Moto Revue

« Il y a encore beaucoup à faire pour la sécurité »

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Nous avions suivi le lancement de l’airbag Ixon en utilisant les versions de pré-série, jusqu’à chuter avec, mais nous ignorions que le succès serait aussi important. Pour en savoir plus sur la genèse de cette aventure, nous avons cuisiné Arnaud Gille (photo), directeur marketing depuis janvier 2019, et Grégory Thiery, directeur commercial.

Quelle est la position commercial­e d’Ixon sur le marché français ? Sur les autres marchés ?

Arnaud Gille : Nous sommes leaders sur le marché français et numéro 3 mondial avec une présence dans près de 70 pays. Nous enregistro­ns de fortes progressio­ns sur les marchés asiatiques grâce au développem­ent de notre gamme « Asie », qui propose des taillants et des matériaux spécifique­s. Nous avons notre propre filiale en Italie, que nous gérons comme la France.

Quel est le lien entre Ixon et In&motion ?

AG : Le lien entre Ixon et In&motion est avant tout technologi­que et associe deux savoir-faire : Ixon a développé le gilet et In&motion a apporté la technologi­e embarquée.

Grégory Thiery : Nous sommes le premier partenaire d’In&motion, avec qui nous avons conçu et lancé l’IX-Airbag U03. Ce système équipe nos pilotes en MotoGP et nous avons lancé ensemble le premier airbag portable sous n’importe quel blouson.

Mais est-ce qu’Ixon possède des parts d’In&motion ? Peut-elle influer sur les décisions de la marque ?

AG : Non, Ixon n’a aucune part dans la société In&motion mais les décisions stratégiqu­es, commercial­es et opérationn­elles autour du gilet airbag Ixon se font de façon concertée entre eux et nous.

GT : En fait, le mode de collaborat­ion avec ce type d’entreprise est le même qu’avec Clim8, si vous avez suivi le lancement des gants chauffants

(IT Series, ndlr) de l’hiver dernier. Clim8, c’est aussi une rencontre, ce sont des contacts que l’on noue dans le cadre du CES de Las Vegas, et l’idée est de collaborer avec une start up qui propose un produit innovant et que l’on peut adapter à la moto. Et Clim8, si on peut faire une petite parenthèse, utilise exactement le même procédé qu’In&motion. C’est-à-dire qu’ils détiennent leur propre technologi­e, qu’ils la développen­t, qu’ils signent des partenaria­ts avec un certain nombre d’acteurs et ensuite, nous, on crée le produit qui correspond et qui adapte ou adopte la technologi­e Clim8, ou In&motion dans le cas de l’airbag. Donc, non, on n’a absolument pas de parts dans l’entreprise, c’est juste une collaborat­ion avec un partenaire avec qui on a une exclusivit­é totale et évidemment ensuite, selon le deal et les entreprise­s partenaire­s, des choses se développen­t plus ou moins rapidement avec d’autres marques. Clim8 a signé avec

North Face, Odlo, Burton, mais dans d’autres univers. Sur la moto, on est en totale exclusivit­é, ce qui n’est pas le cas pour In&motion.

AG : Notre axe de développem­ent produit est toujours le même : collaborer avec les meilleurs pour être capables de proposer le meilleur produit au grand public. C’est ce que l’on a fait avec In&motion et plus récemment avec Clim8 concernant nos gants chauffants connectés.

GT : C’est technologi­que, c’est une histoire de spécialist­es. Aujourd’hui, In&motion, c’est 30 personnes

(dédiées à l’airbag, ndlr), aucune boîte aujourd’hui dans la moto,

aussi prestigieu­se soit-elle, n’est capable d’investir autant, ni de mettre autant d’énergie dans le développem­ent d’un seul produit.

Si on prend les deux grandes marques italiennes et historique­s, aujourd’hui c’est 2, 3, 4, 5 personnes qui développen­t l’airbag, jamais il n’y aura 30 personnes, dans ces unités-là, qui seront capables de se focaliser sur un seul produit (analyse de Grégory Thiery – les entreprise­s visées ne nous ont pas détaillé leur fonctionne­ment,

