Repères nucléaire : Cartographie
À entendre les attaques verbales entre l’arabie saoudite et l’iran, les observateurs se demandent toujours si les deux grandes puissances du Moyen-orient en arriveraient à se déclarer une guerre ouverte. Impossible reste la réponse la plus censée, considérant les enjeux en place. Mais les deux pays revendiquent l’accès au nucléaire.
L’accès à la technologie de systèmes d’armements nucléaires n’est plus permis depuis la signature du Traité de non-prolifération (TNP) en 1968, reconnaissant comme seuls pays « dotés » les États-unis (6185 ogives en 2019, selon l’institut international de recherche sur la paix de Stockholm ou SIPRI), la Russie (6500), la France (300), la Chine (290) et le Royaume-uni (200). Toutefois, il y a également des « possesseurs » : le Pakistan (entre 150 et 160 ogives), l’inde (entre 130 et 140), Israël (entre 80 et 90) et la Corée du Nord (entre 20 et 30). Aucun de ces quatre pays n’est membre du TNP. Au Moyen-orient, si l’état hébreu n’a jamais reconnu avoir la bombe nucléaire, alors qu’il la maîtrise depuis 1967, cela constitue une pression psychologique majeure sur son environnement arabe et iranien. Tous les pays de la région sont signataires du TNP et ont renoncé (de gré ou de force) à leur programme nucléaire à caractère militaire (Égypte, Libye, Syrie, Irak), mais l’iran revendique ce droit, développant le nucléaire comme source d’énergie civile depuis les années 1950. Après la révolution islamique de 1979, le nouveau régime respecte les engagements du TNP, mais les États-unis et la France refusent de lui vendre du combustible. Les suspicions sont nombreuses, et ce n’est qu’en 2002 qu’éclate au grand jour la certitude que la République islamique a deux installations secrètes, l’une d’enrichissement de l’uranium (Natanz) et l’autre en eau lourde (Arak). Depuis, le bras de fer avec la communauté internationale est permanent. Jusqu’à l’accord du 14 juillet 2015, qui prévoit une limitation du programme iranien pendant au moins une décennie, une levée des sanctions internationales contre la République islamique et un renforcement des contrôles.
C’était sans compter l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump en janvier 2017. En mai 2018, il annonce le retrait unilatéral des États-unis de l’accord, auquel avaient pourtant souscrit les autres membres du Conseil de sécurité de L’ONU (Russie, Chine,
France et Royaume-uni), l’allemagne et l’union européenne (UE). Les sanctions américaines sont renforcées, asphyxiant l’économie iranienne et la société. En réponse, Téhéran a relancé son programme, annonçant, le 5 novembre 2019, la reprise des activités d’enrichissement d’uranium.
• Une énergie recherchée
Le Moyen-orient ne représente pas un grand acteur de l’énergie nucléaire, secteur contrôlé par les États-unis, la France, la Chine, le Japon et la Russie. Celle-ci est le principal fournisseur des pays de la région acquérant un réacteur dans une logique de diversification énergétique. Outre l’iran, seuls les Émirats arabes unis et la Turquie ont des centrales en construction, les premiers étant les plus avancés, puisque les quatre réacteurs de Barakah doivent entrer en fonctionnement entre 2020 et 2021. En avril 2018, Ankara a lancé les travaux du site d’akkuyu.
L’autre grand pays du Moyen-orient intéressé par l’atome, c’est l’arabie saoudite. Son prince héritier, Mohamed ben Salman, n’a pas caché ses ambitions d’acquérir l’arme nucléaire si l’iran venait à la posséder. Toutefois, ce n’est que rhétorique, car si la République islamique semble proche de maîtriser des systèmes d’armement nucléaire, le royaume n’en est qu’au stade de projet pour le civil. Et quand, en février 2019, la Chambre des représentants a révélé l’intention de l’administration Trump de vendre de la technologie sensible, les levées de boucliers ont été unanimes, tant aux États-unis que dans la communauté internationale. G. Fourmont