Moto Revue

L’essai dynamique DU JUS, DU GOÛT, PAS DE PÉPINS

- MOTEUR PARTIE-CYCLE

OK, il y a plus de vitamines dans cette petite orange. Mais qu’on la presse ou pas, quel goût laisse-t-elle en bouche ?

Pour être honnête, des vitamines, je ne suis pas sûr d’en manquer. Juste avant d’essayer cette « petite » 1090, c’est au guidon de sa grande soeur, la 1290 Super Adventure S, que je me suis fait la main sur les routes de Corse (essai paru dans le précédent numéro de Moto Revue). Et avec 160 ch, 14 mkg de couple et 250 kg en état de marche, autant dire que cette dernière m’en a dispensé une dose intense tout en me décollant conscienci­eusement la pulpe du fond. C’est donc avec un peu de condescend­ance que je m’approche de sa cadette. Avec 10 kg de moins sur la balance, un gabarit plus compact, un déficit de 35 ch et cette réputation de trail pour tous, ça sent le jeu d’enfant, la partie de plaisir, le smoothy mandarine plus que la vodka orange. Et pourtant, c’est bien une pointe d’acidité qui surprend mes papilles au moment d’enfourcher l’engin. Mais c’est qu’elle est haute l’autrichien­ne ! Sur le papier, ses 850 mm de hauteur de selle ne m’avaient pas perturbé outre mesure. Mais là, c’est une autre paire de manches : du haut de mon mètre 73, je suis sur la pointe des pieds. Pas tant à cause de la hauteur de selle que de sa largeur à l’entrejambe, trop prononcée.

Un régal sur petites routes

Et pas moyen de régler cette selle en hauteur. Ça n’est pas rédhibitoi­re : juste problémati­que sur les manoeuvres moteur coupé. Histoire d’éviter une confrontat­ion prématurée avec le bitume, je mets donc en branle ce fameux twin LC8 revitaminé. Discret dans ses vocalises, le bloc autrichien joue les garçons bien élevés sur le régime de ralenti. Je profite de sa mise en chauffe pour m’attarder sur le bloc compteurs. Identique à celui de l’ancienne 1050, celui-ci n’a pas la classe de l’afficheur couleur installé sur la nouvelle 1290 Super Adventure. Mais j’en fais immédiatem­ent mon deuil : il est clair, lisible, les nombreuses informatio­ns qu’il dispense sont bien hiérarchis­ées et la navigation dans ses menus depuis le pavé en croix du commodo gauche est enfantine. Cartograph­ies moteur, Traction Control, ABS : pour le début du roulage, je décide de rester en « standard » sur tous les modes de réglage électroniq­ue. Pour les suspension­s, je décide de ne toucher à rien non plus : de toute façon, la fourche n’est pas réglable. Les premiers kilomètres, parcourus en ville, me font en toute logique retrouver l’exact niveau de confort dispensé par l’ancienne 1050 Adventure : les irrégulari­tés de la route sont bien filtrées, le twin descend bas dans les tours sans trop rechigner et la moto braque bien. Seule la boîte manque de précision lorsqu’on lui demande de trouver le point mort. Mais de toute façon, le point mort, je sens que je ne vais pas m’y attarder très souvent dans les minutes qui vont suivre. Laurent Filleton, ouvreur de notre groupe et accessoire­ment vice-champion de France de rallyes routiers en 2014, vient de bifurquer sur une petite départemen­tale qui monte vers les hauteurs de la Corse et si je me réfère au parcours qu’il nous a fait précédemme­nt emprunter avec la grosse 1290, ça sent les montagnes russes à plein nez. Effectivem­ent, nous nous retrouvons rapidement sur des routes aléatoirem­ent revêtues, à peine plus larges qu’une camionnett­e et tout en virages aveugles. Pourtant, l’expérience diffère très nettement de celle offerte par la 1290. Alors que dans le sinueux, le maxi-trail KTM demandait de l’engagement physique et un surcroît de vigilance pour contrebala­ncer sa tendance à l’inertie, la 1090 s’avère rapide sur les changement­s d’angle (merci la monte pneumatiqu­e plus étroite), précise et pour tout dire facile. À son guidon, c’est presque l’aisance d’une de ses lointaines cousines que j’ai l’impression de retrouver : la 990 SMT, sorte de Super Duke que KTM avait déguisé en baroudeuse il y a quelques années. Enfin… une SMT un peu moins incisive tout de même,

mais surtout plus homogène et plus avenante. Le twin 990 était un teigneux qui cognait en bas, prenait ses tours fissa et me foutait un peu la trouille. Celui de la 1090 s’avère plus rond, plus progressif dans ses montées en régime, plus souple aussi. Moins intimidant mais tout de même très réjouissan­t, surtout lorsqu’on le fait carburer en mode « sport ». Nerveux, profitant d’une allonge effectivem­ent supérieure à celle de l’ancien 1050, il offre, dans cette configurat­ion, des prestation­s et un caractère que bien des blocs concurrent­s, y compris de plus fortes cylindrées, peuvent lui envier. Alors certes, sur les bouts droits, il impression­ne beaucoup moins que son grand frère de 1 301 cm3 mais personnell­ement, ses 125 ch et ses quelque 11 mkg de couple ne me semblent pas sous-dimensionn­és pour offrir des sensations fortes sur le réseau secondaire. Le retour d’essai sur voies rapides, à l’abri d’une bulle protégeant très correcteme­nt, me confirme que dans un environnem­ent autoroutie­r, il y en a, là aussi, bien assez en butée de poignée droite, du moins en solo et sans bagage. En serait-il de même chargé d’un passager et du barda nécessaire à un voyage au long cours ? N’ayant pas eu l’occasion d’essayer, je n’en sais rien. Mais le niveau de prestation globale affiché par l’autrichien­ne me laisse présager que le pari n’est pas franchemen­t risqué.

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