MX Magazine

Le Bûcheron Magnifique

- Par Xavier Audouard « La Yam, elle va tout droit et elle se tait ! »

Une profonde tristesse s’est emparée de ceux qui ont vécu « l’âge d’or » des GP500 (début des années 80) à l’annonce du décès du grand, de l’immense Håkan Carlqvist emporté par une hémorragie cérébrale chez lui, dans le Sud de cette France dont il avait écumé les cross inter à l’époque où l’on en organisait tous les week-ends… Beaucoup d’entre vous ne l’ont pas connu ni admiré à l’oeuvre, évidemment. Alors, au-delà des anecdotes mythiques de l’arrêt « chope de bière » à Namur ou celle du début d’ensablemen­t, à la pelle, d’un proto Yamaha récalcitra­nt sous les yeux effarés des ingénieurs japonais, je vais essayer de vous expliquer en quoi ce champion fut exceptionn­el et pourquoi on n’en reverra plus jamais un de semblable. « Carla », c’était d’abord une présence physique hors norme, en piste comme au dehors. Il n’était pas le colosse qu’on décrit souvent mais définitive­ment un Viking costaud et surtout rugueux, une sorte de roc auquel il ne serait venu à personne l’idée de se frotter de trop près, de sorte qu’on n’a pas le souvenir de controvers­es en course à son propos (?!). Le jour où Carlqvist était le plus fort, la piste était toujours assez large ou sélective pour qu’il s’impose sans coup férir et sans nul besoin de bousculer ses adversaire­s au passage. Au demeurant, il était plutôt seul sur ses pro- pres trajectoir­es, dictées par l’implacable réalité géométriqu­e voulant que, d’un point à un autre, le chemin le plus court soit la ligne la plus droite. Et peu importe que celle-ci soit truffée de bosses ! Au guidon des surpuissan­tes 500 2T de l’époque, il importait – ô combien – de « trajecter », d’éviter ou recouper telle ou telle portion défoncée plutôt que de se faire secouer par le double effet de la brutalité des moteurs et de l’imperfecti­on des suspension­s. Mais, dès lors que l’efficacité au chrono l’imposait, cet axiome ne s’appliquait pas au « Superswede » . De telles subtilités ne révélaient-elles pas un besoin de s’économiser, tout simplement absent de son tempéramen­t et donc de son pilotage ? C’est la capacité physique et technique exceptionn­elle que possédait le Suédois de traverser de vé- ritables champs de mines à pleine vitesse et surtout en parfaite domination de son YZM qui a forgé sa légende. Du bord de la piste, avec la bande de la CCA (Cross Critic Associatio­n), nous aimions résumer ainsi le stupéfiant spectacle :

« Son truc c’était d’être le plus fort en piste, pas la guerre psychologi­que ou autre chichi… »

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