Le trophée des Gsistes
Participer au GS Trophy Qualifier, c’est opérer une immersion intégrale dans l’univers d’une moto mythique et hors-norme. Découvrir un monde de passionnés qui se retrouvent le temps d’un week-end pour une grande célébration à la gloire de la « Géesse » to
G/S » pour « Gelände/strasse », soit « campagne/route ». Deux lettres synthétisant deux mots, pour définir le cahier des charges d’un modèle né au début des années 80 et qui n’a eu de cesse, dès lors, d’évoquer un imaginaire de voyage auprès des motards de tous bords. Une renommée telle que ces machines sont devenues, en bientôt quatre décennies, de véritables icônes de l’évasion. Une ferveur qui se traduit par des chiffres records : en 2016, pas moins de 46 047 unités de la R 1200 GS se sont écoulées dans le monde tandis qu’en 2014, les GS ont passé la barre des 500 000 exemplaires vendus, toutes versions confondues, depuis la commercialisation du premier modèle en 1980. À en débrider le regard d’un ingénieur des ventes au pays du Soleil Levant… Bref, en plus d’être une véritable poule aux oeufs d’or, la GS est devenue un mythe. Qui dit mythe, dit passion et c’est cet engouement incomparable que la marque à l’hélice se charge de faire prospérer d’année en année à travers différents événements. Des rassemblements comme les « GS Days », mais également une compétition : le « GS Trophy ». Une épreuve internationale inaugurée en 2008 disputée par équipe (voir encadré) et calquée sur le modèle du feu « Camel Trophy » pour les quatre roues. Et pour composer les équipes de trois pilotes qui disputeront la grande finale organisée tous les deux ans, des sélections, appelées « GS Trophy Qualifier », ont lieu dans bon nombre de pays. De toute évidence, la manifestation idéale pour mesurer la passion sans pareil qui règne autour des deux lettres.
Rendez-vous incontournable
Direction l’aude et plus précisément le domaine du Château de Lastours où BMW Motorrad France a donné rendez-vous à tous les possesseurs des fameux modèles trails de la marque. Pas un hasard puisque ce domaine viticole de 850 hectares situé au coeur du Massif des Corbières, propriété depuis 2004 du boss et créateur D’AMV, Franck Allard, est devenu un lieu privilégié de préparation pour les écuries engagées en WRC et en rallye-raid. Entre vignoble en terrasse, collines escarpées et canyons profonds, s’étendent, sur des kilomètres, de
BMW GS ou l’icône de l’évasion pour le plaisir des passionnés.
nombreuses pistes fermées à la circulation. Un spot de référence pour la mise au point des machines de compétition et un écrin de rêve pour accueillir cette sélection française au GS Trophy. Et la filiale française de BMW (pour la première fois sans l’appui de Touratech) a fait les choses en grand. Stand de la marque avec toute la gamme GS actuelle présentée aux côtés des modèles iconiques de série ou de compétition comme la R 80 G/S d’hubert Auriol victorieuse du Dakar en 1981, boutique d’équipements et d’accessoires, stand du Club GS France, ateliers avec assistance des mécaniciens maison, ou encore le service gratuit d’un centre Pirelli pour le montage et démontage des gommes. Incorporez le tout aux impressionnantes structures d’accueil du domaine et le décor est planté. Au coeur de ce village à la gloire de la marque à l’hélice, l’ambiance est excellente et les échanges sont naturels. Les plus férus de belles mécaniques bavaroises se délectent du spectacle offert par ce rassemblement de GS : des R 1200 Adventure et Rallye en pagaille, quelques atypiques R 80 G/S en version Herbert Schek ISDE 1980 replica, des biens belles R 100 dans leur livrée « vintage », quelques « bitzas » improbables dont on a peine à retrouver les bases, deux rares HP2 Enduro, des mono F 800 et F 700 des plus standard aux plus préparés, des R 1100 et 1150 en nombre… Bref, de la BMW à perte de vue sur le site des compétiteurs, mais également sur les parkings visiteurs. Car audelà de la centaine de concurrents et de leurs accompagnateurs, c’est un bon millier de « Béhèmistes » qui a débarqué – et en grande majorité au guidon de GS – pour admirer la bravoure de leurs camarades ! De quoi alimenter le flot des discussions plus ou moins techniques autour de la marque… et de la concurrence bien souvent méprisée dans une jubilation collective ! Pas vraiment une surprise dans ce genre de rassemblements…
« Géessiste » avant tout…
Mais ce qui caractérise l’esprit « GS » et le rend aussi singulier et sympathique, c’est dans les récits et l’expérience des utilisateurs, ceux qui se nomment entre eux les « Géessistes » comme expression d’un respect ultime, qu’il faut aller le chercher… Un esprit qui est loin d’être galvaudé et dont on se délecte bien vite au travers de la richesse des histoires distillées au hasard des rencontres, tout comme on s’étonne de la diversité des profils. Alors certes, les trentenaires ne sont pas majoritaires. Oui, il y a plus de CSP+ que d’ordinaire sur une course de moto TT. Mais non, il n’y a pas de stéréotypes tangibles, si ce n’est des hommes et des femmes – elles étaient une dizaine au guidon de ces machines assez impressionnantes à piloter en tout-terrain – de la trentaine à la soixantaine venus des quatre coins de l’hexagone, réunis autour d’une passion pour la GS et son pilotage en dehors des voies goudronnées. On ne parle peu ou pas ici de classements, de chronos ou de faits de course comme dans une compétition TT classique, mais bien plus largement d’aventures au long cours, d’expériences improbables, de rencontres toutes aussi inoubliables que bien souvent inattendues
dans des contrées plus ou moins reculées. Les échanges sont enthousiastes tant ces tranches de vie motorisées brillent encore dans les yeux de ceux qui les ont vécues et tant elles animent la flamme de ceux qui en rêvent et les écoutent avec attention et bien souvent une certaine admiration. Une vraie incitation au voyage et à l’évasion comme nulle autre pareille ! Et si l’on parle moins de performances pures ou que l’on commente moins les classements, c’est aussi du fait que ce n’est pas au chrono que l’on gagne la compétition ! Eh non, aucune des vingt épreuves n’est chronométrée. Seul un temps global d’exécution est imparti. La raison ? La sécurité des participants. Une R 1200 pèse dans les 250 kg et chercher la limite lors des épreuves moto ou lors des liaisons sur routes et chemins ouverts avec ce genre d’engin serait, en premier lieu, trop dangereux, mais surtout, à l’encontre de la philosophie du GS Trophy qui est basée sur l’endurance, l’habilité, la navigation et l’entraide. OK, mais comment les concurrents sont-ils départagés allez-vous me rétorquer ?
