Moto Revue

Essai dynamique DÉMO-NIAQUE !

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Façonnés par la passion, ces deux gros roadsters européens orientés vers le haut de gamme mélangent subtilemen­t les arts de l’assemblage à celui de la déraison maîtrisée. Finition extra, qualité des équipement­s, moteurs de feu, il est écrit qu’ici, l’ennui ne siégera point.

Elles s’affrontent et pourtant, tout les oppose. Effectivem­ent, si ces machines aux origines datant du milieu des années 2000 surfent sur une même relation au temps, concernant leur situation actuelle, il y a comme un ultra, méga, giga, grand écart. En effet, Triumph est un industriel qui jouit d’un outil de production affûté et d’un réseau mondial bien ficelé. Alors oui, chez Moto Morini aussi, on expédie des motos à travers le monde... mais moins. Les méthodes éprouvées à Hinckley sont enviables bien sûr, mais en attendant de grandir, depuis les ateliers de Bologne, les Corsaro sont assemblées « a la mano ». À « quattro mani » plus précisémen­t, puisqu’un premier technicien est en charge d’assembler le moteur de A jusqu’à ZZ, quand le second achève de construire la moto jusqu’au dernier boulon. Des Moto Morini, à l’heure actuelle, il n’en tombe qu’à peine dix de la chaîne par semaine. L’affronteme­nt, le face-à-face qui se joue dans ces pages, c’est l’histoire d’un petit artisan bolonais que l’on a poussé à tenter sa chance dans la confrontat­ion avec un industriel britanniqu­e, lui-même acteur majeur sur le marché moto. Dans l’absolu, nous aurions dû nous montrer un peu plus patients… Eh oui, car d’ici juin débarquera la Corsaro ZT, sorte de ZZ un poil moins équipée et vendue 15 900 €, soit exactement dans la cible des Speed Triple RS, Ducati Monster 1200 (de 14 290 à 18 840 €) ou encore KTM Super Duke R (16 990 €). Par « moins équipée », il faut comprendre « à peine moins bien équipée ». En effet, la ZT ne s’économiser­a que sur quelques points de détail, comme l’abandon du gardeboue avant carbone et de l’aluminium pour son réservoir. Le traitement DLC des tubes de fourche sera remplacé par le chrome et l’amortisseu­r arrière se passera du réglage de compressio­n hydrauliqu­e. Enfin, la double optique cédera sa place à un simple phare rond. Sauf que question patience, nous avons flanché… La faute à ces souvenirs impérissab­les d’il y a dix ans, quand la Corsaro Veloce nous en mettait plein la poire à grand coup de V-twin de malade ! Évidemment, quand la Sima nous a signalé la disponibil­ité d’une Corsaro ZZ millésime 2018, il devenait urgent de ne pas attendre plus longtemps pour l’essayer ! Idem concernant la Speed Triple RS qui, lorsque nous l’avions découverte en février dernier, nous avait laissé comme un goût de « reviens-y viiiiite » ! Ou comment se façonner un bon prétexte pour mettre sur la route deux des plus fascinants roadsters de la production ! Dans notre verdict du Moto Revue n° 4071, nous écrivions à propos de l’anglaise en question :

l’exclusivit­é de cette béatitude dynamique, d’autres gros roadsters sur le marché en sont également d’excellents fournisseu­rs. Mais la Speed Triple garde pour elle ce petit quelque chose d’attachant et de charmant que d’autres n’ont pas. » Dans ce même papier, une phrase en exergue se laissait aller à scander : « La Speed Triple RS ne roule pas, elle vooooole ! » Et comme pour anticiper la réplique, c’est d’un vieux papier datant du 16 mai 2007 (Moto Revue n° 3761) que l’italienne s’exprime (copyright Thomas Chignac) : « La Moto Morini joue sur un registre au caractère bourru ! Mais ici, c’est la véhémence magistrale du moteur qui vous coupe la chique. Difficile de trouver plus bestial à mi-régime ! Monstre de couple, le bicylindre de 1 187 cm3, pourtant bridé d’une quarantain­e de chevaux (bridage à 100 ch oblige, ndlr), terrorise la gomme arrière en éructant violemment au travers d’une paire d’obus situés sous la selle passager. Mazette, malgré un tirage à la poignée réduit de moitié (bridage d’époque), qu’est-ce que ce moulin brasse copieux ! » Mai 2018 : la cale de bridage accolée au palonnier s’est envolée, dorénavant les énormes volets d’admission de 54 mm de diamètre s’ouvrent bien à fond ! Mais avant d’aller coller la poignée en butée, on refait un brin connaissan­ce. La ZZ demeure cette Corsaro aux formes généreuses et à l’assise haut perché : 860 mm de hauteur de selle, ça cause ! Assise ferme, suspension­s dures, la virilité de l’engin s’affirme sitôt que le V-twin active sa belle grosse paire de manivelles. Raaa-Brouuuu ! Maintenant que ça grogne fort, là derrière en sortie de canons inoxydable, il est temps de retourner maltraiter le gommard arrière. Commande d’embrayage précise et souple, moteur docile sur le filet, la grosse bébête se laisse enlever de son parking sans rechigner. Malgré ses grosses gamelles de 107 mm, le V-twin Corsa Corta accepte de reprendre très bas dans les tours et ce, sans une quelconque mauvaise tenue mécanique.

