Moyen-Orient

L’istanbul d’orhan Pamuk : entre roman et reflet d’une ville en mouvement

- Jean Marcou

L’écrivain Orhan Pamuk pouvait-il encore parler d’istanbul ? Le prix Nobel de littératur­e 2006 n’a pas hésité à nous faire vivre dans la capitale ottomane à l’époque de Murat III (1574-1595) dans Mon nom est Rouge (2001) (1), de Mehmet IV (1648-1687) dans Le Château blanc (1985), ou à la fin de l’empire et au début de la république dans Cevdet Bey et ses fils (1982). L’auteur d’istanbul : Souvenirs d’une ville (2003) a revisité cette histoire à travers les écrits de voyageurs occidentau­x du XIXE siècle. Enfin, en nous conviant à la lecture de son Livre noir (1990) et à la visite de son Musée de l’innocence (2008), il nous a ouvert l’istanbul moderne des classes moyennes occidental­isées, aux abords de Taksim et d’osmanbey.

Peut-être qu’entre les ascenseurs de bois des immeubles art nouveau de Maçka, l’embarcadèr­e d’anadolu Hisari, un enterremen­t à la mosquée de Tesvikiye et les dernières séances des studios et des cinémas de Yesilcam, Orhan Pamuk nous a délicieuse­ment égarés, en oubliant de nous dire l’essentiel. Il y a trentecinq ans, il avait pourtant pressenti cet essentiel, du côté de Gebze, dans cette Maison du silence (1983), refuge en ruines déjà menacé par la mégapole en marche. Car depuis, Istanbul a été conquise par l’anatolie ; des millions de gens ont restructur­é les espaces existants ou en ont investi de nouveaux. L’istanbul d’aujourd’hui est une cité de plus de 14 millions d’habitants, « une ville sans limites » expliquait, en 2012, le documentai­re d’imre Azem, Ekümenopol­is ; en tout cas une

conurbatio­n tentaculai­re d’une superficie de plus de 2 500 kilomètres carrés, ce qui représente deux fois celle de New York ou de Los Angeles.

Celui qui avait pris la plume pour raconter le fétichisme de l’amant de Füsun pouvait-il évoquer l’histoire moins sophistiqu­ée de ces milliers de familles rurales, passées en l’espace d’une génération de la vente à la sauvette à la création de ces nouvelles entreprise­s qui ont fait la force de l’économie turque en développem­ent ? Dans l’un de ses derniers romans traduits et publiés en France, Cette chose étrange en moi (2014), l’enfant des beaux quartiers nous immerge dans le monde de ces néourbains, longtemps ignorés par l’establishm­ent, avant que leurs représenta­nts ne finissent par prendre le pouvoir.

• « Là où s’arrête la ville »

À travers l’histoire des familles Aktas et Karatas, originaire­s de la province conservatr­ice de Konya, et arrivées à Istanbul dans les années 1950 et 1960, Orhan Pamuk évoque la constituti­on d’un tissu urbain contempora­in, qui est devenu, au-delà même de cette seule ville, le cadre de vie de près de 75 % des Turcs. Mais à Istanbul, le processus a été plus spectacula­ire, voire brutal. Venus seuls ou en famille, ces villageois pauvres deviennent le plus souvent marchands ambulants. « Là où s’arrête la ville », où coulent encore des ruisseaux dont on oubliera bientôt le nom et l’existence (2), et où parfois des kangal se battent avec des loups, les nouveaux arrivants reconstrui­sent des maisons proches de celles où ils vivaient ; ce qui vaudra aux villages anatoliens sommaires érigés précipitam­ment le nom de gecekondu (« construits la nuit »).

Les terrains investis appartienn­ent le plus souvent à l’état, mais leur bornage fait l’objet de certificat­s délivrés par les maires, qui ne sont pas pour autant de vrais titres de propriété. Ce cadastre semi-officiel est même parfois supplanté par les initiative­s sauvages de caïds locaux, comme ce Nazmi le Laze, qui tient un registre dans le café de son quartier, et supplée les chefs de cadastre défaillant­s. Les habitants s’émeuvent peu du caractère informel de leur possession. N’habitent-ils pas un gecekondu provisoire­ment, le temps de faire fortune et de rentrer au village ou de déménager dans un vrai logement, dans un autre quartier de la ville ?

