Moto Revue

« Avec suffisamme­nt de stocks, le marché n’aurait pas baissé »

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Non seulement 2020 n’a pas été catastroph­ique, mais la baisse enregistré­e est imputable à l’offre, et non à la demande. Vincent Thommeret, qui préside la branche deux-roues de la CSIAM (Chambre syndicale internatio­nale de l’automobile et du motocycle) en est convaincu, et il nous dit pourquoi. Quel regard portes-tu, Vincent, sur cette année 2020 qui vient de s’achever ? Au final, c’est une bonne ou une mauvaise année pour le marché de la moto neuve, en France ?

C’est, malgré tout, une bonne année. Elle semblait partie pour être excellente : en janvier et février, on était à Ă 25 %, je te le rappelle. Mais après le premier confinemen­t, elle s’annonçait catastroph­ique : on pensait qu’on terminerai­t au mieux à - 15 %.

Là, on finit à environ - 4 %. Quand on voit le marasme dans lequel se trouve le secteur automobile aujourd’hui (- 25 % en France,

ndlr), franchemen­t, je pense que nous avons de quoi nous estimer heureux. En outre, la demande est non seulement restée forte, mais elle est aussi restée diversifié­e : on a eu des « achats-besoin » – les gens qui voulaient échapper aux transports en commun –, mais aussi beaucoup d’achats-plaisir : aucune catégorie de moto ne s’est écrasée. Si le marché finit à la baisse, c’est d’ailleurs moins du fait de la demande que de l’offre.

C’est-à-dire ?

C’est simple : au quatrième trimestre et après l’énorme rebond estival, beaucoup de constructe­urs étaient tout simplement en rupture de stocks sur une grande partie de leurs gammes. Les stocks ont très clairement été un facteur limitant. Si nous avions eu suffisamme­nt de motos, le marché n’aurait pas fini dans le négatif.

Est-ce que justement, en termes de gestion des stocks au niveau des constructe­urs, il y a des enseigneme­nts à tirer de cette année 2020 ?

Compliqué comme question. Est-ce que l’expérience tirée de 2020 va nous aider pour

2021 ? Oui, mais en même temps, on ne sait pas à quoi 2021 va ressembler. Est-ce qu’on aurait pu mieux accorder notre offre à la demande en 2020 ? Franchemen­t, je ne crois pas. Le nombre de paramètres à prendre en compte était considérab­le : il y avait le confinemen­t, donc un arrêt mécanique de la demande, l’arrêt de la production différenci­é selon les aires géographiq­ues et évidemment, l’arrêt de certains sous-traitants. Et à cela, s’ajoute une chose : avec l’entrée en vigueur d’Euro 5, beaucoup de modèles, tous constructe­urs confondus, étaient en fin de vie. Tu ne peux pas comme ça, relancer ta production alors que le modèle s’arrête deux mois plus tard et en plus sans savoir si le marché ne va pas replonger à cause d’un reconfinem­ent. Non, c’est hyper compliqué.

Malgré ces situations de rupture de stocks, le mois de décembre est à environ Ă 30 % en termes d’immatricul­ations. Ce n’est pas contradict­oire ?

Non, c’est ce qu’on appelle des immatricul­ations tactiques : des machines Euro 4 qu’on a immatricul­ées avant la limite fixée par la loi mais qui n’ont pas encore été toutes vendues. C’est ce qui se passe à chaque nouvelle norme. Mais cette fois-ci, du fait de la pénurie de stocks sur certains modèles, il y en a eu moins que prévu.

Le marché de la moto neuve tient aussi et surtout par ses concession­naires. Comment se portentils après une année comme celle-ci ?

Je n’ai pas de chiffres précis pour te répondre marque par marque. Mais bon, le marché du neuf n’a pas plongé, celui de l’occasion s’est maintenu.

Les constructe­urs dans leur ensemble ont soutenu leur réseau par exemple sur les délais de paiement et ceux-ci, d’après ce que j’en sais, ont tenu le choc. Après, ça a été un effort constant et considérab­le, notamment dans les périodes d’après-confinemen­t. En termes d’intensité de travail, en termes financiers aussi, puisqu’à certains moments, les concession­s ont dû faire appel à un surcroît de maind’oeuvre pour répondre à la demande, faire des mises à la route, etc. Bref, les gens ont mouillé la chemise, mais le résultat est là.

Dernière question : 2021 a commencé avec son lot d’incertitud­es. Te risques-tu à un pronostic en ce qui concerne le marché du deux-roues ?

Oui : je veux croire que ça va être une bonne année. Les fondamenta­ux qui poussent au regain du deux-roues motorisé depuis 2014 sont toujours là et il y a beaucoup de nouveaux modèles qui arrivent sur le marché. Après, il reste tout de même de grosses inconnues dans l’équation : les possibles reconfinem­ents et l’ampleur des dégâts sur l’économie globale.

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