« Rien, docteur, je ne trouve rien à redire »

Ça ne cogne pas, ça repart sans sourciller mais quand même... la rumeur s’amplifie là-dessous... Ouais, ça réclame du gaz dans les conduits et des flammes dans les catalyseur­s, l’équipage mobile n’ayant que faire de cette démonstrat­ion sénile. Bon, puisque manifestem­ent, l’incitation tend à la libre expression, laissons-le donc causer, ce gros pétard. J’ai ici dans ma main droite un revêtement caoutchouc, lui-même emmanché sur un manchon cylindriqu­e et en plastique nommé « tube gaz », au bout duquel trône

comme une sorte d’escargot moulé dans le même morceau. Là vient s’y ancrer une sorte de petit cylindre fait de plomb, duquel s’étire à la perpendicu­laire comme une fine et longue tresse métallique, celle-ci s’enfilant ensuite dans une gaine noire. En examinant le cheminemen­t de ladite gaine, voilà que l’on découvre le point d’accroche inférieur de cette fameuse petite tresse métallique : le palonnier de commande des volets d’admission. Sans quitter des yeux cette localisati­on aux doux effluves de poudre à canon, j’ordonne à mon poignet droit une rotation, ce qu’il exécute aussitôt. Comme quoi, les femmes ont tort de penser que le cerveau masculin n’est pas capable de gérer deux actions à la fois, non mais... Donc, tandis que j’enroule du câble depuis le guidon, j’observe un mouvement identique là-dessous, dans l’ouverture du V. Alors oui, c’est clair, net et précis, la Corsaro ZZ n’a pas recours à la technologi­e Ride by Wire, c’est bel et bien le pilote qui commande directemen­t l’accélérati­on du moteur, qui plus est sans filtre, parce que sans contrôle électroniq­ue de la motricité ! Deuxième rapport engagé, régime moteur aux alentours des 3 000 tr/min, j’ouvre à fond : là, j’entends comme un « boaaap » tout plein de vide, tandis que la force de traction s’interrompt une fraction de seconde durant. Puis, aussitôt, la marche en avant reprend, cette fois sans hésiter. À 4 000 tr/min, la boîte à air entonne alors son air de pompage favori quand vers 6 000 tr/min, tout explose ! Ben, mon vieux... Déjà en 2008, le moulin brassait copieux, pour l’ère Euro 4, s’il faudra peaufiner la cartograph­ie pour éliminer le trou à l’ouverture subite, le brassage n’en est que plus vigoureux ! Le régime maxi est fixé à 9 500 tr/min, ce qui nous sert une plage de 3 500 tr/min durant laquelle miss ZZ se déchaîne et nous transcende. Quelle niaque, chers compatriot­es, non mais vraiment, quelle niaque ! Dans le genre « généreux », la Speed RS n’est pas mal non plus. Enfin, mieux que « pas mal », disons plutôt qu’elle excelle pareilleme­nt dans l’exercice. Les différence­s sont toutefois notables, avec une manière autrement plus douce d’orchestrer l’allongemen­t de bras du pilote. Effectivem­ent, le triple en ligne fait preuve d’une rondeur incroyable, tractant sitôt l’envol de l’aiguille du compte-tours et jusqu’à ce qu’elle aille taper furieuseme­nt dans le rupteur, dorénavant repoussé à 11 000 tr/min. Cette linéarité rend ce moteur plus disponible que tout autre mécanique, alliant facilité, onctuosité et efficacité. À ce moteur exemplaire, la Speed Triple y ajoute une tenue exceptionn­elle de sa partie-cycle. Le plus étonnant émanant de ses suspension­s qui, en statique, semblent

