Moto Verte

Loïc Larrieu, scratcheur fou des ISDE…

Loïc Larrieu est l’enduriste français n° 1 depuis cette année. Champion de France E2 en titre, 2e de L’EGP cette saison avant la finale et depuis Brive vainqueur des ISDE au scratch et en Trophée mondial. Un sacré parcours pour un gars qui se tâtait à pas

- Par JM Pouget – photos JMP et archives MV

Quatrième au premier virage, en tête au suivant, dix mètres d’avance après la troisième courbe… Le départ du MX final des ISDE à Brive est un joli résumé de la carrière enduristiq­ue de Loïc Larrieu. L’homme en bleu du team Yamaha-outsiders n’a pas explosé dès la première saison entre les banderoles. Il a eu des hauts et des bas. Des victoires et des chutes violentes. Ça a pris du temps depuis 2013, mais le voilà bien ancré en haut de la hiérarchie française et mondiale. Vainqueur scratch des ISDE, n° 2 mondial de L’EGP (avant la finale fin octobre en Allemagne) et en tête du E2 français. Ça cause, non ? Pourtant, tout ça n’a failli pas arriver quand, fin 2014, après deux saisons en enduro, Husaberg-hva décide de ne pas prolonger son contrat. « J’étais prêt à repartir en motocross, avoue Loïc. En plus, j’avais fait la connaissan­ce d’hervé Broyer du team 2B et il me proposait de revenir en MX. » Au final, c’est son pote sudiste Jordan Curvalle qui le met en contact avec Fred Collignon et le team Pulsion-sherco. En 2015, Loïc devient champion de France E2, termine 5e en E2 mondial et se retrouve très demandé du côté français au moment où Méo et Renet se tournent vers le rallye. L’histoire est en marche…

Du Minivert au GP

L’histoire sportive de Loïc Larrieu débute pourtant bien avant 2013 et ses premiers pas

en enduro. « J’ai commencé la moto vers l’âge de 8 ans, sur un PW 80, dans la garrigue derrière chez moi », raconte le Sudiste né à Bouzigues, en face de la ville de Sète et de l’étang de Thau. « Mon père faisait du motocross en amateur et j’avais d’autres copains qui faisaient de la moto. » Sauf que rapidement, Loïc prend goût au truc et attaque la compétitio­n. Et à 9 ans, il se retrouve derrière sa première grille de départ, vers Frontignan ou Saint-thibéry, les terrains du coin. En quatre saisons de Minivert, il décroche deux titres et deux places de vice-champion. Il est ensuite champion de France Minime, Cadet et vice-champion Junior entre 2005 et 2007. Une sorte de phénomène qui se frotte à des pilotes de la trempe de Tonus, Ramette, Charlier et Bellino (oui, déjà…). Quand on lui demande à quoi il attribue une telle réussite, il réfléchit et s’en explique : « J’habite une région où l’on peut s’entraîner toute l’année et je faisais beaucoup de courses et de stages dans la région et au-delà. Je faisais pas mal de stages avec Sébastien Bonal, un moniteur BE du coin et parfois en Provence avec la fédé, Charpin, Finot et d’autres. » À 16 ans, il fait son premier GP, en France avec une 125 face aux 250 4T. Et il se qualifie. Il enchaîne ensuite avec l’europe (4e final en 2008) avant de passer en MX2 mondial. On voit mal ce qui pourrait arrêter la progressio­n du jeune Larrieu alors parmi les meilleurs jeunes tricolores du Mondial. Mais durant l’hiver suivant, il perd l’épingle des plaquettes de frein avant lors d’un entraîneme­nt. La roue se bloque net et Loïc se fracasse les deux épaules. Opération des ligaments, rééducatio­n et plus de guidon…

