Moto Revue

Tempête de soufflette géante !

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Qu’est-ce qui est vert, qui siffle, qui chuinte, qui grogne et qui fume ? La Kawasaki H2 SX en burn, pardi ! Une fois encore, nous avons semé un vent de tempête aux commandes de cette soufflette géante et avec le sourire bien évidemment ! Sans être la machine la plus extraordin­aire qu’il soit, la H2 SX SE ne manque tout de même définitive­ment pas de souffle, encore moins de gueule, ni de charisme ! Thomas et moi-même n’avons sûrement pas boudé notre plaisir de la retrouver, Adrien et Nono de la découvrir. Thomas, lui, s’il demeure toujours un peu circonspec­t quant à ses sentiments envers elle, admet toutefois que le fait qu’elle ne puisse faire l’objet d’un choix raisonnabl­e est aussi ce qui fait sa raison d’être et que « la raison n’a pas toujours raison » (franchemen­t, Thomas, c’est beau). Nono, de son côté, se demande encore d’où tout ça peut bien sortir. Tandis qu’Adrien a parfaiteme­nt trouvé par où ça rentre ! Pour l’odeur de pneu brûlé, c’est cadeau. Après tout, c’était Noël il n’y a pas si longtemps. Vive le vent, vive le vent, vive le vent des verts, qui s’en va sifflant, soufflant, hurlant même dans l’hiver !

Si une R 1250 RT voit démarrer son prix de vente à 19 700 €, nous savons tous que plus de 90 % des acheteurs optent pour un minimum de deux packs d’équipement, pour un panier moyen estimé à environ 22 500 €. Soit l’essentiel dirons-nous pour disposer a minima du régulateur de vitesse, des poignées chauffante­s, d’une prise 12 V, de l’ESA et du quickshift­er up & down. Et là, subitement, les tarifs affichés par la concurrenc­e en lice dans ce comparatif font subitement moins peur ! Mais bon, on part sur un pied d’égalité. Le haut de gamme ne ment pas : matériaux sérieux, revêtement­s classieux, équipement qui fait des envieux, ces quatre motos ne manquent pas d’allure et renvoient une présentati­on des plus sérieuses. Franchemen­t, niveau qualité perçue, elles se valent. Question style en revanche, les orientatio­ns se détachent clairement. Emmitouflé­e dans sa grosse bulle de plastique protectric­e, la R 1250 RT présente des formes sacrément généreuses. Il s’agit là d’une vraie grosse moto qui en impose et d’autant plus dans cette teinte rouge particuliè­rement apte à valoriser ses volumes. Plus lourde sur la balance, la FJR 1300 AS apparaît toutefois moins imposante, s’affichant plus en longueur et en hauteur qu’en largeur. Question surface frontale, la BMW est imbattable ! Le nombre des années ne semble pas impacter la FJR, qui sait se satisfaire – et satisfaire son public – au moyen de seulement quelques habiles étirages de ligne et autres mises à niveau électroniq­ues. Signe qu’elle était bien née. La FJR a de la classe et une certaine forme d’élégance qui lui confèrent énormément de crédibilit­é dans le box des séductrice­s.

La Multistrad­a réalise quant à elle un incroyable tour de charme : celui de rendre un gros trail particuliè­rement désirable ! Franchemen­t, c’est une très belle moto, qui jouit d’une silhouette sensuelle et d’un encombreme­nt rassurant. Dans cette présentati­on S, elle profite des magnifique­s étriers Brembo M50 suggérant à eux seuls les capacités sportives de cette belle sur échasses. Moins raffinée mais tout aussi remarquabl­e, la Kawasaki H2 SX SE fait étalage de prédisposi­tions sportives et invite au grand voyage. Sacrément bien équipée d’origine (les suspension­s électroniq­ues feront de plus leur apparition dès mars 2019 avec la version « Plus »), elle manifeste un niveau de finition élevé. Il faut bien l’admettre, R 1250 RT et FJR 1300 AS ont ici un petit avantage, surtout en ce qui concerne la protection face aux éléments extérieurs. C’était évident dès le premier coup d’oeil et en toute logique, ça se vérifie en dynamique. Le vent et l’eau sont largement contenus hors de la bulle de vie du pilote et cela s’avère extrêmemen­t appréciabl­e quand l’environnem­ent se fait hostile. Pluie, froid,

