Yamaha XSR 900 Abarth BMW R nine T Racer
BMW nineT Racer/ Yamaha XSR 900 Abarth Dans la famille café racer, voilà deux nouveaux venus, prétendument corsés et plutôt gourmands, financièrement parlant. Mais au-delà d’un look soigné et d’un moteur puissant, qu’offrent-ils en retour, exactement ?
Pour tous les goûts, et surtout à tous les prix. Les café racers ont beau se vendre au compte-gouttes (tout le monde ne rêve pas de rouler assis sur un strapontin, le nez au vent et les poignets cassés…), on en trouve aujourd’hui une variété assez considérable, chez une grande majorité de constructeurs. De l’entrée de gamme à la Mash (5 490 € pour le modèle 400 cm3), au luxe façon Avinton (environ 30 000 euros pour le 1 600 cm3 « de base »). Le coeur du segment (les Triumph Street Cup, Ducati Scrambler Café et autres Guzzi V7 Racer...) navigue, cela dit, autour des 10 000 euros, ce qui pour des machines proposant de 50 à 75 chevaux représente déjà un gros billet. Au-delà de cette somme et/ou de ce niveau de puissance, on entre dans le domaine du premium où ronronne la Triumph 1200 Thruxton et où les deux protagonistes de ce face-à-face ambitionnent de se faire une place. 115 et 110 ch. 12 600 et 14 000 euros. C’est ce qu’affichent respectivement la Yamaha XSR 900 Abarth et la BMW nineT Racer. Des rapports puissance/prix proches, pour des machines qui ne le sont pas tant que ça. Au-delà de leur style, ce qui à vrai dire réunit ces deux motos, c’est leur mode de gestation : toutes deux sont étroitement dérivées d’un modèle cousin. Pour la Béhème, la parente proche s’appelle, on l’aura facilement deviné, 1200 nineT : le roadster néo-rétro vedette chez les Bleu et Blanc depuis 2013. Pour la Yam’, l’arbre généalogique est un peu plus foisonnant : sur la même branche que ce café racer Abarth, on retrouve, la XSR 900, le roadster néo-rétro lancé par les trois diapasons fin 2015. Mais cette XSR 900 est elle-même étroitement dérivée du roadster moderne MT-09 (même moteur, même partie-cycle), lui-même jumeau mécanique du trail routier Tracer 900 (là encore, même moteur, même partie-cycle). Autrement dit, ce café racer Yamaha partage exactement la même base technique qu’un des trails routiers de la marque. Fort ? Assurément. Et probablement très avantageux sur le plan industriel. Sur le plan du design en revanche, ce sont plutôt les inconvénients de ce tour de passe-passe qui, de prime abord, se font remarquer. Haute. Très haute. Anormalement haute : c’est ce que l’on se dit lorsqu’on découvre cette 900 Abarth de profil. Yamaha a pourtant tout fait pour la rabaisser visuellement.
Politique de maîtrise des coûts
Longue ligne d’échappement en position basse, capot de selle étiré, guidon de type clubman plongeant profondément sous le té de fourche supérieur, bulle tronquée (à un point tel que l’afficheur numérique la surplombe), rétroviseur en bout de guidon... les artifices ont beau être nombreux et malins, ils butent
sur une réalité intangible : celle d’une géométrie de partie-cycle conçue initialement pour un trail. Le résultat n’est pas monstrueux mais s’il convainc d’une chose, c’est surtout des limites inhérentes à la mutualisation des bases techniques. En comparaison, la nineT Racer paraît toute petite et nettement plus cohérente dans ses volumes. Il faut dire que pour elle, la partie était beaucoup plus facile à jouer : la nineT standard, sa donneuse d’organes, est elle-même une moto compacte et dépouillée, assez proche d’un café racer. Pour parachever la transformation, le bureau de style BMW n’a eu qu’à jouer sur des détails cosmétiques : des bracelets (pas trop bas) à la place d’un cintre monté sur pontets, une bulle enveloppante, une selle monoplace surplombée d’un petit dosseret (déjà disponible en option sur la nineT standard) et un coloris BMW Motorsport, blanc barré du fameux liseré bleu, bleu rouge. Tout ceci est, comme d’ordinaire sur la gamme nineT, fort bien réalisé et soigneusement assemblé. Tellement bien réalisé et si soigneusement assemblé qu’on ne remarque d’ailleurs pas tout de suite qu’au niveau de l’équipement, ce racer joue dans une catégorie sensiblement inférieure à celle de la nineT standard. Et pourtant, regardez la fourche, jetez un oeil aux étriers de freins : sur la nineT standard, la première est inversée, réglable, et les seconds radiaux. Sur ce Racer, il faut se contenter de tubes télescopiques et d’étriers à montage axial. Étrange politique que celle qui consiste à refuser au modèle le plus sportif d’une gamme les périphériques les plus qualitatifs. À coup sûr, une politique de maîtrise de coûts... Chez Yamaha, la maîtrise des coûts est aussi un impératif. Mais sur la XSR 900 Abarth, elle se fait plus discrète. La moto ne fait pas chiche, mais riche : la fourche est inversée (ce qui n’est toutefois pas gage de qualité), le freinage est à montage radial, les traitements de surface sont, comme de coutume chez Yamaha, de très bonne facture et surtout, la moto se distingue par trois éléments tape-à-l’oeil : le revêtement suédé de la selle, le carbone (véritable) de la bulle et du dosseret et enfin, la ligne d’échappement Akrapovic. Trois éléments qui connotent la sportivité et renforcent le sentiment de qualité perçue, en faisant passer au second plan d’autres détails de la moto, beaucoup moins flatteurs (le maître-cylindre de frein avant d’entrée de gamme, les boîtiers de fusibles en plastique fixés bien en apparence sur le cadre, le câblage électrique parcourant ostensiblement la colonne de direction…). Néo-rétro ascendant trail grimé en missile sol-sol, la Yamaha est, en résumé, une petite maligne jouant de toutes les illusions. Une petite maligne dont le « petit » trois pattes de 847 cm3 propose d’ailleurs ses services quasiment au prix d’un gros flat allemand de 1 200 cm3. Sur la béquille, ces illusions ont de quoi plaire. Mais sur la route, perdurent-elles ?