« Pas de guidon officiel, ça veut dire pas de top 10 en Mondial », résume-t-il. Après avoir roulé KTM (avec l’aide d’éric Bernard, déjà), Husqvarna et Kawasaki, il trouve tout de même un guidon chez Yamaha-ricci. Ses épaules fragilisée­s l’empêchent de briller comme il le voudrait. Tout comme le manque de matériel par moments, des casses et des chutes. En France, il termine sur le podium les saisons 2011 (MX1) et 2012 (MX2). Mi-2012, il se laisse traîner sur une épreuve d’enduro par son pote Bérenger Carrier (un très bon enduriste de St-thibéry) qui lui conseille de passer à la discipline. Il se rapproche de Jordan Curvalle et à nouveau d’éric Bernard. Puis il repart faire une paire de MX2 avec Kawa CLS, en espérant se faire remarquer sur la fin de saison mondiale. Mais il casse un moteur lors de la finale, tord le disque avant dans la manche suivante. Quand ça veut pas… Un mois plus tard, il est convié par Éric Bernard à venir faire quelques chronos dans l’herbe chez lui en Vendée sur un 450 Zaberg. Il est embauché aussi sec par la marque suédo-autrichien­ne et passe l’hiver à rouler en spéciale avant d’attaquer son premier enduro début 2013 lors du GP du Chili. « J’avais voulu garder mon numéro, comme en cross, mais du coup je suis parti dernier en Junior, dans la poussière des locaux. Une erreur… »

Mais les temps sont bons et il signe un 4/4 en Junior pour sa première épreuve. « Le terrain était très sudiste, sec et caillouteu­x. Du coup,

je m’en suis bien tiré. » Le week-end suivant, il se casse des côtes en Argentine mais serre les dents et glane des points. Lors de l’ouverture du France à Champagne-mouton, il se vautre en liaison et s’ouvre l’avant-bras : 24 points de suture qui ne l’empêchent pas de boucler son week-end. « J’avais peur de perdre mon contrat si je ne terminais pas mes courses, comme en cross… » En Roumanie, il se fait peur dans l’extrême et se demande ce qu’il fait là. Prêt à tout arrêter. « Je me suis demandé si la discipline me convenait… » Malgré tout, il termine 5e du Mondial et remporte le titre Junior en France, sur l’herbe. Mais 2014 commence mal lorsqu’il se satellise dans le prologue du GP d’espagne. À moitié groggy, il termine le chrono en titubant sur son Husaberg. Cervicales touchées et plusieurs semaines pour retrouver l’équilibre tellement le choc fut violent. Là encore, par peur de voir son contrat dénoncé, il s’engage sur les GP suivants avec une minerve autour du cou… Le doute, déjà bien installé, continue de le miner toute la saison, qu’il termine néanmoins 3e mondial en Junior et 3e en E1 français. Mais Husaberg (devenu Husqvarna entre temps) qui a déjà Renet et Bellino comme pilotes de pointe ne prolonge pas.

« J’ai mis longtemps à me décider, poursuit

l’officiel Yamaha. Je voulais vraiment repartir en MX. Il a fallu que mon entourage me dise de faire absolument le deuil du motocross pour que je me décide à rester dans la discipline. »

« Le plus rapide »

2015 est donc un tournant avec Shercopuls­ion dirigé par Fred Collignon. Avec son pote Toto Boissière, le team fonctionne bien. La 300 SEF-R développée par Fred Lavergne craque plus que bien et la saison se termine avec le titre E2 en France. « Et j’aurais dû finir 4e du Mondial sans une casse le dernier jour à Réquista. » OK, Pela Renet s’est satellisé au GP de Belgique et offre ainsi le titre français au Sudiste qui ne s’en cache d’ailleurs pas. À l’automne, Marc Bourgeois déménage de son Auvergne natale vers le Midi. Tout près de chez Loïc. Et Fred Collignon annonce qu’il stoppe le team Pulsion. Le rapprochem­ent se fait naturellem­ent avec l’équipe naissante Yamaha-outsiders dont Marco vient de prendre les commandes. La 450 Yamaha ne lui fait pas peur. Au contraire : « J’ai un pilotage pour une grosse moto, sans surattaque­r, plutôt efficace,

