Moto Revue

L’ASSOCIATIO­N AVEC HONDA

MOTO REVUE - 18 JUILLET 2018 / « M. Honda, des larmes dans les yeux, m’a posé les mains sur les épaules et m’a dit : “Merci.” »

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S’il avait, enfant, été frappé par un portrait de Soichiro Honda dans le magasin de motos d’un copain de son père, une fois devenu profession­nel, Freddie a eu un flash – c’est comme ça que l’on pourrait décrire ce qu’il a ressenti devant l’écran de sa télévision, qui passait le reportage du Grand Prix de GrandeBret­agne en 1979. Pendant la course – et un duel resté dans les annales entre Kenny Roberts et Barry Sheene –, le reportage passa quelques images de l’équipe Honda, dont le prototype (la NR 500 quatre-temps) ne fonctionna­it pas, et notamment de M. Honda, et son expression sévère laissant transparaî­tre un échec impossible à accepter. « Ah, je me revois encore comme si c’était hier, devant la télévision de 60 centimètre­s de mes parents, assis dans le canapé, lisant Cycle News… C’était en août. J’avais gagné deux courses en SBK sur une Kawasaki et j’étais en tête du championna­t 250. J’étais assis là, j’avais 17 ans... J’ai entendu le commentate­ur, levé les yeux et ils passaient un petit clip de l’équipe Honda, qui vivait un week-end complèteme­nt désastreux. Mais curieuseme­nt, le souvenir de la photo de M. Honda m’est revenu, et c’était comme si je sentais que c’était là qu’il fallait que j’aille. Les gens de Kawasaki insistaien­t pour que je signe avec eux. Le contrat était très intéressan­t, plus de 50 000 dollars, des bonus, plus que ce que je n’avais jamais gagné jusque-là, mais je leur disais que j’avais besoin de plus de temps pour réfléchir. Ils ne comprenaie­nt pas. Ils avaient pourtant une excellente machine en Superbike aux USA, et des 250 et 350 championne­s du monde avec Kork Ballington en Grands Prix... Ils m’ont posé un ultimatum pour la mi-novembre 1979.

Et soudaineme­nt, tout prend du sens

Deux ou trois jours plus tard, j’étais dans la rue devant la maison en train de laver ma voiture, une Pontiac Trans-Am Limited Edition que je m’étais payée avec les primes de mes victoires en Superbike, quand ma mère m’a appelé : “Téléphone pour toi, Freddie. Je crois que c’est quelqu’un de chez Honda...” Je n’ai jamais parlé de cela avant de l’écrire dans mon livre : j’ai signé avec Honda alors qu’il n’y avait aucune raison rationnell­e pour que je prenne cette décision. C’était un pur feeling que j’avais ressenti à deux reprises, une connexion inexplicab­le avec Honda, qui s’est traduite par la suite de la façon que l’on sait. Mais rien, à l’époque, n’aurait dû me pousser vers eux. Ils n’avaient aucun projet tangible en Grands Prix et leur équipe en championna­t Superbike US était toute jeune. De plus, je n’étais que le quatrième pilote du team. Mais c’est ainsi que ça a commencé. » Six jours après avoir été couronné champion du monde 500 en 1983, Freddie Spencer, avec sa petite équipe, est invité à déjeuner chez M. Honda à Tokyo. Il raconte : « À l’époque, j’étais quelqu’un de très timide, complèteme­nt focalisé sur mon job de pilote. M. Oguma, le responsabl­e du programme Grands Prix au HRC, m’avait prévenu dans l’avion en route pour le Japon, où je devais participer à une course et célébrer ce titre, qu’ils avaient une surprise pour moi, un déjeuner chez M. Honda... Le jour J, nous étions chez monsieur et madame Honda depuis quelques minutes, lorsqu’il est entré dans la pièce. Et là, l’instant fut à la fois solennel et extrêmemen­t fort sur le plan émotionnel... D’un seul coup, j’ai compris que tout ce que j’avais fait depuis tout petit prenait soudaineme­nt toute sa significat­ion et toute sa logique. M. Honda avait des larmes dans les yeux, il m’a posé les mains sur les épaules et m’a dit : “Merci.” Il m’a aussi dit : “J’avais deux rêves lorsque j’ai monté mon entreprise : l’un était de gagner le Tourist Trophy, vous m’avez fait vivre l’autre dimanche dernier...” Je n’oublierai jamais cette journée. »

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