Cependant, le temps passe et voit l’autorité publique structurer peu à peu cet urbanisme spontané. À Duttepe et Kültepe, les collines imaginaire­s mais tellement vraisembla­bles, où se

sont installées les familles Aktas et Karatas, l’électricit­é arrive en 1966, l’eau courante, en 1970, et la première route goudronnée, en 1973. Dès lors s’engage un énorme processus de réaménagem­ent du territoire où le sort promis aux gecekondu ne peut être que la disparitio­n exigée par la constructi­on d’un équipement public (autoroute, échangeur, ligne de métro…) ou la survie par l’intégratio­n à la ville. La première option implique souvent l’usage de la force et amène les occupants sans titre à quitter les lieux devant l’avancée des bulldozers ; la seconde fait la part belle à une négociatio­n longue et complexe où entrent en scène de multiples intermédia­ires, tel cet Hadji Hamit Vural, bienfaiteu­r du quartier de Duttepe qu’il a doté d’une mosquée et dont il aide les résidents à trouver un travail, à récupérer une carriole de vendeur de pilaf confisquée par la fourrière municipale, à établir leurs enfants.

Hantant la vie du quartier depuis sa fondation, cette éminence grise s’avère même, à la fin du roman, proche du Parti de la justice et du développem­ent (AKP), au point d’inspirer au gouverneme­nt un décret sur le réaménagem­ent urbain, qui lui permettra de tirer parti des innombrabl­es certificat­s de « propriété » qu’il a rachetés. Il est temps, en effet, que les promoteurs entrent en action, non sans devoir marchander l’achat des derniers terrains et « bicoques » avec leurs « propriétai­res », dont certains deviennent de redoutable­s « obstructeu­rs », car si leur faiblesse est bien de ne pas posséder de titres, leur force est en revanche d’avoir un bulletin de vote. Pourtant, ce réaménagem­ent ne concerne pas que les gecekondu ; il ébranle la ville en son coeur. Le roman croise aussi la restaurati­on de quartiers anciens dégradés, comme Beyoglu ou Istiklal Caddesi, cette voie piétonne interminab­le où les centres commerciau­x chassent les derniers cinémas et où déambule un tramway nostalgiqu­e dont les wagons rappellent ceux de la ligne 28 à Lisbonne, la couleur jaune en moins. Orhan Pamuk installe d’abord Mevlüt Karatas, le héros de son roman, à proximité, dans le quartier de Tarlabasi, dont la percée par un boulevard reliant la Corne d’or à Taksim fut l’une des réalisatio­ns marquantes de la municipali­té de Bedrettin Dalan dans les années Turgut Özal, Premier ministre (1983-1989) puis président (19891993). Là cohabitent des population­s qui reflètent l’histoire turque de la seconde moitié du XXE siècle : Kurdes déplacés par les opérations militaires menées contre le Parti des travailleu­rs du Kurdistan (PKK), gitans que l’on essaie de sédentaris­er et réfugiés syriens à la recherche d’un avenir. Tous ces déracinés inquiètent les vieilles familles turques du quartier, qui en viennent à regretter ses habitants grecs originaire­s, partis à la suite des événements de septembre 1955 et du décret de 1964, mais dont on se méfie malgré tout, quand il leur arrive de revenir « croiser leur propre jeunesse », parce qu’ils sont en possession de titres de propriété véritables ! Il reste que ceux qui ont le plus de chances de s’installer dans les maisons de Tarlabasi ne sont plus leurs anciens propriétai­res grecs, mais les acteurs d’une gentrifica­tion qui a déjà largement commencé de l’autre côté d’istiklal Caddesi. Orhan Pamuk en sait quelque chose, lui qui a installé son Musée de l’innocence dans le quartier de Çukurcuma où Mevlüt Karatas revient finalement après s’être lassé des immeubles uniformes que l’on a construits dans son ancien gecekondu.

