Moto Revue

Marco Bezzecchi « C’est à moi de mieux m’adapter »

En refusant l’offre du team Pramac pour rester dans la structure VR46, Marco Bezzecchi s’est privé d’une Ducati officielle. En difficulté avec sa GP23, l’italien ne regrette toutefois pas son choix et se dit même confiant dans ses capacités d’adaptation.

- (Interview réalisée avant le GP de Jerez.)

Marco, l’an dernier, tu avais attaqué le championna­t en enchaînant deux podiums, dont une victoire. T’attendais-tu à un début de saison aussi compliqué ?

Avant les premiers essais, non, je ne l’imaginais pas. J’ai commencé à y penser après les tests de Sepang… Je me suis dit alors que j’allais devoir patienter un peu avant de piloter correcteme­nt ma nouvelle moto. Avant la première course, j’étais convaincu qu’il allait me falloir deux ou trois Grands Prix pour m’y faire.

Qu’est-ce qui ne va pas avec cette GP23?

Je ne suis pas assez à l’aise dans certaines phases du pilotage, et notamment en entrée de virage, au freinage. C’est une zone vraiment critique où il faut de la confiance avec la moto. Je suis encore en train d’essayer de faire évoluer mon pilotage, de changer certains automatism­es pour adapter mon style. Je m’améliore régulièrem­ent. Au Portugal, nous avons franchi une étape, mais je ne suis pas encore tout à fait là où j’aimerais être Șndlr : il doit être un peu plus rassuré depuis JerezȚ.

En quoi cette moto est-elle différente de la GP22 dont tu disposais l’an dernier ?

Ce sont de petites choses qui font qu’elle demande un pilotage différent de celui qui était le mien l’an passé. Pour moi, cette moto est très compétitiv­e. La preuve, l’année dernière, elle a décroché le titre et remporté de nombreuses victoires. C’est donc qu’elle fonctionne très bien. C’est à moi de mieux m’adapter.

Des quatre pilotes qui disposent de cette GP23, tu sembles être celui qui a le plus de mal. Pour quelles raisons selon toi ?

C’était le cas au Qatar, un peu moins au Portugal. Hormis peut-être Marquez, qui ne pilotait pas de Ducati l’an dernier, tous les pilotes font les mêmes commentair­es et ont les mêmes difficulté­s d’adaptation.

Tu en parles avec Pecco ?

Oui, bien sûr. On se voit très souvent avec Pecco, et les occasions de discuter ne manquent pas. J’ai parlé avec lui de la manière dont il a réussi à passer de la GP22 à la GP23, et il m’a évidemment donné quelques conseils.

Les datas dont vous disposez te sont-elles utiles ?

Oui, c’est d’ailleurs ce qui m’aide le plus, parce que, à la fin, je peux observer chaque pilote avec ma moto, mes spécificat­ions… Je peux aussi consulter les données de la saison passée, et regarder qui faisait quoi et comment, qui était le plus rapide… Il y a toujours quelque chose à apprendre.

Normalemen­t, chez Ducati, la moto de l’année précédente est toujours plus performant­e en début de saison que la nouvelle Desmosedic­i. Cela ajoute-t-il pour toi une forme de pression supplément­aire ?

Non, je ne suis pas inquiet. Cette saison est un peu différente. La GP23 dont je dispose en ce moment a été créée à partir d’une bonne base, puisque la GP22 fonctionna­it très bien, mais légèrement différente. Et la GP24 d’aujourd’hui est en fait un mélange de la GP22 et de la GP23. C’est, je crois, la combinaiso­n parfaite. Bien sûr, ce ne sont que des paroles en l’air car je n’ai jamais eu la possibilit­é de l’essayer, donc c’est ce que je pense, mais en tout cas, l’année dernière, lorsque j’ai sauté sur la GP22, c’était fantastiqu­e. Alors que cette année, quand je suis monté sur la GP23, c’était compliqué parce que je m’étais tellement bien adapté à la GP 22 que j’ai eu du mal à accepter les difficulté­s avec la nouveauté. Ça l’est d’autant plus que l’on parle d’une phase du pilotage un peu critique où la confiance est essentiell­e. Mais comme je l’ai dit, je ne suis pas inquiet car je sais que ça n’est qu’une question de temps. Je ne pense pas au championna­t, je dois juste revenir et être plus rapide que je ne le suis aujourd’hui.

L’arrivée de Marc Marquez chez Gresini a-t-elle modifié l’équilibre entre les pilotes Ducati ?

Je ne crois pas. En tout cas, en ce qui me concerne, non. Pour les autres, je ne sais pas, mais pour moi, c’est juste un rival avec la même moto.

Tu regardes ses datas ?

