MX Magazine

Émotions fortes

- Par Xavier Audouard

Le cross est un sport à émotions fortes où l’on peut basculer de l’exaltation à l’effroi en l’espace d’une seconde. Le destin du crossman a forcément un profil de montagnes russes! On le sait et on l’accepte, ou plutôt on s’y résigne, comme « faisant partie du jeu ». Mais lorsqu’une légende du MX comme Eric Geboers – la Geb’, la Petite Teigne, Mr 875, le Kid, un monument d’attaque et de ténacité ! – disparaît dans la force de l’âge, « banalement » noyé après la vie trépidante et dangereuse qu’il avait menée, c’est vraiment dur à avaler. Jobé, Carlqvist, Geboers, trois héros de la grande épopée des GP 500 au cours des années 80, lorsqu’à chaque départ s’alignaient en grille sept ou huit grands champions susceptibl­es de gagner la course… Triste, tragique série. Le mois qui vient de s’écouler a aussi livré son lot d’émotions heureuseme­nt plus positives. En MXGP, après que Desalle soit ponctuelle­ment parvenu à briser l’invincibil­ité KTM en Russie, on en est revenu au duel HerlingsCa­iroli qui, depuis le début de saison, tutoie les plus grands sommets de ce qu’on a pu admirer dans le genre « duel au super top niveau » (et là je pense à rien moins que Carmichael­Stewart). Neuf titres d’un côté, trois de l’autre, le jeune loup surdoué face au vieux briscard intraitabl­e, les deux évoluant sur le fil du rasoir, au top de leur condition, il faut vraiment en pro- fiter tant que ça dure (et à l’heure où vous découvrez ce journal ils sont en route pour St-jean)! Paulin et Febvre faisaient tous deux figure de « podiumisab­les » , ajoutant une touche d’émotion patriotiqu­e au tableau, jusqu’à ce que l’ancien champion du monde voit sa roue avant emmenée en pleine ligne droite à Kegums par un Jasikonis hors de contrôle… La détresse de Romain, blessé, faisait peine à voir (jusque-là son week-end était positif), tandis que le podium au général d’un Gautier solide et volontaire réchauffai­t le coeur… Sur le front US et donc SX dont c’était l’ultime ligne droite, Marvin Musquin a dû pour sa part gérer des émotions inédites. Pour la première fois depuis qu’il évolue en Amérique, il est devenu le « méchant » aux yeux du public (sifflets nourris) suite à un dépassemen­t osé – mais parfaiteme­nt acceptable – sur la personne de Tomac à quelques mètres de l’arrivée de Foxborough et ce, pour la gagne. L’épisode a (re)mis au jour les relents de xénophobie affectant une certaine frange du public US, ce qui a surpris, voire ébranlé le Frenchie… JMB et DV ont dû se dire : « bienvenue au club ! » . Sur ce, à Salt Lake, l’impensable s’est produit et la réussite jusque-là étincelant­e de Jason Anderson l’a lâché d’un coup (roue cassée) tandis que Marvin gagnait sa quatrième course de la saison, préservant ainsi un suspense mathématiq­ue pour la finale de Vegas. Bien que terribleme­nt tendu au point de s’en rendre malade (on ne l’apprendra qu’après coup), « El Hombre » a pu assurer son très mérité titre (le premier aussi pour Husky), Musquin ne pouvant par ailleurs empêcher Tomac de remporter sa 8e victoire de la saison (faisant de lui le pilote ayant remporté le plus de courses sans être jamais titré). Marvin n’a pas atteint le Graal mais il l’a approché comme jamais et son image s’est (injustemen­t) écornée. « Mixed fee- lings », comme on dit là-bas. En 250 l’excellent mais poissard Adam Cianciarul­o a enfin réussi à remporter une finale (qui plus est lors du « showdown » regroupant côte Est et côte Ouest à Vegas)… sur quoi il a annoncé que son genou touché l’an dernier (jamais remis) l’obligeait à passer dès le surlendema­in sur le billard et à nous donner rendez-vous… pour l’an prochain. Encore un dont le déroulemen­t de carrière n’a rien du long fleuve tranquille! Osborne, en revanche, voit la vie en rose : suite à son titre SX Est, il peut devenir, si la réussite lui sourit à nouveau aussi en MX, le premier pilote 250 à rafler quatre titres en deux saisons. Grosse joie aussi pour Aaron Plessinger, champion Ouest aussi épatant que démonstrat­if. Par la force des choses, les teams suivent les mêmes « roller coasters » (montagnes russes) que leurs pilotes et leur réflexe est de les « contrôler » au maximum. Convaincre les écuries de laisser leurs champions venir participer à une course comme le Supercross de Paris, tâche qui est la mienne depuis des lustres, devient chaque année plus ardu. Heureuseme­nt, le retour à Paris et surtout dans le cadre de la U Arena, un stade aux dimensions US, fait de la classique parisienne la seule épreuve « overseas » d’intersaiso­n à leur fournir du feedback technique potentiell­ement intéressan­t à quelques semaines d’anaheim 1. Entre cet aspect, la motivation de ses deux stars et l’euphorie du succès, l’usine Husqvarna a fini par donner son feu vert à Anderson et Osborne (qui passera en 450 dès la fin de l’outdoor) pour courir tous deux à Nanterre les 17 et 18 novembre prochains. Les planètes se sont alignées pour le retour du champion US en titre au SX de Paris, un défi qui me tenait particuliè­rement à coeur. Songez que le champion avait honoré Bercy de sa présence sans interrupti­on de 1984 à l’an 2000 mais, depuis, à une seule reprise (Stewart en 2009)… «El Hombre » à Paris, son style, son attaque, son maillot au vent, sa barbe de révolution­naire sud-américain, son charisme et son panache, voilà pour moi la plus forte émotion du mois ! D’autant que bien sûr, les Husky-boys ne seront pas seuls. On va se régaler.

« Les planètes se sont alignées pour le retour du champion US en titre au SX de Paris… »

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