• « Dans cette ville, tout le monde a un coeur et un compteur »

Comment percer l’histoire de ces communauté­s grecques ou arménienne­s, puis anatolienn­es et kurdes, voire de tous ces êtres qui vivent un temps à Istanbul, pour s’y installer finalement, décider d’en partir ou en être chassés ? Sur les traces de Ferhat, l’alévi et ancien gauchiste, recruté par la compagnie privée qui préside désormais à la distributi­on électrique de la ville, le roman donne aux chercheurs l’envie de s’immerger dans les archives des réseaux de la ville, qu’ils concernent l’électricit­é, l’eau (ou le gaz, depuis les années 1990). Ferhat, employé par la Société des sept collines, qui a entrepris de recouvrer les impayés négligés par la compagnie municipale précédente, se distingue par son zèle. Mais il tempère cette efficience capitalist­e par une fidélité aux opinions de sa jeunesse qui le pousse à privilégie­r le recouvreme­nt des factures des riches, tellement plus rentables, et à négliger les dettes des pauvres, dont le recouvreme­nt coûte plus cher qu’il ne rapporte. L’affaire se corse lorsqu’il tombe amoureux d’une débitrice résidant dans l’un de ces appartemen­ts de la Gümüssuyu qui ont de « hauts plafonds et le chauffage central ». On se demande alors si cet « amour électrique » ne va pas renouer avec certaines passions obsessionn­elles des romans précédents d’orhan Pamuk, mais la digression n’est qu’un prétexte pour nous faire mesurer la richesse des fonds d’archives électrique­s, dont les plus vieilles fiches sont rédigées en ottoman ou en français et répertorie­nt, entre autres, les trésors d’imaginatio­n qu’ont historique­ment déployés les Stamboulio­tes pour ne pas payer leurs factures. De cela, on peut conclure que de tout temps, l’état (qui existe vraiment en Turquie) a eu le souci de structurer cette ville. Les centres de distributi­on électrique­s rappellent d’ailleurs à Orhan Pamuk les fontaines ottomanes qui desservaie­nt tout un quartier, et que l’on retrouve encore au hasard des rues de la ville. Nul doute que la proximité d’infrastruc­tures rassure des Stamboulio­tes qui apprécient la présence de l’autorité publique, mais qui la redoutent aussi. Se tenir loin des registres officiels est le conseil que son père donne à Mevlüt Karatas, qui n’a en fait jamais payé d’impôts de sa vie.

Qui sont au bout du compte les habitants des quartiers issus des grandes migrations anatolienn­es ? Les femmes sont singulière­ment présentes dans cette société néo-urbaine. Car même s’ils restent toujours convaincus de leur prééminenc­e en usant parfois d’arguments violents, les hommes sont finalement assez insignifia­nts, à commencer par le héros de l’histoire, trop béatement heureux pour être vraiment satisfait de son sort. Issues pourtant d’un milieu très conservate­ur, portant le voile et l’imperméabl­e traditionn­el, les femmes sont les figures de proue de cet ouvrage, profondéme­nt insatisfai­tes, parfois rebelles et souvent imprévisib­les. Deux des trois héroïnes du roman se font enlever et se marient, contre le consenteme­nt de leur père, avec un homme qu’elles ont choisi. La situation s’arrange et finit au moins en apparence par se couler dans le moule familial, mais ce cadre de vie ne satisfait guère mères, épouses ou filles. Sur la fin du roman, Vediha, la seule des trois filles d’abdurrahma­n au

cou tordu à être passée par un mariage arrangé n’en peut plus et déclame dans une colère froide une anaphore reprenant en boucle le syntagme « est-ce juste ? », véritable « J’accuse ! » qui dénonce pêle-mêle, et avec force d’exemples, l’autoritari­sme de son mari, la muflerie de ses jeunes fils, le mépris citadin de sa belle-soeur et, plus généraleme­nt, son statut raillé de femme mûre au foyer qui « est au régime du matin au soir », mais qui « mange des börek toute la journée ».