Oui, bien sûr. Je vérifie ses données à chaque fois.

Es-tu surpris par ses performanc­es ?

Non, on sait tous qu’il est très rapide. Je ne suis pas vraiment surpris, mais il faut reconnaîtr­e qu’il s’adapte très bien. Il est dans une autre situation. Il vient d’une autre moto, et il utilise beaucoup l’avant, donc avec la moto qui est un peu différente, disons moins bien à l’avant, cela aurait pu être plus difficile pour lui.

Gigi Dall’igna est-il toujours autant à ton écoute ?

Oui, il l’est même peut-être davantage. Tout le monde chez Ducati me soutient. Gigi me traite très, très bien, mais pas seulement lui, également tout le reste des ingénieurs et du personnel de Ducati, ainsi que mon équipe. Je ne peux donc pas me plaindre.

Tu ne regrettes pas d’avoir refusé la GP24 du team Pramac ?

Non, parce que, après, c’est toujours facile de prendre une décision. Pour moi, c’était le meilleur choix, donc non, je n’ai aucun regret.

Tu es heureux là où tu es ?

Oui, je me sens bien où je suis maintenant.

Pourquoi était-ce aussi important pour toi de rester dans le team VR46 ?

Tout d’abord parce que je sais que le soutien de mon équipe est vraiment bon. Et j’ignorais, bien sûr, que l’on reçoit le même partout, mais je ne savais pas s’il était possible de recréer ailleurs le sentiment que j’ai avec mon équipe. Je savais aussi que Ducati m’apportait le soutien dont j’avais besoin, même si je n’avais pas de moto d’usine, et c’est pourquoi j’ai pris cette décision à ce moment-là. Je n’ai donc aucun regret.

Est-ce que le remplaceme­nt de Luca Marini par Fabio Di Giannanton­io a changé quelque chose pour l’équipe ?

Eh bien, non, pas particuliè­rement. Je veux dire qu’au bout du compte, en Motogp, le coéquipier est bien sûr important, mais pendant le week-end, on n’a pas le temps de se voir, de se parler ou de partager des moments ensemble.

Vous vous entendez bien tous les deux ?

J’ai une très bonne relation avec lui. Lorsque nous étions plus jeunes, nous étions différents, peut-être un peu immatures. Nous nous disputions un peu plus, mais quand on grandit, on s’améliore beaucoup et pour l’instant, je me sens très bien avec lui. J’étais très en confiance avec Luca, alors évidemment, c’est autre chose, mais les liens avec Fabio vont continuer à se resserrer avec le temps.

Valentino et Uccio semblent avoir décidé de rester l’an prochain avec Ducati. Comment vois-tu ton avenir en Motogp ?

Pour l’instant, je ne pense pas vraiment à l’avenir, parce que si je continue comme ça, il sera certaineme­nt difficile de poursuivre en Motogp, où il faut être très performant, très rapide. Mon objectif est donc d’être de plus en plus rapide et d’essayer de revenir me battre pour de meilleures positions. Concernant l’équipe, je suis heureux si elle décide de continuer avec Ducati, mais je suis aussi heureux si elle choisit d’aller avec Yamaha.

Que penses-tu du rachat de Dorna Sports par Liberty Media ?

Pour moi, c’est une nouvelle très positive, je pense que le championna­t du monde Motogp est un spectacle incroyable, mais surtout un sport extraordin­aire avec beaucoup de potentiel. J’espère qu’avec ce changement, nous pourrons grandir, que le championna­t pourra grandir aussi et que les fans pourront venir de plus en plus nombreux sur les courses.

Que faut-il changer, selon toi, pour attirer plus de monde ?

Je ne suis pas impliqué dans ce genre de réflexions et ça n’est pas mon travail, mais ce que je vois, c’est que les fans ont besoin de plus de proximité. Il faut que les pilotes en prennent conscience. Nous gagnons de l’argent grâce aux équipes, aux constructe­urs et aux sponsors, mais aussi grâce au public qui nous suit. Il est donc essentiel de prendre soin de lui.

Tu aimerais qu’il y ait plus de courses ?

Non, nous sommes au maximum. Les risques et les contrainte­s physiques sont plus importants qu’en F1. Tous les sports sont exigeants, mais le nôtre est particuliè­rement dangereux. Avec l’ajout du sprint, on en est à plus de 40 départs par saison. S’il fallait ajouter de nouveaux Grands Prix, il faudrait réduire le nombre de sprints. ■

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Le pilote italien ne se dit pas encore en parfaite osmose avec sa Ducati millésime 2023.
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Bagnaia (à gauche) et Bezzecchi échangent beaucoup sur et en dehors des circuits.

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