Moto Revue

Un contexte des plus favorables

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À la fin des années 60, Honda peut déjà s’appuyer sur une histoire sportive exceptionn­elle. De 1961 à 1967, 16 titres de champions du monde pilotes et 18 titres constructe­urs (pour 138 victoires) ont récompensé une politique d’investisse­ment et de développem­ent technique sans égal. Représenté par Tom Phillis, Mike Hailwood, Ralph Bryans, Luigi Taveri et Jim Redman, Honda règne sur les Grands Prix... sans toutefois parvenir à s’imposer en 500, la catégorie reine, où Hailwood a été tenu en échec par Giacomo Agostini et sa MV Agusta (notons tout de même qu’en 1966, Honda a raflé tous les titres constructe­urs). Durant l’hiver 1967-1968, la direction décide d’interrompr­e son programme en compétitio­n. Les règlements techniques restrictif­s, imposés par la Fédération internatio­nale dans le but de réduire les coûts, sont l’une des raisons principale­s de ce retrait, l’autre étant le souhait des dirigeants de s’investir complèteme­nt en Formule 1, et donc indirectem­ent dans le secteur de l’automobile. Mais les enseigneme­nts récoltés après ces années passées en Grands Prix moto ne sont pas perdus, bien au contraire. Et à l’approche de la fin des sixties, Honda, qui a déjà commercial­isé en 1965 la CB 450, se prépare à frapper un grand coup. Le contexte est on ne peut plus favorable, et en novembre 1968, au Salon de Tokyo, la Honda CB 750 Four est présentée au public et à la presse internatio­nale.

L’influence de l’Amérique et de son marché

Quatre mois plus tard, la présentati­on officielle est organisée à Paris, dans le cadre prestigieu­x du restaurant Le Pré Catelan, en plein bois de Boulogne. Des vedettes françaises sont invitées à célébrer cet événement : Jean-Pierre Beltoise (pilote), Guy Marchand (musicien, chanteur et acteur) et Frank Alamo (chanteur), notamment, posent sur la CB et pour la postérité. Mais la vraie vedette de cette présentati­on, c’est cette 750 Four, dont le moteur quatre-cylindres en ligne monopolise les regards et les objectifs des photograph­es, dont les quatre pots chromés « à la Mike Hailwood », le frein avant à disque hydrauliqu­e et l’esthétique générale flamboyant­e hypnotisen­t une assemblée conquise. Peu après, sous la plume de Jean-Claude Bargetzi, Moto Revue précise le contexte qui précède l’essai à venir de cette machine promise à devenir une star. « 1969 restera une date importante dans l’histoire de la moto, car l’évolution technique à laquelle nous assistons depuis quelques années a gravi un échelon et touche désormais un domaine quelque peu délaissé jusqu’à présent : les grosses cylindrées. Certes, tout laissait prévoir une escalade dans la course à la cylindrée et à la puissance, nous n’en voulons pour preuve que la floraison de modèles “européens” qui ont vu le jour récemment : Guzzi V7, Laverda, MV 600, 500 Gilera, Norton Commando, Triumph Trident, etc., mais excepté la dernière citée, ces machines restent convention­nelles dans leurs grandes lignes. » Triumph et sa trois-cylindres mis à part, les constructe­urs européens restent à l’époque plutôt exclusifs, le tarif de la MV Agusta 600, par exemple, la met hors de portée des bourses de la plupart des acheteurs potentiels, sans parler de son esthétique... discutable. C’est alors

que simultaném­ent, la Honda CB 750 Four et la Kawasaki 500 Mach III sont présentées, en début d’année 1969 donc. Jean-Claude Bargetzi souligne, dans la suite de son article, un fait déterminan­t dans ce qui va bientôt advenir : l’influence de l’Amérique du Nord et de son énorme marché. « Indépendam­ment de l’attrait de la nouveauté, de leur conception, de leur esthétique et de leurs performanc­es, ces machines doivent être considérée­s comme les premières manifestat­ions d’une nouvelle génération de motocyclet­tes. Depuis longtemps déjà, certains constructe­urs britanniqu­es et italiens avaient dans leur gamme des versions “America”, “Bonneville” ou “Daytona” équipées selon les canons de la mode américaine. Les Japonais au contraire ont d’abord réalisé des machines dont l’esthétique était plutôt d’inspiratio­n germanique, mais dans une seconde phase, il y a eu une mode spécifique­ment japonaise, qui a cédé le pas à l’influence britanniqu­e et finalement à la mode américaine : le client est roi et les Japonais n’ont pas mis longtemps à le comprendre. » L’essai de la CB 750 Four, paru en juillet dans le Moto Revue « Spécial Été » , va donc faire date.

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