« Yamaha et le deux-temps : une histoire qui appartient plus au passé qu’au futur ! »
Éric de Seynes Directeur exécutif de Yamaha Motor Co et PDG de Yamaha Motor Europe
Le fait que KTM et Husqvarna continuent le développement d’une gamme d’enduros 2-temps injection est-il une source d’inspiration pour Yamaha ?
Yamaha a une longue histoire dans le tout-terrain et le deux-temps mais aujourd’hui, le marché de l’enduro extrême est en baisse. Le gros de nos ventes se fait plus sur les marchés des États-Unis et de l’Australie, où l’on pratique un enduro du type baja, qui demande des machines puissantes et rapides, plus proches des 450 4-temps que des 250/300 2-temps. Basculer sur du deux-temps à injection est toujours possible, mais il sera difficile d’être compétitif face aux 4-temps modernes. De plus, le coût de l’investissement nécessaire à la mise en conformité d’une telle technologie avec les prochaines normes Euro 5 rend l’investissement quasiment impossible.
Avez-vous d’autres secteurs de développement avec des moteurs deux-temps (trail, scrambler, GT) ?
Nous n’avons aucun projet de deux-temps dans les cartons, et ceci pour deux raisons : d’une part, quand nous développons un nouveau moteur, nous nous fixons toujours comme objectif d’être très nettement en dessous des niveaux de rejets autorisés, pour avoir un coup d’avance et anticiper le passage à la norme suivante, sans modification importante du moteur. Avec un deux-temps, ce n’est pas envisageable aujourd’hui. D’autre part, pour faire face aux énormes investissements de R&D, nous travaillons aujourd’hui sur des « plateformes moteur » qui peuvent avoir plusieurs applications sur différents modèles de grande diffusion. Là encore, il n’existe pas une telle demande, au niveau mondial, pour un deux-temps à injection de moyenne ou grosse cylindrée.
Comment voyez-vous l’avenir du deux-temps ?
Nous avons cessé tout développement lié à notre « plan produits » dans ce domaine. C’est désormais un marché de niche réservé à des constructeurs très pointus, qui ont peut-être des cycles d’amortissement plus courts que nous. La tendance du futur repose plus sur l’électrique ou l’hydrogène que sur le 2-temps. En dehors de l’évolution et de la mise à jour de nos gammes quatre-temps, des ressources nouvelles y sont consacrées. Travailler sur le deux-temps est une démarche conservatrice qui a peu de chance d’ouvrir de nouveaux marchés, contrairement aux énergies « propres ». Avec le durcissement des normes de bruit et d’émission, l’avenir du tout-terrain devrait passer plus par l’électrique que par le deux-temps. Je suis pourtant un « amoureux » des motos 2-temps et reste convaincu des vertus et des qualités d’une YZ pour le motocross, mais je crains que cela appartienne à un « passé futur ».