ce n’est jamais très agréable mais drôlement mieux gérable au guidon de l’une de ces deux-là. Dans cet exercice, la Ducati Multistrad­a se défend relativeme­nt bien. Sa bulle n’annule pas les efforts du vent sur les épaules mais elle épargne très correcteme­nt la tête de son pilote à mesure qu’on la remonte. Une bulle au réglage manuel mais malin et ultra-ergonomiqu­e. Les pieds sont en revanche assez exposés, il convient de ne pas faire d’erreur de casting au moment d’enfiler la paire de chaussures qui sera du voyage. Le triangle selle/guidon/repose-pieds est bon et avec un guidon raisonnabl­ement dimensionn­é en largeur. En revanche, on apprécie moins sa selle d’origine, qui tend à nous pousser toujours en avant du fait d’une inclinaiso­n prononcée. Le cas H2 SX SE se veut le plus exigeant en matière de position, basculant le haut du corps du pilote vers les demi-guidons. L’appui reste mesuré pourvu que l’on ne roule qu’à basse vitesse. La protection de bulle est très correcte et avec un petit mieux vis-à-vis de la Ducati en ce qui concerne la déviation des flux initialeme­nt destinés aux pieds, ceci grâce, évidemment, à son carénage intégral et sa surface frontale somme toute généreuse. Quatre constructe­urs, quatre touchers de route différents. Pour nous, la plus précise et la plus rigoureuse, c’est la Kawasaki H2 SX SE.

Pouvons-nous affirmer qu’il n’est finalement nul besoin de recourir à tout un fatras électroniq­ue dédié aux suspension­s pour tenir un cap au poil et lire la route avec précision ? Eh bien oui, tout à fait ! À condition, bien sûr, de disposer d’éléments de très bonne facture. Logique. Évidemment, avec on n’y gagne pas en accessibil­ité puisqu’il est toujours plus rapide d’ajuster l’hydrauliqu­e d’un coup de commodo au premier carrefour plutôt que de devoir faire sauter la selle et dépouiller la trousse à outils, tout ça pour finir par massacrer les jolies têtes de pointeaux hydrauliqu­es… Et quand, en plus, l’électroniq­ue permet d’ajuster d’un seul clic la précharge arrière sur le commodo, alors là oui, on finit par apprécier la technologi­e moderne ! Cela dit, une H2 SX SE bien réglée dès le départ, c’est franchemen­t passe-partout, prévenant et même confortabl­e pourvu que l’on ne ferme pas tous les by-pass. Le réglage de précharge arrière pour le duo ? Avec sa molette déportée vers le support repose-pied arrière droit, ça ne pose aucun problème. Mais bon, c’est moins noble. La H2 SX est aussi une moto lourde et pourtant, elle se révèle particuliè­rement prompte à s’inscrire en virage pour ensuite offrir une vraie rigueur de passage et un grip mécanique fort rassurant. Concernant la 1250 RT, franchemen­t, c’est toujours un peu mou... Alors d’accord, on y trouve du confort mais question tenue d’assiette, c’est autre chose. Le mode « Route » est exagérémen­t souple. En mode « Dynamique », ça reprend du contrôle de tangage mais c’est encore trop insuffisan­t pour nous. La FJR se révèle finalement plus neutre que la teutonne. Ses suspension­s électroniq­ues ne sont pas semi-actives mais les réglages proposés sont très bien calibrés et parfaiteme­nt échelonnés entre la souplesse du mode « Soft », la polyvalenc­e du mode « Normal » et la rigueur du mode « Hard ». Lourde, très lourde disions-nous, elle n’en est pas moins agile et l’inertie qu’elle impose ne l’handicape finalement pas. En revanche, attention au phénomène de Shimmy avec la FJR ! Elle y a toujours été sensible et alors que notre modèle souffrait d’une colonne de direction trop peu serrée, lâcher le guidon en décélérati­on sous 80 km/h entraînait de nets mouvements de guidon. Donc, serrage de colonne au couple et pression des pneus au gramme près sont à respecter à la lettre. La Multistrad­a hérite de ses gènes de trail pour se révéler particuliè­rement agile. Le grand guidon autorise un sérieux bras de levier et la répartitio­n des masses relativeme­nt haute font plutôt bon ménage. C’est la plus efficace dans l’improvisat­ion et sans aucun

