Moto Revue

Jack Miller « J’ai toujours pris la course au sérieux »

- Propos recueillis par Michel Turco. Photos Jean-Aignan Museau.

Assuré de rejoindre l’équipe officielle Ducati l’an prochain, Jack Miller se prépare à attaquer une saison à nul autre pareil. Un challenge de plus pour ce pilote qui aurait aimé vivre les Grands Prix dans les années quatre-vingt.

à la poubelle (sic). La moto était vraiment inférieure à tout ce qui trouvait sur la grille à ce moment-là et à toutes celles que j'ai pilotées par la suite. La saison suivante, Honda était encore à la traîne avec l'introducti­on du boîtier Magneti Marelli. Nous étions dans un cercle vicieux : ma moto était un peu plus puissante que celle de l'année précédente, mais comme l'électroniq­ue fonctionna­it très mal, rien n'allait dans le bon sens. Les ingénieurs bossaient avant tout pour Marc, tous les efforts étaient réservés à l'équipe officielle. De notre côté, on devait se débrouille­r du mieux possible. En 2017, pour ma dernière saison avec Honda, la moto a commencé à progresser, on l'a vu avec des gars comme Morbidelli, Tito (Rabat), et même Lüthi... Cela dit, on avait encore pas mal de problèmes. Mais tout cela m'a apporté de l'expérience. Courir ensuite avec la Ducati a bien évidemment été tout autre chose.

Quoi qu'il en soit, je ne pense pas que j'aurais gagné du temps si j'étais passé par le Moto2.

Tu as clairement passé un cap l’an dernier. On sent que tu as beaucoup changé, que tu es devenu plus sérieux et plus réfléchi sur la moto.Y a-t-il eu un déclic, ou bien cela s’est-il fait progressiv­ement ?

Je pense que ça a été progressif. Pour ce qui est du côté « plus sérieux », je pense que cela s'est fait courant 2015. J'ai eu une prise de conscience et petit à petit, des changement­s se sont mis en place. Cela s'est effectivem­ent concrétisé l'an dernier au niveau des résultats. Pour autant, j'ai toujours pris la course au sérieux. Mais l'an dernier, tout le monde a pu mesurer les efforts que j'ai faits pour progresser et maîtriser les derniers détails si importants en MotoGP, comme la gestion des pneus en fin de course, ce genre de choses qui font la différence. J'étais moins pendu au guidon, plus en maîtrise. J'ai pu assembler la dernière petite partie du puzzle qui me manquait. Les années précédente­s, j'essayais d'enchaîner dix tours chronos aux essais en espérant que ça fonctionne. J'étais un peu dos au mur. Mais comme tu le dis, j'ai toujours été – et je serai toujours – un de ces gars qui aiment déconner et s'amuser.

Comment as-tu réussi à décrocher une place dans le team officiel pour 2021 sans même avoir encore disputé le moindre Grand Prix cette année ?

(Il rit) Eh oui ! Je me sens un peu comme un pilote Yamaha maintenant, le mec qui signe pour la saison suivante avant que le championna­t ne démarre !

Qui as-tu convaincu ? Domenicali ? Ciabatti ? Dall’Igna ?

Je n'y suis pour rien ! Parle avec ces mecslà et ils te diront tous combien je suis nul avec un téléphone ! J'ai toujours été difficile à joindre. Tout le monde te le dira : le seul moyen de me contacter, c'est d'appeler ma mère. Quand je suis à la ferme et que je passe la journée dehors, mon téléphone reste dans la maison. Quand je rentre, j'ai des centaines de notificati­ons qui s'affichent sur mon écran.

Tu penses que Ducati a eu peur de te perdre ?

Je pense qu'en voyant les autres constructe­urs faire leur marché, ils ont fini par se dire qu'ils devaient prendre des décisions. J'avais d'autres propositio­ns, mais c'est avec eux que je souhaitais rester. Je pense qu'ils savent que je peux piloter leur moto correcteme­nt. Le choix était finalement assez simple. Je ne sais pas quel sera mon coéquipier, mais avec moi, ils ont déjà un pilote de sécurisé.

Que s’est-il vraiment passé l’an dernier durant le Grand Prix d’Autriche ? As-tu réellement pensé que ton aventure chez Ducati allait prendre fin ?

Honnêtemen­t, il ne s'est pas passé grandchose. J'ai entendu beaucoup de rumeurs

sur la troisième marche du podium à cinq reprises, et tu as enchaîné de très bonnes performanc­es en qualificat­ion. Que te manque-t-il aujourd’hui pour franchir la dernière marche ? Tu dois encore améliorer ton pilotage ou plutôt faire évoluer la moto pour ce que tu attends d’elle ?

Il y a toujours des choses à améliorer, que ce soit du côté de la moto ou du pilote. L'an dernier, j'ai progressé sur les fins de la course à partir de la mi-saison. Le meilleur exemple, c'est le dernier Grand Prix à Valence. Personne ne nous attendait en course alors que de mon côté, je savais que j'avais le rythme car j'avais très bien travaillé pour ça aux essais. Ça s'est vérifié le dimanche. J'ai pris un bon départ, je suis resté avec les gars de devant et dans les derniers tours, j'ai pu conserver mon rythme et attaquer pour rester avec Marc et Fabio, qui étaient vraiment très rapides. Dovi et les autres n'ont pu suivre ce rythme. Finir la saison comme ça était pour moi très positif car c'est quelque chose qui m'a souvent manqué par le passé. Je suis capable de partir avec le groupe de tête mais ensuite, j'ai du mal à ménager mes pneus et à partir de la mi-course, ceux qui sont derrière me rattrapent. Tout ça est une question de pilotage mais aussi de mise au point durant le week-end. J'ai compris qu'il fallait travailler pour préparer sa moto pour la course car c'est aussi comme ça que les chronos descendent. Plus tu gagnes de la confiance sur la moto, plus tu vas vite en forçant moins. Aller chercher plus d'une demi-seconde en qualificat­ion pour se retrouver sur l'une des trois premières lignes, c'est toujours possible mais l'important, ça reste le rythme que tu vas pouvoir conserver en course.

Tu es le premier pilote à signer pour l’équipe officielle 2021. Si Dovi venait à quitter Ducati, te sentirais-tu prêt à enfiler le costume de leader et la pression qui va avec ?

Je pense que oui. Même si ça n'était pas la même chose, j'ai déjà été leader de plusieurs

équipes : Ajo en Moto3, VDS en MotoGP... Et l'an dernier, j'étais aussi celui sur lequel le team Pramac comptait.

Ça n’est pas tout à fait la même chose... L’équipe Ducati n’a pas la réputation d’être la plus tranquille. Tout est toujours un peu compliqué entre Dall’Igna, Ciabatti et Domenicali...

J'ai couru pour un team finlandais, et je peux te dire que ça n'était pas tranquille non plus. Tout ça, c'est un peu comme l'histoire du contrat d'un an. Si tu fais du bon boulot, tout le monde est content. C'est le seul moyen de garder la paix au sein d'une équipe. Tout ça est entre les mains du pilote.

Tu es copain de longue date avec Cal Crutchlow. Quel est le truc le plus débile que vous ayez fait ensemble ?

C'est difficile de n'en retenir qu'un...

Cal a fait pas mal de choses stupides par le passé, mais il s'est quand même calmé. Il est plus mature aujourd'hui. Il me laisse faire les conneries tout seul...

Il vous arrive de vous entraîner ensemble ?

Pas vraiment. On a fait du vélo tous les deux, mais je ne suis pas un forcené comme lui.

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