Moto Revue

ABUS SEXUELS : LA FFM, ELLE AUSSI VISÉE

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La vague de scandales sexuels qui déferle sur le monde du sport n’épargne pas celui de la moto. La FFM est, à son tour, l’objet d’une plainte. Celle d’une victime, dont l’agresseur aurait bénéficié durant plusieurs années du soutien d’une fédération très fermement attachée au respect de la présomptio­n d’innocence...

L’édifice de la FFM va-t-il vaciller autant que celui de la Fédération française des sports de glace, dont le président a été poussé à la démission sous la pression du ministère des Sports ? Au moment où nous écrivons ces lignes (mi-février), il n’est pas possible de l’affirmer. Mais même si le scandale de non-dénonciati­on d’abus sexuels sur mineurs qui entache le patinage français est de nature plus grave, le risque semble réel, tant les deux affaires puisent à de conjointes sources. À l’origine du dossier qui vaut à la FFM un « recours en indemnisat­ion de préjudice » (autrement dit une demande de dommages et intérêts) déposé contre elle, le 17 janvier dernier, il y a en effet plusieurs agressions sexuelles sur mineures perpétrées entre

2009 et 2011. Plusieurs agressions dont deux adolescent­es ont été victimes au sein du centre de formation au pilotage « Mérel

Off Road » (Loire-Atlantique), et dont l’auteur, Michel Mérel (2e du Paris-Dakar en 1980 - photo), a été reconnu coupable puis condamné. Une première fois, en 2015, à 4 ans avec sursis ; une seconde, fin 2018, sur appel du Parquet, à 8 ans de prison ferme (la qualificat­ion de viol avait alors été retenue). Si ce volet pénal est clos depuis plus d’un an, pourquoi la FFM est-elle visée par une demande de dommages et intérêts ? Parce que la structure privée dirigée par Mérel était affiliée à la Fédération (elle bénéficiai­t d’un label d’excellence sportive) et que cette dernière n’a coupé les ponts qu’en 2018, alors qu’elle savait Mérel suspect d’agressions sexuelles depuis 2011. Il était essentiel à nos yeux de respecter la présomptio­n d’innocence : tel est, en substance, l’argument avancé par Jacques Bolle, le président de la FFM, qui a reconnu, lors de son audition au cours de l’enquête pénale, avoir demandé à ses cadres de ne pas commenter l’affaire. Un argument défendable sur le plan du droit mais plus friable sur celui de la morale si l’on considère que le respect de cette présomptio­n d’innocence s’est prolongé jusqu’en 2018, soit environ trois ans après la condamnati­on de Mérel en première instance... et l’appel interjeté par le Parquet pour le faire condamner à une peine plus lourde encore ! Autant dire que depuis 2015, l’hypothèse d’un Mérel innocent ne tenait franchemen­t plus la route. Pour autant, on ne peut accuser la FFM de non-dénonciati­on de crime puisque la Fédération n’a pas eu connaissan­ce des agressions sexuelles avant la justice. Justice qui, à l’issue du premier procès, n’a d’ailleurs pas jugé utile d’interdire à Michel Mérel de poursuivre son activité d’entraîneur : il lui était uniquement proscrit de recevoir des jeunes filles mineures. Reste cet attentisme assumé, dont l’une des deux victimes considère qu’il a pesé lourdement sur son état psychologi­que au cours des années qui ont suivi ses agressions. C’est cela qui motive sa plainte au civil. Plainte pour laquelle la FFM estime ne rien avoir à se reprocher. L’instructio­n de ce type de dossier dure en général une année. Dans l’intervalle, Jacques Bolle a demandé à la ministre des Sports de prendre publiqueme­nt position sur une question relevant tout autant du droit que de la philosophi­e : faut-il faire passer le principe de précaution avant la présomptio­n d’innocence ?

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