Coup de blues
Disons-le clairement, c’est une mauvaise nouvelle pour beaucoup et un vrai tournant dans l’histoire de Yamaha. Les bleus ont en effet décidé de ne plus homologuer de motos pour l’enduro tel qu’il a vécu et tel qu’il vit depuis le début des années 70 en France. Dans le même temps, Yamaha France a choisi de soustraire ses teams, engagés via la structure « oustiders » du Mondial d’enduro, du championnat de France et des classiques. Il ne sera plus possible de rouler dans les chemins ouverts à la circulation au guidon de WR-F 2019, sauf homologation privée. La décision est économique face à la perspective d’une norme d’homologation Euro 5 devenue trop coercitive alors que les ventes de motos d’enduro chez Yamaha ne représentent qu’une infime partie de l’activité moto, centrée sur les scooters, les sportives et autres routières. Yamaha France a jugé qu’il serait trop complexe et trop onéreux de développer une machine conforme à Euro 5. Des WR-F seront bien en vente mais réservées à un usage en « parc fermé », dans des centres de pilotage privés ou sur des épreuves n’empruntant aucune voie ouverte à la circulation. Plus qu’une mauvaise nouvelle, c’est un virage au frein à main chez les bleus dont l’histoire est intimement liée à la pratique de l’enduro, à la discipline sportive dont sont issus quelques-uns de ses plus grands champions, à la notion de « liberté de circulation dans les chemins » via un partenariat rapproché fort avec le Codever. Difficile de blâmer trop sévèrement les bleus qui ont tant amené au TT devant le choix de suivre une ligne aussi politique qu’économique liée au « real business ». On constate et on déplore quand même que Yamaha stoppe le combat face aux réglementations et aux lobbys écolos de plus en plus contraignants. En retirant son engagement sportif en Mondial et ailleurs, la firme aux diapasons valide en même temps la stratégie et l’imbroglio créé depuis le début de la saison par le lancement d’un championnat parallèle, le WESS, alors que les perspectives 2019 indiquent un retour aux sources de l’enduro « classique » en Endurogp souhaité par la majorité des constructeurs/acteurs. À ne plus rien y comprendre… en effet ! Quel intérêt dans ces conditions à persister à investir et rouler en rallye sur une 450 officielle qui, elle, devra bien être homologuée ? Nous voilà face à une ribambelle de points d’interrogation auxquels la très instructive interview d’éric de Seynes (page 12), homme fort de Yamaha, apporte quelques éclairages. Mais pour évoluer en pleine lumière, il va falloir s’armer de patience. En espérant que le tunnel ne conduise pas à une impasse. Car c’est bien de cela dont il est question. En attendant, restons positifs. Le championnat de France fonctionne très bien, ainsi que les classiques. Le Mondial va peut-être repartir sur des bases saines et ce grâce à l’appui d’autres constructeurs impliqués et motivés pour animer une discpline qui compte des passionnés toujours très nombreux. Stand-by. La nouvelle histoire de l’enduro reste à écrire…
Bertrand Sanlaville, Directeur de la rédaction