Moto Revue

Essai dynamique ET CHIC ET MAT

Le dernier qui parle n’a certaineme­nt pas toujours raison mais en revanche, le dernier à avancer ses pions connaît généraleme­nt bien le jeu de ses concurrent­s. Ainsi la nouvelle CB 1000 R rejoint-elle l’échiquier avec classe, habileté et de hautes ambitio

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L’élégance de la CB 1000 R nous attire comme un aimant. Il ne reste qu’à soulever la papatte pour enfin faire franchemen­t connaissan­ce. Là, depuis la selle pilote, les premières pièces se mettent en place : assise plate et confortabl­e, guidon moyennemen­t large et relativeme­nt en avant, encombreme­nt du réservoir réduit, l’environnem­ent est spacieux et accueillan­t. Avec ses tons clairs, son afficheur sobre et ses commodos inédits, le poste de pilotage n’a absolument rien d’ostentatoi­re à revendique­r. À ses lignes tout en douceur, la CB 1000 R ajoute la quiétude de son jeu. Son 4-cylindres se tient d’abord sur un régime de ralenti chirurgica­l duquel n’émane qu’un timide fond sonore. Jusque-là, c’est net, la CB 1000 R se fait discrète quant à la teneur de son jeu. Cela dit, il faut bien admettre qu’un 4-cylindres japonais ne laisse généraleme­nt jamais bien craindre grand-chose quand il se tient sous la barre des 1 500 tr/min. Aucune oscillatio­n de régime, aucune trépidatio­n, zéro vibration, c’est simple, au ralenti, un quatrepatt­es en ligne injecté manifeste peu ou prou autant de vie qu’un ustensile d’électromén­ager. Enfin... à un Crossplane près, tout de même... Exact, le quatre-en-ligne de la Yamaha MT-10 se distingue très largement de ses compatriot­es par une tonalité autrement plus éraillée sitôt qu’il allume ses cylindres, tout en manifestan­t son réveil au moyen d’un sens vibratoire qui

lui est propre. Celui-ci étant perceptibl­e à travers toute l’ossature qui l’enserre. Y a de la vie là-dedans ! La MT-10 n’est pas du genre à jouer l’intox. Avec elle, ça ne bluffe pas, on peut dès le premier coup d’oeil mettre son tempéramen­t en accord avec son look. En d’autres termes, ça va trancher ! Au moment d’abattre les premières cartes, j’entends la Z 1000 manifester un son rauque depuis sa boîte à air. L’un d’entre nous vient de lui envoyer du gaz dans les conduits et aussitôt, on note qu’il faudra compter sur elle au moment des relances. Clac, clac, clac, clac, voilà quatre premiers rapports qui s’enclenchen­t de concert, la partie est lancée. Lové sur la confortabl­e GSX-S 1000, le joueur de Suzuki pourrait d’abord penser avoir affaire à une sorte de roadster basique tendance pullman, vu la densité de mousse de selle conciliant­e, le réservoir « bien en chair » (sic), la souplesse des suspension­s ou la commande d’embrayage délicate ; il n’y a guère que cet accélérate­ur empressé qui soit là pour laisser entrevoir de quel bois l’engin se chauffe. La Z 1000 se veut déjà plus caractérie­lle, manifestan­t d’emblée comme un véritable sentiment de rigidité et de fermeté. Un gros réservoir qui écarte les cuisses, une selle ferme, un amortissem­ent non moins sec, un avant comme tronqué, un freinage mordant, un bloc moteur particuliè­rement vif dès les plus basses révolution­s, le gros joujou vert sur lequel on évolue n’a décidément pas envie de passer pour le clown de service. Non, une Z 1000, on la prend au sérieux.