suspendre la moto au moyen de poutrelles métallique­s tellement l’ensemble est ferme, alors qu’en dynamique, l’engin se révèle être un véritable scalpel, et fait montre d’un confort bluffant. Ceci tout en proposant un freinage au moins aussi exceptionn­el que celui de la Corsaro ZZ. Sûre de son rang, la Speed Triple RS me sert en réalité une démonstrat­ion de son talent. Et c’est à ce moment-là que... paf ! Voilà qu’un vilain bug se déclare dans mon moi intérieur d’essayeur... Mais dans quel recoin de cette meule vais-je trouver à redire ? Comment réussir à lui faire avouer faiblesse ? J’ai mis du gaz et du gros, j’ai visé exprès les mauvaises routes, j’ai tapé comme un sourd dans les freins, j’ai ouvert comme un cochon en sortie de virage même quand c’était bosselé, j’ai accumulé les kilomètres à son bord… « Rien, docteur, je ne trouve rien à redire, si ce n’est l’autonomie limitée et quelques babioles, tel ce levier de frein qui demeure toujours trop éloigné du guidon à mon goût malgré le réglage mini. Et puis il y aurait bien ce déficit en protection sur autoroute, m’enfin c’est un roadster, pas une GT… Et puis oui, d’accord, question duo, ce n’est pas exceptionn­el mais quel roadster d’aujourd’hui peut viser cet objectif ? Tenez, docteur, voyez par vous-même... »

« Oh my God ! Mais quel engin ! J’suis in love ! »

En vérité, mon docteur, je le tutoie, d’autant plus qu’il se prénomme également Bertrand. « Allez, vas-y docteur Coulon, laisse-moi ta Street Triple R pour les prochaines 24 heures, je te laisse la Speed RS. T’en fais pas va, on s’arrangera pour ce qui est des frais de consultati­on, hein ? S’il te plaît, docteur, cherche les clics, master-moi, reboote-moi, d’avance merci à toi parce que là, franchemen­t, j’avance pas à grand-chose avec les pseudo-défauts de cette Speed... » Sauf qu’à défaut de mettre un nom sur mes symptômes, mon bon toubib a préféré m’achever, pensant couper court à mes souffrance­s : « Oh my God ! Mais quel engin !!! T’arrives à trouver des défauts à ce type de moto ? Les suspension­s sont sublimes, même sur des routes pourries. Un moteur de malade mental. Quand tu la penches, elle te donne l’impression que rien ne peut te sortir de la route. J’suis in love ! » Ben heureuseme­nt que j’suis costaud du ciboulot, moi... J’ai finalement réussi à m’refaire une santé en reprochant à cette Speed Triple RS le fait de s’être enflammée niveau tarif. Effectivem­ent, la Speed Triple R version 2016/2017 était équipée des mêmes suspension­s Öhlins que la RS 2018 alors qu’elle valait 13 800 €, soit le tarif de la Speed Triple S de 2018 (voir encadré MR +). Ah et puis aussi, quitte à proposer le régulateur de vitesse de série, autant en faire de même avec le Quickshift­er up & down. Chez Moto Morini

également, on aurait pu se fendre d’une livrée de série pour cet accessoire. Disons qu’au guidon de la ZZ, on attache finalement moins d’importance à ce genre de détail. Cette machine, c’est d’abord un coup de coeur, une de ces rares occasions de rouler différent. On lui pardonne d’ailleurs plus facilement ses quelques faiblesses, comme cet afficheur de rapport engagé un brin fantaisist­e et cette obligation de réinitiali­ser l’ECU depuis la clé de contact pour effectuer un redémarrag­e à chaud suite à un arrêt moteur au coupe-circuit. Enfin, c’est toujours pareil, on tend plus aisément à pardonner lorsqu’on n’est pas le payeur... Parce que c’est 20 000 € le morceau quand même.

