LA BARRIÈRE DE L’ACIER ALLEMAND
Que ce soit pour la méthode douce (crochetage), ou dure (destruction), la société allemande ABUS est passée maître dans l’art difficile de la fabrication et de la commercialisation de U, bloque-disques et chaînes haut de gamme. Sans oublier les solutions de sécurisation d’un stationnement résidentiel (ancrages). Ses points forts ? Un acier 100 % allemand de très haute qualité et des serrures quasiment inviolables par le commun des mortels. Sans oublier une production « à la maison », dans l’usine ultra-moderne de Westerwald. Piqué par les tests exigeants du SRA, « motivé » par le marché français aussi important et
La protection contre le vol de sa moto est donc le coeur du problème. Elle est toujours une histoire de compromis. À ce titre, un acteur historique du marché revendique un très haut niveau de résistance aux agressions : ABUS.
consommateur en antivols qu’il peut être contraignant en matière de certification, ABUS redouble d’efforts financiers et techniques afin de relever les défis imposés. Nous en avons eu la démonstration lors de notre visite sur leur site de production. Dans un cadre idyllique (petit ruisseau traversant entre les bâtiments de l’usine et salon de jardin au loin dans l’immense pelouse), l’environnement lumineux de l’usine est des plus agréables. Nous découvrons les îlots de travail répartis dans la florissante usine en pleine expansion. En perpétuelle mutation interne et externe, elle s’adapte à la demande et aux innovations, ne s’endormant aucunement sur ses lauriers pourtant fournis. Le maître mot de la société ABUS ? Une autonomie parfaite. Tout faire et surtout, tout financer en interne. Chaque euro investi l’est de sa propre poche. Recherche & Développement, maîtrise et production des outils de fabrication sont ainsi faits sur place, dans la plus grande confidentialité. Imaginez un univers où l’ergonomie est reine, où chaque poste de travail s’adapte à son opérateur et où toutes les tâches de production de masse sont déléguées à des robots savants oeuvrant dans un ballet réglé au millimètre.
Technique de pointe
Tout débute par la découpe des immenses barres de fer rectangulaires de grosse section : celles utilisées pour satisfaire SRA. Issues de la métallurgie allemande, elles sont scindées, contrôlées manuellement, percées, traitées puis peintes pour devenir le corps d’un antivol. L’une des spécificités des U ABUS apparaît déjà : l’encoche carrée accueillant l’arceau cémenté de forme complexe. Lui-même cintré et gainé sur place, il offre, par sa forme, un niveau de protection supplémentaire : même découpée, l’anse ne peut tourner sur elle-même et donc s’ouvrir ou se déformer exagérément. Le mécanisme de la serrure X-Plus, composé de 8 cylindres (soit plus de 1 679 616 combinaisons possibles), est assemblé manuellement et refermé par une mâchoire maison censée être inviolable, tandis que la combinaison composée est codée pour retrouver la clef correspondante. Les clefs, pour être précis. Elles seront produites par 2, aléatoirement, sans que les numéros de série ne se suivent. Ceci afin qu’aucun point de vente ne dispose de clefs ne seraitce que ressemblantes. Les « jumelles » sont étiquetées et parées d’une carte ABUS arborant le code-barres de sa série, afin que l’on puisse les reproduire directement à l’usine en cas de perte ou de vol. Une autre raison à cela : ABUS est en mesure de proposer un système de clef unique pour plusieurs serrures. Le jour de notre visite, nous avons pu assister à la mise en production d’une nouvelle version d’un bloque-disque de la famille Granit Detecto XPlus (complété par une alarme) : le 8077. Retoqué par le SRA peu de temps avant, il prenait là sa revanche. Encore une fois, nous avons observé un assemblage manuel minutieux et soigneusement orchestré, regroupant, en une opération, près de 50 pièces pré-assemblées. La nouveauté de cette version ? Le plus gros
diamètre de tige de penne de la production, tige dans laquelle on retrouve un cylindre de céramique monté sur roulement à billes... De quoi empêcher toute découpe par disqueuse et faire la nique au test du SRA sur cet élément précis (antivol non fixé sur un disque aux dires d’ABUS).
Un pour tous, tous contre le vol
Pour ABUS – et bien d’autres fabricants –, un principe de sécurité doit être efficace, mais aussi achetable et exploitable. On peut faire des cadenas résistants aux sollicitations importantes, mais tout est histoire de compromis. Il faut avant tout ralentir le vol. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les « villes » et leurs municipalités ne font pas de grands efforts dans ce sens. La moto concerne pour elles une minorité d’usagers et investir dans ce secteur ne recueille pas les suffrages. Si les places de parking dédiées aux deuxroues sont déjà peu nombreuses dans les grandes agglomérations, plus rares encore sont celles offrant la possibilité d’arrimer son véhicule à un point fixe... Il serait pourtant « simple » et logique de proposer un matériel à même d’éviter de devoir transporter l’intégralité d’un antivol, notamment la très lourde chaîne. Entre l’interdiction de s’accrocher à du mobilier urbain (y compris un poteau, même si cela ne gêne pas la circulation piétonnière), le stationnement payant sur des places non sécurisées et une politique de plus en plus répressive, les voleurs ont encore de beaux jours devant eux, notamment lorsqu’ils embarquent votre moto ! Alors oui, les constructeurs et fabricants d’équipements antivol doivent progresser sur certains points (transport, légèreté, encombrement), mais ceux ayant obtenu une certification ont déjà atteint une grande qualité, voire l’excellence dans leur domaine. Ils ne pourront à eux seuls endiguer le vol. Il nous faut avant tout une infrastructure capable de protéger nos biens lorsqu’ils sont le plus exposés : dans la rue, mais aussi à son domicile. Oser déranger un voleur, poser une question ou prendre une photo lorsqu’on observe un comportement suspect, bref, agir ensemble contre cette plaie sera toujours bénéfique. Gardons également en tête que la forme des vols évolue sans cesse et qu’il existe toujours des moments où l’on est plus vulnérables que d’autres : lorsqu’on roule (le « bike jacking »), notamment. N’oublions pas non plus que nous roulons de moins en moins – entre 6 et 12 000 km parcourus/an estimés en fonction de la catégorie d’un gros cube. Fort logiquement, on stationne de plus en plus.