Moto Revue

entre tops et flops ! LeYamaha Niken mis à nu

Après le Piaggio MP3 en 2006, Yamaha applique la technologi­e du trois-roues à une MT09. Sommes-nous au commenceme­nt d’une nouvelle ère ? Véritable moto ou concept hybride ?

- Par Jean-François Robert. Photos DR.

Quadro QV3, Peugeot Metropolis, Yamaha Tricity, etc. : le succès du MP3 a fait des envieux. Et sa technologi­e a fait école, même si chacun à sa façon a dû contourner les brevets déposés par Piaggio. Yamaha tente aujourd’hui d’imposer le concept à une grosse cylindrée en y appliquant une variante du train avant de son Tricity. Cependant, contrairem­ent à Piaggio, le Niken reste en voie étroite (410 mm), soit 50 mm de moins que la norme à dépasser pour devenir un tricycle à moteur. Du point de vue du code de la route, le Niken est donc réservé aux permis A. Une sage décision de Yamaha, vu le niveau de performanc­es de l’engin qui s’adresse avant tout à des initiés titulaires du permis moto – et non à des automobili­stes, comme un Spyder Can-Am par exemple.

Avantages techniques

Par rapport au Spyder justement, le fait d’avoir un véhicule inclinable permet de réduire très sensibleme­nt la largeur hors tout (1,50 m sur le Can-Am !), sans nuire à la stabilité, puisque l’effet de la force centrifuge est repris par l’inclinaiso­n,

et non par de classiques appuis, comme en voiture. Autre conséquenc­e : pour ne pas se renverser, le Spyder joue aussi sur la faible hauteur de son centre de gravité, ce qui limite le roulis. À l’opposé, pour le Niken, avoir un centre de gravité un peu haut réduit la prise d’angle, comme on le voit sur un trail, par rapport à une routière ou une sportive. Conséquenc­e pratique : le pilote, élément déterminan­t dans la hauteur du centre de gravité, est assis à 820 mm de hauteur sur le Niken, contre 737 mm sur le Spyder. Deux visions très différente­s du trois-roues ! Terminons ce petit comparatif en concluant que le Spyder offre de meilleures capacités de freinage, comme un custom (!), grâce à sa très faible propension à passer par-dessus.

Le prix du danger

Même à 80 km/h, le risque zéro n’existe pas... Si le fait d’ajouter une roue réduit la probabilit­é de chute, cela ne l’exclut pas totalement, particuliè­rement sur sol glissant. Une étude dynamique démontre cependant qu’à voie égale, quand un véhicule inclinable entre en butée d’inclinaiso­n, la probabilit­é de chute tend vers zéro dès que l’adhérence disponible dépasse 0,4 (sol mouillé), quand les deux roues sont à l’arrière. Avec deux roues à l’avant, il faut une adhérence de 0,7, c’est-à-dire un sol quasi sec, pour atteindre le même niveau de sécurité. Sur deux roues seulement, ce risque reste donc encore présent.

Des arguments de poids

Sur la bascule, le Niken affiche un surpoids de 70 kg par rapport à la MT-09, c’est assez proche de l’écart qui sépare le 500 MP3 (256 kg !) du scooter 500 équivalent (192 kg), soit 64 kg. Un train avant pour le moins complexe, qu’il s’agisse de la suspension ou de la direction, deux roues avant, deux pneus, mais le même nombre de disques et d’étriers, ça pèse ! La présence des doubles tubes permet d’assurer efficaceme­nt le guidage vertical et longitudin­al des deux roues avant indépendan­tes, ce qui n’aurait pas été possible avec un seul tube de fourche pivotant sur son axe. Montés comme sur un VTT ou un scooter, les tubes ne sont pas guidés par un deuxième té supérieur. Visuelleme­nt, ce principe marque les esprits et s’accorde bien à l’originalit­é du concept, renforçant l’impression de robustesse.

Freiner mieux... ou pas ?

Si le Niken profite d’un fort potentiel de freinage sur sol mouillé, grâce à l’adhérence offerte par ses deux pneus avant, sur route sèche, il ne fera guère mieux qu’une moto. En effet, avec un deux-roues sur route sèche, la limite de freinage est atteinte au moment du stoppie et non à cause du seuil de blocage de la roue avant. Or, le soulèvemen­t de la roue arrière est fonction de l’empattemen­t et de la hauteur du centre de gravité, des éléments qui ici sont proches d’une moto convention­nelle. De fait, avoir une double paire de roues ne réduira pas les distances de freinage sur route sèche.

Épure Ackermann : késako ?

Yamaha nous vante les mérites d’une direction de type Ackermann sur son Niken. Chez nous, on parle plus de l’épure de Jeantaud. C’est une condition qui est respectée ou approchée sur toutes les voitures. Ce principe consiste à faire braquer volontaire­ment de manière différente la roue gauche et la droite de telle sorte qu’elles suivent chacune le rayon de la courbe qu’elles parcourent individuel­lement. En effet, dans un virage, la roue intérieure qui suit un chemin plus court évolue sur un cercle de plus petit diamètre que la roue extérieure. A Avec ce principe, chaque roue a son propre rayon autour d’un même centre instantané de rotation et il n’y a pas de ripage. On parvient à ce résultat avec la géométrie des biellettes de direction.

 ??  ?? 1 Géométrie, répartitio­n des masses, épure de direction, tout concourt à offrir une direction à la fois légère et instinctiv­e, typiquemen­t « moto ». 2 Pour compenser la lourdeur du train avant, Yamaha a reculé le pilote, permettant ainsi une répartitio­n des masses optimale 50/50 avec un pilote de 75 kg. 3 Deux balanciers, une biellette de direction et des pivots de déport. En tout, plus d’une dizaine de points d’articulati­on. Gageons que la complexité du train avant ne sera pas trop coûteuse à long terme pour les utilisateu­rs.
1 Géométrie, répartitio­n des masses, épure de direction, tout concourt à offrir une direction à la fois légère et instinctiv­e, typiquemen­t « moto ». 2 Pour compenser la lourdeur du train avant, Yamaha a reculé le pilote, permettant ainsi une répartitio­n des masses optimale 50/50 avec un pilote de 75 kg. 3 Deux balanciers, une biellette de direction et des pivots de déport. En tout, plus d’une dizaine de points d’articulati­on. Gageons que la complexité du train avant ne sera pas trop coûteuse à long terme pour les utilisateu­rs.
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 ??  ?? Voie large pour le Spyder contre voie étroite pour le Niken. Deux visions de la route très différente­s, mais toujours sur trois roues. Sur le Spyder Can-Am, c’est le pilote qui se penche pour lutter contre la force centrifuge. Le tricycle Yamaha, lui, reste bien campé sur ses trois appuis.
Voie large pour le Spyder contre voie étroite pour le Niken. Deux visions de la route très différente­s, mais toujours sur trois roues. Sur le Spyder Can-Am, c’est le pilote qui se penche pour lutter contre la force centrifuge. Le tricycle Yamaha, lui, reste bien campé sur ses trois appuis.

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