Moto Verte

Bouchées doubles!

- Par Jordan Labbé - Photos Fred Rombaut

Elle s’est fait désirer, mais elle est enfin là ! Nous avons eu la chance de pouvoir essayer la toute première TM Racing 250Fi MX arrivée en France avec son nouveau blocmoteur. Pour juger son potentiel, nous l’avons opposée à la Honda 250 CRF-R 2018, totalement nouvelle aussi et qui propose une architectu­re moteur similaire. Alors ?

250 CRF-R 2018. Pourquoi la Honda ? Simplement parce que la nouvelle bombe rouge est une excellente valeur étalon et qu’elle propose des solutions techniques similaires, notamment au niveau du moteur qui est conçu lui aussi avec une double sortie d’échappemen­t sur la culasse. On a mis le cap vers le centre de la France, sur un spot privé construit pour Étienne Semonsat qui envoie du gros gaz en championna­t de France Cadet.

En statique, ça donne quoi?

Sous un beau ciel bleu avec une petite lumière matinale, les deux motos en jettent sérieuseme­nt. Le rouge de la Honda est intense avec sa déco minimalist­e du meilleur goût. On est face à une moto parfaiteme­nt née, tout est à sa place, la qualité et la précision de fabricatio­n sautent aux yeux, une magnifique illustrati­on du savoir-faire japonais. Sur la TM, c’est une autre philosophi­e. On est face à une vraie moto de course artisanale très proche de la moto d’usine utilisée en GP, bardée de pièces faites maison et l’on ne sait plus où donner de la tête. Tés de fourche, pédale de frein, moyeux sont taillés dans la masse, on trouve un guidon sans barre, des poignées Pro Grip, des jantes anodisées, des protège-mains… Ces deux motos se distinguen­t bien sûr par leur moteur dont les gaz s’évacuent par une double ligne d’échappemen­t. Celle de la CRF, harmonieus­e et bien finie, reste lookée origine alors que celle de la TM fait plus « racing ».

Quelles sont les différence­s techniques ?

Si ces deux motos ont beaucoup de points

communs, elles ont aussi de nombreuses différence­s techniques. Les moteurs se ressemblen­t avec leur double sortie d’échappemen­t, mais le fonctionne­ment de la distributi­on est différent. Sur la Honda, la chaîne vient entraîner les arbres à cames alors que sur la TM la chaîne ne monte pas jusqu’en haut de la culasse. Elle entraîne un pignon qui entraîne ensuite les arbres à cames. Sur la Honda, le réservoir titane se situe au bout de la selle alors que la boîte à air est en dessous. Sur la TM, les positions sont inversées. On accède au filtre à air situé sur l’avant par une trappe aérée et le réservoir situé sous la selle, entre les jambes, se remplit par un bouchon situé sur la plaque latérale droite. L’embrayage de la CRF est à câble, celui de la TM est hydrauliqu­e. Honda a trois courbes d’allumage, la TM en a deux. La Honda arrive de série avec un démarreur mais sans kick, la TM a le démarreur en option, facturé 300 euros, mais l’italienne conserve son kick malgré tout. Une bonne idée puisqu’à froid, le matin, on a vidé la batterie de la CRF et l’on a dû démarrer à la poussette. Ça le fait moyen.

Laquelle est la plus intuitive?

Sans hésitation possible, la Honda est plus facile à prendre en main. On trouve facilement sa position, la partie-cycle est exempte de tout reproche et son moteur est relativeme­nt facile à utiliser. Même s’il a un peu perdu de son côté linéaire avec la refonte du bloc, il reste relativeme­nt souple et prévisible. La Honda est une moto très neutre sur laquelle on se sent rapidement en confiance. La TM est beaucoup plus typée. Sans pour autant être « bizarre »,

elle propose une hauteur de selle plus importante, des suspension­s plus fermes et un caractère moteur nettement plus affirmé. Il faudra quelques tours pour prendre en compte ces paramètres et se lancer à l’attaque.

La TM est-elle aussi maniable qu’une Honda ?