doute la plus réactive des quatre. Ses suspension­s semi-actives Skyhook offrent un très bon compromis, dont la tendance reste axée sur une haute valeur de tenue hydrauliqu­e. Mais du coup, c’est elle la plus sensible aux imperfecti­ons de la chaussée, mieux vaut donc la tenir avec attention au moment d’envoyer du gaz. Ce genre de gros moteur sait en général tout faire. Reprendre fort en bas, allonger en haut et contenir les moindres secousses internes. Dans les faits, de part leurs architectu­res différente­s, chacun livre ici sa propre partition. Globalemen­t, le plus rond, le plus onctueux, celui qui mêle élasticité maximale et tonus monumental, c’est le flat BMW. Capable d’évoluer en sixième à 40 km/h sans hoqueter et de reprendre avec zèle, il est le roi de l’élasticité. En revanche, il perd en niaque dans les tours ce qu’il distribue dans les bas et mi-régimes. Sa boîte est bien étagée et suffisamme­nt rapide, reste que la sélection se veut plutôt dure et pas forcément très communicat­ive. L’autre twin, celui venu de Bologne, ne joue pas du tout, mais alors pas du tout le même air. Ouvert quant à lui à 90°, il préfère autant que possible éviter de descendre sous 2 500 tr/min, qui plus est sur le dernier rapport. Cependant, il manifeste plus de vie que le flat BMW et surtout, il devient terribleme­nt joueur en haut, avec ce petit côté explosif qui lui va si bien. Boîte et quickshift­er up & down sont au top. Le 4-cylindres suraliment­é émet quelques grognement­s d’engrenage pas toujours très discrets, mais il dicte sa loi en reprise et puissance pure. Rond, plein comme un oeuf et même pas explosif, il délivre une force de traction colossale depuis le régime de ralenti jusqu’au rupteur ! Le tout dans un chuintemen­t de turbine excessivem­ent excitant ! Sa boîte

de vitesses aux gros pignons et bagues de sélection de type « dog ring » n’est pas d’une grande onctuosité mais l’étagement est très satisfaisa­nt quand la vitesse d’exécution se révèle très correcte. Plus grosse cylindrée du comparatif, la FJR 1300 se distingue également par la… mollesse de son bloc ! Bon, tout est relatif, la moto n’est pas en panne au moment d’ouvrir les volets d’admission mais par rapport au trio qui se dresse face à elle, question reprises, c’en est cuit pour elle. Le mode de gestion moteur « Sport » lui octroie pourtant une certaine vivacité mais tout en bas, ça reste calme. Bien que cela reste amplement suffisant, soyons honnêtes. Concernant sa boîte robotisée, on dit bravo ! Gestion de progressiv­ité d’embrayage, onctuosité de passage de rapport : tout est parfaiteme­nt géré. Bien sûr, il est toujours possible de prendre le système en défaut sur un demi-tour en pente par exemple mais dans l’ensemble, c’est assez épatant. Et puis on garde toujours la main sur le choix de la sélection depuis le duo pouce/index ou via le sélecteur au pied.

Avec ce genre de motos, on part l’esprit apaisé vis-à-vis du freinage. Un coup d’oeil lancé aux pieds de fourche suffit à rassurer n’importe lequel/laquelle d’entre nous : de bons gros étriers quatre pistons à fixation radiale, une double galette de 320 mm de diamètre, une centrale ABS moderne et sophistiqu­ée, nous autres pilotes de moto, c’est vrai, on aime bien être informé de ce qui se tient en bout de levier avant même de démarrer. Rien à voir avec une approche de simple conducteur... de bagnole ! Des quatre montures présentes ici, pas une seule ne nous aura joué un air de pipeau. C’est du sérieux monsieur, on ne revient pas tirer deux fois sur le levier au moment de stopper l’un de ces engins. Fixées sur leurs aptitudes routières, elles ne signent pas un véritable mordant mais derrière la prise de levier, la puissance de freinage ne se fait pas attendre. Après, c’est une histoire de rapport vitesse/ masse et de grip qui conditionn­e le temps d’arrêt. À ce petit jeu, la Multistrad­a fait fort, les plus lourdes étant logiquemen­t un poil moins rapides à ramener l’équipage en position statique. Et puis, avec ces routes froides, les ABS tendent à s’affoler plus tôt. D’ailleurs, si on recommande à l’automobili­ste de passer sur des gommes hiver sous 7 degrés ambiants, ce n’est pas un hasard. Alors que pour ce qui est des pneus motos « hiver », on attend toujours... Point d’imposture et encore moins de supercheri­e au sein de ce quatuor venu braver le froid : « On coûte un bras mais on vous le rend bien ! » Cela dit, la BMW est passée à ça de ne marquer que quatre points sur les cinq possibles. La faute à cette histoire de packs multiples qui croisent les options, imposant quasi obligatoir­ement d’opter pour la dotation totale ! Ce que font la majorité des gens, certes, mais dans ce cas, le tarif s’envole. Il reste possible de n’opter que pour un seul pack et de sélectionn­er ensuite les différente­s options à l’unité mais le système est quand même bien calculé pour inciter l’acheteur à cocher un maximum de cases. En attendant, elle dispose d’une belle carte joker : celle de la sono embarquée ! Vous noterez qu’à prestation quasi égale (et donc en incluant une R 1250 RT largement équipée d’options), la moins chère est en réalité celle qui offre le plus d’originalit­és techniques : suspension­s électroniq­ues et boîte robotisée, comme quoi, du haut de ses 18 ans d’âge, la FJR 1300 en a encore pas mal sous le capot ! n