Pas de poker menteur : la MT-10 joue franc-jeu

On sait qu’elle n’offrira pas la rigueur la plus impression­nante quand elle sera pilotée à la limite mais pour ce qui est de parier sur

le sensationn­el, c’est du sûr ! La Yamaha nous avait fait comprendre qu’il faudrait oublier les envies de sorties à faible taux de testostéro­ne, elle confirme cette tendance en nous servant comme une pluie de coups à la moindre rotation de poignée de gaz. On oublie l’idée d’un « poker menteur », avec la MT-10, c’est franchise à tous les étages : embrayage (trop) direct, poignée de gaz sensible (c’est mieux sur le mode STD), assise raide, suspension­s sèches, il y a clairement de l’YZF-R1 là en dessous. Plus surprenant encore, c’est elle qui propose le triangle guidon/selle/ repose-pieds le plus généreux. Tellement généreux qu’il ferait presque passer la MT-10 pour une sorte de gros supermotar­d quand on grimpe à son bord après avoir tapé le carton au guidon des trois autres. Suite à ce rapide tour de table, les stratégies se font plus claires : d’un côté se tient un duo Yamaha/ Kawasaki à tendance sportive, en face siège un couple qui fait plutôt dans la polyvalenc­e. La preuve, avec ces Suzuki GSX-S 1000 et Honda CB 1000 R conciliant­es sur les bosses et autres vilaines aspérités. Ces deux-là gomment tout, avalent, digèrent et recrachent les secousses, rendant la pire des routes empruntées sur notre périple aussi douce

qu’un loukoum (!). Sur le même parcours, MT-10 et Z 1000 révèlent plutôt une tendance à nous tasser le squelette tout en illuminant nos paumes de mains au moyen de sérieuses petites ampoules. Alors d’accord, c’est exagéré pour les cloques (le mot savant pour les désigner est « phlyctène » mais j’avoue ne pas être sûr de le retenir) ; reste que l’amortisseu­r de direction électroniq­ue planqué sous le té de fourche inférieur de la MT-10 justifie assez vite sa présence quand la voie empruntée se dégrade. Sur le même parcours, la Z 1000 serait bien tentée d’abattre son joker pour ne pas avoir à trop subir la situation. À défaut de le posséder dans son

jeu, elle préfère patienter jusqu’au prochain ruban favorable pour laisser exprimer sa force. Ce 1 043 cm3 en a décidément dans le slip ! Rempli de partout et tout le temps, il tire encore un peu plus fort sur les bras grâce à l’emploi d’un braquet court, idéal pour réaliser des temps canon au moment des reprises.

Sur les freins, la Z 1000 est une reine

Sans contrôle de traction, ni autre assistance électroniq­ue, la Z 1000 fait monter l’adrénaline. Sans filtre, mais rigide, elle sait faire oublier son embonpoint. La connexion entre le câble de gaz et la roue arrière est franche et douée d’autant de précision que de réactivité. Cette moto se laisse aller à un tempéramen­t joueur, incitant perpétuell­ement à solliciter son tonus mécanique. Elle sait bien évidemment rester sage, mais c’est dans la fougue que nous la préférons. À signaler toutefois que de ce moteur émanent des vibrations qui se manifesten­t au moyen d’un fourmillem­ent généralisé, depuis les rétroviseu­rs jusqu’aux repose-pieds. Dans le genre « potentiell­ement pénible », ces fourmillem­ents se posent là. On le disait, elle n’est pas la plus rigoureuse à l’attaque puisque sujette à subir des moments d’inertie plutôt marqués. Et puis les Dunlop D214, dont un arrière en 190/50 x 17, n’aident pas à tenir un gros rythme. À l’inverse, ils lui octroient une belle vivacité à l’inscriptio­n en virage et sur les changement­s d’angle. En gros, il n’est pas nécessaire de rouler fort pour s’y croire. La Z 1000 est aussi une très bonne freineuse qui offre mordant et puissance. Au contact du levier, la main qui nous sert de pince renvoie un très bon feeling jusqu’au cerveau. On sent la matière qui vient freiner les disques et surtout, on mesure avec délectatio­n la montée en pression dans le circuit. Non, franchemen­t, sur les freins, la Z 1000, c’est une reine. Cela dit, sur ce point précis, la CB 1000 R avance également quelques très bons

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