MX Magazine

Le rêve d’une vie

Tout jeune vainqueur d’une course Espoir 85 à seulement 12 ans, Maxime Grau n’a qu’une idée en tête, devenir pilote pro et s’envoler un jour vers les États-unis. Tout comme sa famille, le jeune pilote originaire de Saint- Chamond ne vit qu’à travers le mo

- « J’avais passé mon brevet et je commençais à m’intéresser aux jeunes. Je

6heures

du matin gare de Lyon, la nuit rythme encore les allers et venues entre les quais qui se réveillent devant les premiers voyageurs. L’esprit encore engourdi, je cherche la voie du train pour Lyon, là où m’attend une journée que je ne suis pas près d’oublier. Il ne s’agit pas d’une journée avec Herlings, d’une séance photo avec Cairoli ou encore de la visite d’un team usine. Non, il s’agit bien d’une visite, mais celle de la famille Grau. Ce nom vous dit forcément quelque chose si vous suivez l’actualité du championna­t de France Minivert et plus récemment Espoir. Maxime Grau est l’un des jeunes espoirs que la France a la chance de compter dans ses rangs, et cela depuis des années. Pourquoi faire tout un plat d’une simple visite comme cela s’est souvent fait dans votre mag’ préféré ? Je ne le sais pas encore, mais la famille Grau n’a rien d’une famille ordinaire, par la force des choses, et vit le motocross avec une passion rare. À mon arrivée à Lyon, Michel, le père de Maxime, m’accueille tout sourire et me conduit au domaine familial dans la banlieue lyonnaise. Une propriété où habite notamment la mère de Michel depuis le décès de son mari. La famille est plus que jamais soudée depuis le terrible drame qu’ont connu Maxime et son père au mois de mars dernier. Sa maman, Véronika, a brutalemen­t perdu la vie. Du jour au lendemain, la famille qui vivait à 200 % pour le motocross a perdu ce qu’elle avait de plus cher. « Notre vie a changé depuis, avoue Michel en pénétrant dans la propriété. Mon deuxième fils, le demi-frère de Maxime, est revenu vivre à la maison avec sa copine. » Malgré l’immense douleur, le motocross a été comme une bouée de sauvetage qui a permis à Max, et surtout Michel, de ne pas sombrer. Une sorte de remède pour redonner goût à la vie alors que tout peut sembler dénué d’intérêt. « Ça a toujours été une soupape de sécurité, une porte vers le bienêtre que l’on avait hâte d’ouvrir avec Max. »

Tombé dans la marmite

Depuis l’âge de 16 ans, Michel vit et respire motocross et sports mécaniques. Il a d’ailleurs transmis cette passion à ses deux premiers fils, fruits de son union avec sa précédente femme. Les Grau se font rapidement un nom à l’échelle régionale puis nationale avec Yannick, son deuxième

« Le voir gagner pour sa première course en 85 a été un moment incroyable. »

fils, avant que ce dernier ne se blesse à l’épaule. Propriétai­re d’un garage Renault, Michel n’hésite pas ensuite à goûter à d’autres sports avec ses fils puisque le karting et le pit bike l’occuperont durant quelques saisons. C’est donc sans surprise que Maxime, le dernier né, trouve un Peewee sous le sapin de Noël à l’âge de quatre ans. « Je m’en souviens encore, se remémore Max. Je n’y croyais pas, j’étais comme un fou! J’ai voulu rouler direct dehors. » Devant son petit-déjeuner, Max qui revient tout juste de son premier voyage aux États-unis avec son coach Anthony Boissière revit son rêve éveillé aux côtés de l’équipe de France des Nations. Avec une surprenant­e énergie malgré la fatigue, il décrypte le pilotage de chaque pilote et revient sur les grands moments de cette semaine inoubliabl­e. La jovialité et l’enthousias­me de cette petite tête blonde contaminen­t de sourires et d’énergie son entourage. Ma présence ainsi que

celle des appareils photo ne l’intimident pas, tout comme son premier départ en course à l’âge de cinq ans. « Je me souviens, j’ai mis gaz à fond et je

suis parti 4e. C’était trop bien. » La machine est lancée ! Maxime fait ses classes en Minivert et, à 7 ans, trouve très rapidement refuge dans le team Planks au guidon d’une 65 Cobra avec laquelle il devient champion de Ligue Rhône-alpes. « Elles étaient moches les motos, mais qu’est-ce qu’elles marchaient bien » , se souvient Michel. Repéré par Serge Guidetty qui lui dispense des stages, Maxime intègre en 2016 la structure GSM Yamaha. Sans être transcenda­nt en 65, le jeune Lyonnais se révèle totalement en passant rapidement en 85 sous les conseils de Serge.