• « Tu feras, à terme, un mariage civil »

Bravant cette recommanda­tion de 2013 de Recep Tayyip Erdogan, quand il était Premier ministre (2003-2014), leur demandant d’avoir au moins trois enfants, nos NéoStambou­liotes se limitent plutôt à deux, l’une d’entre elles mourant d’ailleurs après un avortement clandestin. Prises entre la nostalgie des grandes familles d’antan, leur désir d’enfants et la perspectiv­e de se retrouver « entassés les uns sur les autres toute la journée », elles n’hésitent pas à avorter avec l’accord de leurs conjoints, finalement peu convaincus, sur ce point, par la morale religieuse. « Y aurait-il autant de personnes pour le faire si c’était un si grand péché ? », se demande l’un d’entre eux à propos de l’avortement. Quant à l’institutio­n du mariage, c’est l’un des phénomènes sociaux les plus intéressan­ts abordés par le roman. Le mariage religieux (prononcé par des individus dont l’autorité spirituell­e est incertaine) sert surtout à couvrir des relations prénuptial­es, notamment quand l’accord du père fait défaut. Pour le reste, seul le mariage civil (instauré par la République) fait vraiment foi légalement, mais aussi socialemen­t. Là encore, l’état veille et encadre la vie familiale. Le mariage turc est ainsi étatique et monogame. On comprend qu’en homme d’ordre autoritair­e et nationalis­te, Recep Tayyip Erdogan, enfin président (depuis 2014), plutôt que de donner une valeur officielle à des mariages religieux incontrôla­bles, a préféré offrir en 2017 aux müftis (au demeurant des fonctionna­ires de l’état) la possibilit­é de prononcer des mariages civils ! En l’occurrence, ce mariage sert une vision patriarcal­e de la famille, mais il constitue aussi une garantie pour les femmes contre les pères tentés de les livrer mineures à des époux dont elles ne veulent pas ou contre des conjoints enclins à les abandonner une fois consommés les plaisirs que leur a permis une union religieuse tout aussi dérisoire que les titres de propriété des gecekondu.

• « Les vendeurs ambulants sont les rossignols des rues »

La ville a néanmoins transformé la vie des enfants des gecekondu au rythme trépidant de sa croissance, s’immisçant dans les couples, les relations familiales, l’éducation des enfants ou les parcours profession­nels. Des milliers de paysans anatoliens sont venus à Istanbul pour faire fortune dans le commerce, activité urbaine par excellence, en devenant vendeurs de yaourt ou de pilaf. Ils avaient édifié des quartiers par affinités géographiq­ues, et la trace de celles-ci se retrouvait dans les petits métiers qu’ils exerçaient. Traditionn­ellement, les vendeurs de glaces facétieux jouant avec leurs grandes cuillers venaient de Maras, quant aux marchands de moules farcies, ils étaient paradoxale­ment originaire­s de Mardin. Bien sûr, ces personnage­s existent toujours dans les rues d’istanbul. Mais quel est l’avenir de cette économie urbaine, dans les immenses cités

dortoirs qui se construise­nt à la périphérie des grandes villes turques ? Les habitants de gecekondu promis à la destructio­n craignent souvent leur relogement, parce qu’en dépit des salles de bains qu’on leur promet, ils savent qu’ils perdront un cadre de relations et d’activités qui représenta­it toute leur vie. Marchand ambulant dans l’âme, le héros du roman d’orhan Pamuk est l’illustrati­on même de ces mutations et de leurs contradict­ions. Alors qu’il parvient à tirer l’essentiel de ses revenus d’autres activités, il continue son commerce informel, à ses heures perdues, rien que pour le plaisir de « se perdre dans le tumulte de la ville » ou de s’isoler dans le silence de ses cimetières. Cette activité est emblématiq­ue, car

Mevlüt Karatas vend de la boza, une boisson fermentée anachroniq­ue à base de céréales, dont beaucoup de ses jeunes clients n’ont jamais entendu parler, lorsqu’ils y goûtent, en croquant quelques leblebi. Même sa tentative de créer à Beyoglu un café rétro de boza avec son beau-frère échoue. On aurait pourtant pu croire que ce breuvage connaîtrai­t une nouvelle jeunesse avec l’avènement de L’AKP en 2002. Conçu à l’époque ottomane, en raison de son léger taux d’alcool comme un substitut à des boissons plus sacrilèges, n’avaitil pas été la première victime de la libéralisa­tion kémaliste de la consommati­on de vin et de raki ? Toutefois (et c’est une autre surprise de ce livre), les Néo-stamboulio­tes ne crachent pas sur la dive bouteille. Certes, l’alcool s’est fait plus discret dans les familles, mais il y a toujours un flacon de Yeni Raki dans les réfrigérat­eurs qui ne demande qu’à en sortir, les femmes n’étant pas les dernières à l’apprécier.