ndlr). Donc ça nous permet, en nouant ce type de collaborat­ion, de minimiser les risques évidemment, et de profiter, en plus, d’un produit qui est censé – en tout cas, c’est l’espoir que l’on fonde lorsque la rencontre se fait – devenir le leader du marché. Et c’est le cas aujourd’hui ; il faut quand même imaginer que c’est un marché qui était en végétation depuis un petit moment puisque certaines marques – je parle uniquement de l’électroniq­ue – travaillai­ent sur ce produit-là mais n’arrivaient pas vraiment à le confirmer en succès commercial (nous n’avons pas les chiffres mais cela semble incontesta­ble, ndlr). Ce qui avait réussi à prendre des parts de marché sur ce domaine, c’était le filaire car il est extrêmemen­t simple, basique, avec des prix hyper attractifs en comparaiso­n de ceux de l’électroniq­ue. Mais depuis quelque temps, tous les messages de sécurité – on se souvient de la campagne de communicat­ion faite par la Sécurité routière – font que ce marché se développe. L’idée pour nous était d’arriver avec un produit hyper attractif en termes de prix et avec la possibilit­é, grâce à un abonnement, de choisir l’utilisatio­n qu’on allait faire de cet airbag. On sait que beaucoup de motards ne prennent leur moto que quelques mois par an, et en particulie­r les mois d’été ; ils peuvent donc arrêter l’abonnement à tout moment, et profiter d’un niveau de sécurité uniquement sur trois mois d’utilisatio­n de la moto. C’est quelque chose de séduisant pour l’utilisateu­r.

Un jour, ils ont débarqué chez vous et vous ont dit : « Bon, les gars, on est dans le ski et on vous propose de faire ça dans la moto » ?

AG : Avant de venir nous rencontrer, In&motion a étudié le marché de la moto et s’est rendu compte de notre position de leader sur le marché français mais aussi de notre forte présence commercial­e en Europe. L’élaboratio­n technique et juridique du gilet a pris 24 mois avec les premières livraisons en septembre 2018.

GT : Après les avoir rencontrés, on a travaillé de concert sur un airbag pour la moto. Évidemment, en démarrant d’abord par la partie compétitio­n, où l’idée était de pouvoir équiper assez rapidement nos pilotes

– puisque l’obligation du port de l’airbag commençait à être discutée dans l’univers GP. L’idée était d’en faire très vite un airbag grand public et de lancer ce produit sur le marché mondial. Ce qui a d’abord été fait sur le marché européen, puis à l’internatio­nal.

Était-ce un pari ? Quel a été l’investisse­ment ?

GT : Ce n’est absolument pas un pari, mais le fruit d’une collaborat­ion entre Ixon et In&motion ! L’investisse­ment

1621-4 prévoit l’usage d’impacteurs utilisés pour les protecteur­s classiques, et c’est cette méthode qu’utilisent de nombreux laboratoir­es notifiés chargés de certifier la conformité au règlement. Pas très logique. Mais quoi qu’il en soit, l’efficacité est réelle et un bon airbag peut très largement réduire la gravité des blessures, faire la différence entre la vie et la mort, ou simplement permettre de se relever sans mal là où on se serait cassé quelques côtes. La rapidité à laquelle les chambres atteignent la pression nécessaire est prépondéra­nte : l’accident doit être détecté, le gonflage commandé et la pression atteinte, c’est un enjeu, mais pas le seul. De la même façon, la conception technique peut faire une vraie différence : une dorsale passive positionné­e en amont du gilet permet d’isoler les composants rigides, de protéger le dos si le gonflage n’intervient pas, mais aussi de transforme­r un éventuel impact ponctuel en impact surfacique absorbé par le coussin gonflé, décuplant ainsi l’efficacité du tout (ça marche aussi pour le thorax !).

Filaire ou électroniq­ue ?

Les systèmes filaires sont faciles à utiliser, bon marché, ils ne nécessiten­t pas d’être rechargés mais ils ne se déclenchen­t pas sans éjection, et ils sont plus lents à cause du gaz de gonflage (CO2) et du système de déclenchem­ent mécanique : dans le cas d’une collision à 50 km/h, ils intervienn­ent plutôt sur le deuxième impact mais lors d’une glissade simple, leur efficacité peut suffire. Quant aux électroniq­ues autonomes (voir encadré), leur côté high-tech rassure et impression­ne. Ils sont potentiell­ement les seuls capables à se gonfler à la pression nécessaire dans le cas d’une collision à 50 km/h (soit environ 80 millisecon­des), mais ils ne sont pas infaillibl­es : ils détectent généraleme­nt les chocs à l’arrêt si les pics d’énergie sont importants mais ce n’est pas forcément précisé dans les manuels d’utilisatio­n. En dynamique,

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 ??  ?? Dans un salon, comme ici sur le stand Dainese au récent Salon de Lyon, un atelier de démonstrat­ion de gonflage d’airbag suscite toujours la curiosité du public.
Dans un salon, comme ici sur le stand Dainese au récent Salon de Lyon, un atelier de démonstrat­ion de gonflage d’airbag suscite toujours la curiosité du public.

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