Des points, pas de chronos
Par un système d’accumulation de points. Chacune des 20 épreuves (voir encadré) attribue au concurrent un nombre de points répertorié sur un carnet de pointage. La totalité en cas de sans-faute sur les exercices de maniabilité, puis un dégressif selon le nombre de pieds mis à terre. Un peu comme en trial. Pour les épreuves d’endurance, chaque tour du parcours vous fait remporter cent ou deux cents points, mais libre à vous d’en effectuer entre un et neuf (le maxi) selon votre état physique. Ces dernières, au tracé assez roulant, empruntent les pistes d’essai du domaine et sont parfaitement adaptées aux machines concernées. Pas un hasard puisque BMW a demandé à Sébastien Saphores, finaliste en 2016 du GS Trophy International, d’imaginer un parcours suffisamment technique et sélectif pour départager les premiers tout en étant accessible pour les nouveaux participants. Même le redouté et magnifique parcours en terre ocre de l’« Enduroland » sur le site de St-laurent-de-la-cabrerisse ne posera pas de problèmes insurmontables pour la centaine de participants de tous niveaux. Les épreuves de maniabilité disputées avec sa propre machine ou sur un modèle imposé
sont particulièrement ludiques. On retiendra « Dans le mille ! » : sur une 1200 Urban GS, on doit arrêter sa roue avant au centre d’une cible géante peinte au sol et graduée de 200 à 600 points récoltés. Petit détail qui fait le piment de l’exercice, le pilote doit porter un masque entièrement opaque. Fou rire garanti ! Dans le même esprit, l’épreuve du « Trop plein » où sur une 700 GS chargée comme une mule, il faut franchir un parcours extrême avec whoops, table, dévers et slalom. Chaque pied posé, arrêt ou perte de chargement vous en coûte 50 points. Les épreuves dites « road-book » vous font quitter le domaine pour rejoindre de nouvelles épreuves dont sept ne sont pas disputées au guidon d’une moto. Ces dernières sont constituées de défis techniques comme, par exemple, le démontage et remontage de rétroviseurs, la reconnaissance de modèles dans le noir absolu. On trouve aussi de l’orientation sur un parcours à découvrir à l’aide d’un GPS ou de défi collectif et physique. Comme tirer et pousser une 1200 Adventure sur un tracé semé d’embûches dont notamment une grimpette bien sévère dans la rocaille. Ou encore le franchissement sur un pont de corde d’un petit canyon bien profond. Équilibre recommandé et vertige à proscrire… Bref, de quoi piloter et beaucoup s’amuser sur deux jours ! Et si rien ne paraît très difficile, cumuler la totalité des 9 700 points possibles, comme l’a fait Jérôme Durand, demande un réel effort de concentration et un brin de stratégie. Comme par exemple – et c’est là un excellent tuyau que l’on vous livre – toujours faire les épreuves non-motos en premier lieu et effectuer celles d’endurance et de maniabilité dans l’après-midi afin d’éviter la terre grasse et piégeuse du matin et de ne pas « ouvrir la trace »… Merci qui ? Enfin, si vous y allez en visant la victoire, sachez que le niveau pour intégrer le podium est particulièrement élevé et qu’il faudra viser le quasi-sans-faute tout au long des vingt épreuves et dormir sous une tente au camping, car cela rapporte la bagatelle de 500 points !
Une finale de haut vol
Pour la grande majorité des concurrents, le GS Trophy Qualifier s’arrête à l’issue des épreuves. Des sourires en banane, des traits tirés, quelques courbatures, de très rares bobos et le sentiment pour tous d’avoir passé un moment magique. Pour les trois premiers de chaque catégorie, c’est l’heure de la grande finale ! Douze hommes, trois femmes, trois R 1200 Rallye spécialement préparées, un speaker chaud bouillant et un bon demimillier de spectateurs prêt à se délecter de leurs prouesses techniques. Le tracé de la finale comporte deux passages de maniabilité, trois d’équilibre et quatre de franchissement sur une surface plane à l’exception des deux dévers. A priori, rien de très sévère… Il faudra attendre les premiers