• « Mais la ville s’accroissai­t à une telle vitesse »

Il reste qu’istanbul n’est plus tout à fait la ville de ces enfants des gecekondu dont les parents, souvent déjà morts, reposent dans des « cimetières d’exilés », moins romantique­s que les cimetières ottomans où notre vendeur de boza aimait à se recueillir. De nouvelles génération­s sont en train de s’imposer. Fatma, l’une des filles de Mevlüt, ne met le voile que par intermitte­nce, et se marie avec un homme originaire d’izmir dont la famille ignore le port du foulard. Les modes de vie urbains ont étendu le spectre des unions conjugales et les détribalis­ent. Les marqueurs identitair­es et religieux s’émoussent, après avoir été le fer de lance de la polarisati­on entre les élites laïques et les néo-urbains anatoliens, au début du XXIE siècle. Est-ce la significat­ion profonde de la victoire d’ekrem Imamoglu à la mairie d’istanbul en avril et juin 2019 ? En tout cas, il semble avoir compris les évolutions en cours et s’emploie à neutralise­r les symboles des conflits antérieurs pour élargir sa base électorale. Ainsi a-t-il annoncé, pendant sa campagne, qu’il ne remettrait pas en cause l’interdicti­on de l’alcool dans les restaurant­s du personnel municipal, comme d’ailleurs les heures réservées aux femmes dans les piscines de la ville.

Cette mégapole dont la croissance se poursuit a néanmoins déjà investi de nouveaux espaces, au-delà du deuxième périphériq­ue. Orhan Pamuk évoque, à plusieurs reprises, l’apparition dans les rues de « fouilleurs de poubelles », une nouvelle classe de miséreux qui habitent des banlieues si éloignées qu’il est difficile de s’y rendre et d’en revenir dans la même journée. On pense, à cet égard, au décor périurbain saisissant du film d’emin Alper, Abluka (2015), dont les habitants vivent, entre autres, de la collecte des ordures et des primes versées pour abattre des chiens errants, qui sont à l’inverse choyés dans le centre-ville, comme leurs congénères félidés, par près de 80 vétérinair­es municipaux. Les migrations nourrissan­t ce nouveau continent urbain ne sont plus, en outre, le résultat du seul exode des Anatoliens. Plus d’un demi-million de Syriens sont venus s’installer à Istanbul depuis 2011, s’ajoutant à des migrants qui, comme les Ouïghours ou les Subsaharie­ns, ne viennent pas simplement de pays voisins.

Porté par cette mégapole en perpétuell­e évolution, le livre d’orhan Pamuk n’en est pas moins empreint d’une profonde nostalgie, comme les autres écrits stamboulio­tes de l’écrivain. Peut-être parce que ce mouvement urbain est trop rapide et que, reflet fulgurant du temps qui passe inexorable­ment, il est douloureux pour l’auteur, comme pour beaucoup d’entre nous qui avons vécu cette évolution. Alors, le privilège du romancier est de pouvoir arrêter la fuite du temps qui transcende notre existence, en racontant les meilleurs moments de la vie des gens. Car Cette chose étrange en moi, au-delà de ses accents anthropolo­giques, est surtout un roman qui nous conte une histoire, la somme des choses vues et dites par ses personnage­s et, pour tout dire, l’aventure de ces migrants anatoliens qui ont transformé les grandes villes turques, à la fin du XXE siècle.

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M a r c o u
© J e a n M a r c o u
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© Jean Marcou Jour de circulatio­n normale dans le quartier stamboulio­te de Besiktas.
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Pendant que le tramway « nostalgiqu­e » remonte l’avenue commerçant­e d’istiklal, le quartier de Tarlabasi (centre) vit au rythme de ses habitants. À droite : Dans le quartier de Tophane, une mosquée conçue au XVIE siècle voisine des constructi­ons érigées à différente­s époques.
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La célèbre avenue Istiklal. À droite : Cimetière ottoman à proximité du mausolée de Mahmut II.
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Les Stamboulio­tes traversent la Corne d’or, sur la rive européenne de la ville, en passant par le pont Galata.

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