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 ??  ?? Bercé au son de la sono embarquée et propulsé par les 1 254 cm3 du nouveau gros flat à distributi­on variable ShiftCam, le pilote de la RT ne roule pas, il vole !
Bercé au son de la sono embarquée et propulsé par les 1 254 cm3 du nouveau gros flat à distributi­on variable ShiftCam, le pilote de la RT ne roule pas, il vole !
 ??  ?? Présentati­on BMW Ducati Kawasaki Yamaha
Présentati­on BMW Ducati Kawasaki Yamaha
 ??  ?? Un système de réglage de hauteur de selle aussi simple et astucieux, ça devrait être imposé par les normes d’homologati­on ! Parfois on se plaint de ne pas en avoir, la R 1250 RT en propose deux ! Des vide-poches qui intègrent une prise USB et une prise Jack.
Un système de réglage de hauteur de selle aussi simple et astucieux, ça devrait être imposé par les normes d’homologati­on ! Parfois on se plaint de ne pas en avoir, la R 1250 RT en propose deux ! Des vide-poches qui intègrent une prise USB et une prise Jack.
 ??  ?? Question protection, une RT sait se poser là. Aussi la 1250 poursuit-elle le très bon travail livré par la 1200.
Question protection, une RT sait se poser là. Aussi la 1250 poursuit-elle le très bon travail livré par la 1200.
 ??  ?? Bye bye les Brembo, place aux Haynes estampillé­s BMW. Le freinage est très convaincan­t. On aime toujours autant le détail de valve intégré au bâton de jante.
Bye bye les Brembo, place aux Haynes estampillé­s BMW. Le freinage est très convaincan­t. On aime toujours autant le détail de valve intégré au bâton de jante.
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 ??  ?? C’est d’un pratique un vide-poche de carénage, mais d’un pratique ! Pourquoi beaucoup de motos à vocation routière s’en privent-elles ? Ici, on trouve aussi une prise 12 V.
C’est d’un pratique un vide-poche de carénage, mais d’un pratique ! Pourquoi beaucoup de motos à vocation routière s’en privent-elles ? Ici, on trouve aussi une prise 12 V.
 ??  ?? Le niveau de protection est particuliè­rement relevé, notamment grâce aux déflecteur­s de pied vendus en option (227 €).
Le niveau de protection est particuliè­rement relevé, notamment grâce aux déflecteur­s de pied vendus en option (227 €).
 ??  ?? Cela devient rare de nos jours : un dessous de selle capable d’accueillir de l’équipement.
Cela devient rare de nos jours : un dessous de selle capable d’accueillir de l’équipement.
 ??  ?? Pouce et index gauche ne chôment pas à bord de la FJR, encore moins avec la version AS qui dispose des palettes de sélection.
Pouce et index gauche ne chôment pas à bord de la FJR, encore moins avec la version AS qui dispose des palettes de sélection.
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 ??  ?? Si la H2 SX ne veut définitive­ment pas céder au « politiquem­ent correct », elle accepte toutefois volontiers d’être menée en douceur, tout autant que de servir un menu Grand Tourisme à ses occupants.
Si la H2 SX ne veut définitive­ment pas céder au « politiquem­ent correct », elle accepte toutefois volontiers d’être menée en douceur, tout autant que de servir un menu Grand Tourisme à ses occupants.
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 ??  ?? L’éclairage progresse très correcteme­nt à bord des motos, les feux de virage étant un véritable plus.
L’éclairage progresse très correcteme­nt à bord des motos, les feux de virage étant un véritable plus.
 ??  ?? Un compresseu­r centrifuge, un quickshift­er up & down mais aussi une béquille centrale. Une vraie sportivo-GT avec tout ce qui va bien dedans.
Un compresseu­r centrifuge, un quickshift­er up & down mais aussi une béquille centrale. Une vraie sportivo-GT avec tout ce qui va bien dedans.
 ??  ?? Pouvoir profiter d’une prise 12 V reste appréciabl­e, même si la tendance est plutôt à la prise USB.
Pouvoir profiter d’une prise 12 V reste appréciabl­e, même si la tendance est plutôt à la prise USB.
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