Moto Revue

Et Laconi se retrouva au paradis

- Par Michel Turco. Photos archives

Jusqu’à ce 19 juillet 2020 qui a vu triompher Fabio Quartararo en terre andalouse, Régis Laconi était, après Pierre Monneret en 1954 et Christian Sarron en 1985, le dernier des trois pilotes français à avoir remporté un GP en classe reine. C’était le 19 septembre 1999, sur le circuit de Valence.

Quand il s’impose en Espagne, sur le circuit Ricardo-Tormo, au crépuscule du XXe siècle, Régis conclut un week-end de rêve. La veille, il s’est offert sa première pole position en Grands Prix. À l’époque, il raconte dans les colonnes de Moto Revue : « Je n’ai pas compris tout de suite que j’avais fait la pole. L’affichage du chrono sur mon tableau de bord n’avait pas fonctionné dans mon dernier tour de qualif. C’est quand j’ai vu Aurélie la larme à l’oeil que j’ai compris qu’il y avait un truc. Lorsqu’elle a levé le pouce en l’air, j’ai vécu une seconde fabuleuse. » Dans la foulée, Régis se jette en hurlant dans les bras de Jean-Marc Manuguerra, qui est alors directeur de la compétitio­n de la marque Shark. Le pilote Yamaha évacue son trop-plein d’énergie en lâchant à la volée quelques noms d’oiseau dont il a le secret. « C’était ma deuxième saison avec le team WCM et j’avais du mal à trouver mes marques avec la Yamaha car je n’étais guère aidé par Malcolm Pitman, mon chef mécanicien. J’espérais mieux que les résultats que j’avais obtenus jusque-là. » Quinze jours plus tôt, à Misano, le Français avait signé son meilleur résultat de la saison en se classant cinquième. « Le truc, c’est qu’à Valence comme à Phillip Island où j’ai ensuite fait un autre podium, nous avions beaucoup roulé en tests. Nous avions pu essayer beaucoup de choses et j’étais beaucoup mieux sur la moto que lors des courses précédente­s. Dès la première séance d’essais libre, j’ai été dans le coup. En qualif, je me suis retrouvé au bon moment derrière Biaggi. J’ai pu le prendre en point de mire pour aller chercher la pole. » Un exploit qui va le mettre en confiance pour la course. Dimanche matin, la pluie décide de se joindre à la fête. « Il était tombé des cordes pendant la course des 125, se souvient Régis. Les conditions se sont ensuite améliorées, mais quand on s’est mis sur la grille, la piste était encore bien humide. »

« C’était une décision un peu folle »

Le choix des pneus s’est avéré déterminan­t.

« Nous étions pratiqueme­nt tous en intermédia­ires avant et arrière pour le tour de formation. Les motos ne soulevaien­t pas beaucoup d’eau, le ciel semblait se dégager et le grip était quand même pas mal... N’ayant rien à perdre, j’ai demandé à partir avec un slick à l’arrière. À cette époque, on avait le choix entre le dix-sept pouces et seize et demi. J’ai demandé conseil à Jacques Morelli, qui était alors le responsabl­e Michelin. Il m’a dit de partir avec le seize et demi en m’expliquant que j’aurais plus de surface de contact au sol. Sa carcasse plus haute offrait également un meilleur feeling à l’accélérati­on, et avec la gomme tendre, il fonctionna­it bien à basse températur­e. C’était une décision un peu folle que peu ont prise. Je ne me souviens d’ailleurs que de McCoy et moi... » Okada et Kocinski feront un choix identique mais sans parvenir à en tirer la quintessen­ce comme le fera le pilote de Saint-Dizier. « À la surprise générale, je me suis retrouvé en tête dès le deuxième virage. Je pensais que les premiers tours allaient être compliqués, mais pas du tout, les slicks avaient une adhérence incroyable sur cette piste qui était pourtant encore humide. » Très vite, Régis va se retrouver en tête de la course avec près d’une dizaine de secondes d’avance sur Kenny Roberts Jr et Garry McCoy. À l’arrivée, il témoigne auprès des journalist­es présents : « Quand j’ai vu qu’il n’y avait personne accroché à ma selle, je me suis dit qu’il fallait continuer à creuser l’écart.

D’une part pour rester bien concentré, d’autre part pour me permettre d’assurer en fin de course au cas où la pluie reviendrai­t.

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