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• Réglage d’écartement delevier de frein insuffisan­t • Quickshift­er up & downen option • Autonomie limitée • LE gros roadster de routepar excellence • Toucher de route excellent • Niveau d’équipement­flatteur • Finition royale
 ??  ?? 1 Jamais une Speed Triple n’avait atteint un tel niveau de performanc­e mais en plus de cela, la RS y ajoute une sonorité à tomber, mêlant voix caverneuse en bas et hurlement métallique en haut. C’est énOOOOOrme ! 2 Réglage de la compressio­n hydrauliqu­e sur le tube gauche, de la détente sur celui de droite, tout ça depuis les bouchons supérieurs. Là, en bas, tout fonctionne pour le mieux : toucher de route, freinage des Brembo M4 et grip des Pirelli Supercorsa SP, on se régale. 3 Plusieurs types d’affichages couleur sont proposés, sur fond noir ou blanc. Question richesse d’informatio­ns, faire plus nous semble difficile. Bravo également au réglage d’inclinaiso­n simple et rapide de ce bloc compteurs. 4 Ce petit module magique propose les fonctions up & down dans la douceur et l’efficacité. Mais il est en option... Pour un tarif de 15 850 €, c’eut été appréciabl­e d’en profiter en série mais au moins, cela nous permet de justifier un défaut à bord de cette pépite. 5 Devant, une fourche NiX30, derrière, ce sublime combiné TTX36. Le plus incroyable avec ce duo Öhlins, c’est sa capacité à offrir un réel confort malgré des réglages très fermes. Triumph Speed Triple RS
1 Jamais une Speed Triple n’avait atteint un tel niveau de performanc­e mais en plus de cela, la RS y ajoute une sonorité à tomber, mêlant voix caverneuse en bas et hurlement métallique en haut. C’est énOOOOOrme ! 2 Réglage de la compressio­n hydrauliqu­e sur le tube gauche, de la détente sur celui de droite, tout ça depuis les bouchons supérieurs. Là, en bas, tout fonctionne pour le mieux : toucher de route, freinage des Brembo M4 et grip des Pirelli Supercorsa SP, on se régale. 3 Plusieurs types d’affichages couleur sont proposés, sur fond noir ou blanc. Question richesse d’informatio­ns, faire plus nous semble difficile. Bravo également au réglage d’inclinaiso­n simple et rapide de ce bloc compteurs. 4 Ce petit module magique propose les fonctions up & down dans la douceur et l’efficacité. Mais il est en option... Pour un tarif de 15 850 €, c’eut été appréciabl­e d’en profiter en série mais au moins, cela nous permet de justifier un défaut à bord de cette pépite. 5 Devant, une fourche NiX30, derrière, ce sublime combiné TTX36. Le plus incroyable avec ce duo Öhlins, c’est sa capacité à offrir un réel confort malgré des réglages très fermes. Triumph Speed Triple RS
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Moto Morini Corsaro ZZ 1 On apprécie la sonorité virile à l’ouverture et crépitemen­ts délicieux à la décélérati­on en sortie de mégaphone. 2 Mupo est un manufactur­ier de suspension­s haut de gamme italien et voisin de Moto Morini puisqu’il est également basé à Bologne. Précharge, compressio­n et détente hydrauliqu­e : tout se règle avec les doigts, aucun outil n’est nécessaire et ça, c’est vraiment extra. 3 L’écran TFT inédit propose différents affichages et regorge d’informatio­ns. On aurait aimé pouvoir le piloter depuis un commodo et profiter d’un affichage fiable de l’indicateur de rapport engagé qui, dénué de contacteur sur le barillet de sélection, se mélange parfois les pinceaux. 4 Le V-twin « Corsa Corta » (course courte) de 1 187 cm3 ouvert à 87° commence à dater et pourtant, quand les volets d’admission s’ouvrent, il ne fait pas l’âge de ses durites. Ça envoie fort, très fort passé 6 000 tr/min et dans une acoustique « démo-niaque » ! 5 Tubes de fourche traités DLC, étriers Brembo M50, ABS Bosch 9,1 MP, jantes en alliage forgé et pieds de fourche imitant le double « M » Moto Morini, c’est du grand luxe que la Corsaro ZZ nous présente. 4
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• Twin colossalpa­ssé 6 000 tr/min • Équipement­embarqué superbe • Sensations brutes • Cartograph­ie d’injectionà peaufiner • Quickshift­er en option • Confort sur mauvaisrev­êtement
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