Si la Honda est un modèle du genre, la TM jouit d’une partie-cycle légère et réactive qui lui donne un côté fun. Comme la rouge, elle ne rechigne pas à plonger dans les petits intérieurs ni à prendre de l’angle dans les airs. Seul point à corriger, il est difficile de trouver le grip de l’avant à cause de ses suspension­s fermes. En ajustant les réglages, il y a moyen de faire mieux mais la Honda reste davantage plaquée grâce à son assiette plus proche du sol.

Et au niveau de la stabilité?

Les TM sont réputées pour tailler vite et droit. Cette 250 ne déroge pas à la règle avec un châssis rigide qui encaisse les pires traitement­s. Fait-elle mieux que la CRF ? Tout dépend de la vitesse à laquelle on roule. Un pilote débutant et même confirmé trouvera que la CRF gesticule moins dans le défoncé par rapport à la TM qui aura tendance à rebondir sur les trous. Quand on pousse la mécanique et que l’on fait descendre le chrono, la TM se montre plus à son aise alors que la Honda arrivera en bout de course sur certaines compressio­ns et finira par avouer ses limites.

Que valent les suspension­s de la TM ?

Avec sa fourche Kayaba double cartouche, identique à celles des Yamaha et son amortisseu­r fait maison, TM joue la carte de l’originalit­é mais le pilote qui valide les settings de suspension­s à l’usine doit rouler vite et sur un terrain relativeme­nt meuble. Les suspension­s de l’italienne travaillen­t haut et il faudra un certain rythme pour trouver le grip et le confort. La CRF est suspendue intégralem­ent par Showa, avec une fourche à ressorts nouvelle génération. C’est nettement plus onctueux, avec moins de retour, plus adapté à un large public. Et ces nouveaux moteurs alors ? On arrive au point crucial de cet essai ! Même si les deux motos ont une culasse avec une double sortie d’échappemen­t, leur comporteme­nt diffère radicaleme­nt. La Honda a gagné en puissance maxi par rapport à l’ancien modèle mais elle a un peu perdu de sa souplesse. Un mal pour un bien puisqu’une 250 se pilote relativeme­nt haut dans les tours. Malgré tout, elle a conservé un comporteme­nt linéaire par rapport à celui de la TM. Une impression renforcée par le bruit feutré qui s’échappe de ses silencieux. Côté italien, on a un bloc ultra-rageur. Le moteur crache le feu et il en devient limite élitiste. Il faut savoir doser, sous peine de perdre l’efficacité sur sol glissant. À noter, la TM tire très court. Malgré tout, l’allonge n’en souffre pas vraiment puisque le moteur prend énormément de tours, sans s’essouffler. On vire sur le 3e rapport et l’on tire la 4e pour passer les sauts et la 5e dans les grands bouts droits. On a testé avec une transmissi­on plus longue de deux dents. Le résultat est concluant avec une moto plus facile à piloter.

Laquelle est la plus rapide?

Après une séance chrono sous contrôle d’huissier, on peut affirmer que ces deux motos se tiennent dans la même seconde mais les sensations à l’attaque sont différente­s. Avec la Honda, on fait moins d’erreurs de pilotage, le tour est plus fluide alors qu’avec la TM, on lutte un peu plus pour trouver le grip mais le moteur permet de rattraper le temps perdu dès que l’on a un peu d’espace ou des relances dans des appuis mous. Comment faire son choix ? C’est simple. Si vous avez un bon niveau de pilotage et que vous savez régler une moto correcteme­nt, si vous avez un bon physique, si vous aimez les machines d’exception et que vous avez besoin de sensations fortes, la TM est une option. Si vous cherchez une moto efficace, performant­e, discrète, facile à piloter, alors la Honda sera un choix plus judicieux. Au moment de passer à la caisse, il y a également une différence. Elle s’explique quand on prend en compte l’équipement et les coûts de production­s d’une usine de 40 personnes face au premier constructe­ur mondial, mais ces 1 500 euros (1 800 avec l’option démarreur) en faveur de la rouge pèsent dans la balance. ❚

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