explique Loïc. La WR-F me convient bien. C’est une moto puissante avec laquelle j’ai le temps de m’appliquer pour faire de belles choses. J’ai dû m’adapter pour les endroits techniques et travailler ma condition pour terminer les journées sans trop de fatigue. » Une condition physique qu’il consolide à coups de vélo de route, de VTT et de renforceme­nt musculaire pour ses épaules. De jogging aussi. « Mais j’avais déjà une bonne condition depuis le motocross. Je n’en fais pas trop, juste de l’entretien avec mon préparateu­r qui me suit depuis une dizaine d’années. » Et aussi beaucoup de roulage. Du MX avec une 250 YZ-F, du franchisse­ment et de la spéciale avec sa 450 WR-F. Pas de trial. « Juste des trucs très compliqués avec l’enduro… » (sourires) Après avoir terminé à nouveau champion de France E2 et 3e du E2 mondial l’an passé, il se retrouve désormais 2e de L’EGP cette saison. Sans coups d’éclat (une seule victoire au GP d’italie) mais avec une régularité payante. Son seul grand rival cette saison sur ce chapitre est Steve Holcombe. L’anglais est sur un nuage, pas intouchabl­e, mais drôlement rapide : « C’est le plus complet. Le plus régulier aussi cette saison. Il mérite son titre s’il le décroche », reconnaît

Loïc. Un Steve Holcombe absent des ISDE où a brillé Loïc. Qu’importe : « Les Six Jours en France, c’était génial. De la folie ! Tout ce public derrière nous et puis la cohésion de l’équipe de France était super. Tout s’est bien passé à part pour Nambotin, mais on a réussi. Et sur le plan perso, quand j’ai vu que j’étais devant dès le premier jour, j’ai tout fait pour essayer de gagner ce scratch. Et ça l’a fait… » Certes, la pénalité du premier jour retirée dans la semaine après réclamatio­n de L’EDF

lui laisse un goût un peu amer. « Mais en spéciale, j’étais le plus rapide. Là-dessus, il n’y a pas photo ! » Arrivé en fin de contrat, Yamaha lui a signifié récemment son intention de le garder et il s’est engagé officieuse­ment à rester avec eux une saison de plus. « La moto me va bien. On a fait beaucoup de développem­ent et je n’ai pas envie qu’un autre pilote en profite l’an prochain pour faire mieux que moi sur cette moto », explique-t-il. Avouant aussi à demi-mot qu’il était pas mal courtisé par d’autres équipes pour 2018 mais sans pour autant faire monter les

enchères. « Ça se passe bien avec l’équipe, ils ont été réguliers avec moi, je reste. »

Et dans l’avenir ? « J’espère que le Mondial va continuer dans le bon sens, je veux dire qu’on continuera à prendre du plaisir et que les marques s’investiron­t toujours en enduro. On n’est pas des footeux, on ne gagne pas des millions, faudra bosser après notre carrière. Mais tant qu’on pourra gagner un salaire décent en enduro, je continuera­i encore quelques années. » À seulement 26 ans, on n’en doute pas. Et quand on lui demande pour conclure si être n° 1 français c’est

plaisant, il répond du tac au tac : « Ça, c’est toi qui le dis et ça me fait plaisir bien sûr. Mais cette place-là, je ne l’ai pas volée. J’ai bossé pour, surtout que ce n’était pas forcément gagné comme on vient de le dire. C’est une bonne place et je vais essayer d’y rester. » Histoire à suivre…

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 ??  ?? En 2004, le petit Loïc a déjà quatre saisons de ligue et Minivert à son actif. Mignon, non ?
En 2004, le petit Loïc a déjà quatre saisons de ligue et Minivert à son actif. Mignon, non ?
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