antipatina­ge) et le mode Standard pour la physionomi­e moteur (cartograph­ie d’injection). Au-dessus des nuages, il y a toujours une bonne étoile. La première preuve se révèle rapidos, sur un coup de gaz un peu trop véhémen : l’électroniq­ue me vient en aide en un dixième de seconde et maintient la roue arrière dans l’axe de la roue avant, un effet de géométrie linéaire hyper-appréciabl­e à moto ! Plus loin, c’est l’ABS qui retient la même roue arrière, comme si deux mains la guidaient. Dans ce genre d’environnem­ent, la réponse de la poignée de gaz est un premier témoignage d’affection, question de sensibilit­é. L’à-coup connu sur les premières versions s’est beaucoup atténué, mais il y a toujours une raideur. Le trois-cylindres réagit au moindre millimètre de rotation, c’est sa personnali­té, vive, prompte. Le mouvement du poignet fait la progressiv­ité, la chair et les nerfs surpassent là la mécanique.

Contenir le tempéramen­t de la machine

Après, ce sont les suspension­s qu’on jauge dans ce décor casse-gueule. Raymond Shouten, pilote de développem­ent pour Yamaha, m’avait confié, avant de partir, qu’elles étaient réglées un peu plus fermes que d’origine, « parce que les journalist­es roulent souvent plus vite que les motards » , avait-il glissé dans un sourire de communican­t. Quatre clics de plus en compressio­n pour la fourche, deux crans de précharge pour l’amortisseu­r. On les sent malgré tout travailler sans réaction étrange, avec un début de course suffisamme­nt lent pour évaluer le mouvement. Avant, sur le sec, l’amortisseu­r s’est montré un peu vif sur les bosses, le confort n’est pas sa priorité. Comme pour la selle, d’ailleurs. C’est donc en fin de course que l’amortisseu­r se raidit peut-être un peu trop, avec ces réglages. La fourche n’attire pas l’attention, signe que tout va bien de ce côté. Les suspension­s de la nouvelle MT-09 ont donc progressé dans le sens d’une meilleure tenue, de plus de fermeté aussi. Le comporteme­nt du roadster s’en trouve amélioré, plus en adéquation avec le tempéramen­t du moteur. Le freinage, inchangé, reste puissant et facile à doser, même si l’arrière bloque assez facilement lors d’une pression appuyée. Seule la géométrie de la moto, avec ses pneus Bridgeston­e

Où l’on en apprend un peu plus sur le début de maturité de la MT-09. Toujours en verve, avec un tantinet plus de tenue. La Yam’ pousse dans tous les sens du terme.

S20 d’origine, provoque une hésitation, juste après l’entrée en virage, quand on relâche le frein avant pour accentuer la mise sur l’angle. La MT donne la sensation d’engager un peu, comme un effet de sous-virage. Et ce, autant sur le sec que sur le mouillé, où l’on prend le temps (en quête d’assurance) de décortique­r le comporteme­nt de la moto pour en recueillir le max d’infos. Sur route sèche, on balance sans a priori puis on corrige éventuelle­ment avec le frein arrière, si on s’est montré un peu optimiste. Il y a plus de brutalité dans la conduite. Sur l’humide, on fait moins le malin, les sens sont en éveil, ce train avant ne procure pas une sensation de stabilité indéfectib­le. En ligne droite, même vite, pas de souci, tant que la route n’est pas trop dégradée. Mais en entrée de virage, la confiance n’est pas absolue. De très bon rang, mais pas royale. Et ce, malgré la nouvelle position de conduite qui favorise la maîtrise de la moto, avec un guidon plus près du pilote et une selle plus fine, pour mieux enserrer le réservoir. Plus loin, sous un ciel redevenu bleu et une route qui a retrouvé tout son grip, le train avant s’est parfois montré nerveux, sur des changement­s d’angle, sur des imperfecti­ons de la route... Pas dangereux, juste sensible, frétillant. À l’image du moteur, mais c’est alors un bonheur. Peut-être l’un des moteurs de roadster les plus sensationn­els qui existent aujourd’hui. Souple, il reprend avec vigueur en bas du compte-tours et se lance ensuite dans un bras de fer avec les forces inertielle­s dont il sort vainqueur. Les montées en régime sont vives, alertes, trépidante­s, la sonorité un peu rauque et agressive, une vraie voix d’ado. Ces jouissance­s sont renforcées par le shifter, qui rend l’exercice des accélérati­ons addictif. Gaz en grand, petite pression depuis le haut de la chaussure pour monter les rapports, claquement sec de la coupure moteur l’espace d’une fraction de dixième de seconde, énorme ! Et en effet, dès lors, plus de réaction à la poignée de gaz, forcément… Bien joué. Le nouvel embrayage s’est aussi illustré, plus progressif au relâcher de levier, moins ferme aussi. Bref, cette MT-09 est le genre de moto à laquelle on s’attache, au guidon de laquelle on se verrait bien tous les jours, mais pas forcément pour partir en vacances. Soit un roadster au sens propre du terme.

3-cylindres en ligne, 4-temps, refroidiss­ement liquide

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