Petit deviendra grand

À 10 ans, il entame sa première saison Minivert dans cette cylindrée par une victoire surprise à Donnery. « Il faisait des places entre 15 et 25 en 65 alors le voir gagner pour sa première course en 85 a été un moment incroyable pour nous. » Sa petite taille le handicape malheureus­ement et Max perd le titre sur quelques petites erreurs. « Quand je tombais, j’étais trop petit pour redémarrer la moto. J’ai perdu 25 points à cause de ça sur une course, mais aussi je m’énervais à chacune de mes chutes. Je faisais n’importe quoi après. » Après son départ du team GSM, la famille Grau pose ses valises l’année suivante chez Hervé Broyer et son team 2B. Un coup de pouce pour Michel et son fils qui apprennent énormément durant

cette année, notamment sur l’organisati­on, la vie d’un sportif et l’entraîneme­nt. Alors qu’il partait pour le titre, Maxime se blesse pour la première fois en début d’année et voit sa saison prendre fin prématurém­ent. « Regarde, mon poignet était cassé comme

ça » , me montre l’intéressé sans grimacer. C’est à cette époque également qu’ils font la connaissan­ce d’anthony Boissière, lui aussi membre du team 2B. Avec sa retraite sportive en fin de saison combinée à l’arrêt du team 2B en motocross, les deux parties accordent rapidement leurs violons. « Dès les premiers échanges, le courant est vite passé avec Anthony. » Une belle histoire va alors commencer entre Toto et Maxime qui vont nouer une amitié à toute épreuve le faisant incessamme­nt progresser sur la moto.

le regardais rouler et ça se voyait qu’il en voulait et qu’il avait du potentiel. C’est un gamin qui est mordu de moto, dès qu’il ne roule pas pendant trois jours, il devient fou. Il ne pense qu’à ça. Il ne pleure pas si la piste est compliquée et ne cherche jamais d’excuses s’il ne roule pas bien. Notre relation va au-delà d’un coach avec son pilote, on est devenu amis. »

Une première qui en dit long

À 12 ans, le choix est fait de passer directemen­t en Espoir afin de ne pas perdre de temps. Max roule désormais sous les couleurs du team Tech32 sur des Husqvarna. À l’ouverture du championna­t à Gueugnon cette année, il n’est pas derrière la grille de départ à cause de la disparitio­n de sa maman aussi inattendue que douloureus­e. Son coeur est meurtri, mais la passion perdure. « Je voulais rouler dès que c’était difficile. Je disais à papa, vient, on sort la moto et on va rouler. » Avec un sourire d’admiration, son père admet que Max est fort, voire plus fort que lui dans cette épreuve. « Ça a été un événement difficile à expliquer, rapporte Anthony Boissière. C’est le pire qui puisse arriver pour une famille. À ce niveau-là, il a été impression­nant et il est resté concentré sur la moto en faisant de belles choses. Il a un mental d’acier. Je sais que c’est dur, mais il ne le montre pas forcément. La passion l’aide à passer au-dessus. » Retrouver l’entraîneme­nt, un équilibre, reprendre la route des courses, le clan fait preuve d’une incroyable solidarité. Avec la précieuse aide de son cousin Nicolas et de sa copine Anaïs pour l’intendance et la communicat­ion, celle d’anthony Boissière, plus proche que jamais de la famille, et de toutes les personnes qui se reconnaîtr­ont, Maxime retrouve peu à peu son niveau. À Saint-jeand’angély, à cause d’une crevaison survenue à deux tours du drapeau à damier, il rate de peu sa première victoire. Alors en larmes, il promet de gagner sur la course suivante. Ce fut chose faite sur le Domaine de Foolz. « Je roulais au ralenti dans les derniers

tours, se souvient Maxime. J’avais trop hâte de passer l’arrivée. J’étais trop heureux. » À 12 ans, Maxime marque déjà les esprits quand un Christophe Pourcel ou Marvin Musquin l’ont fait à l’âge de 13 ans. S’en suivent de belles sorties comme un titre de vice-champion d’europe des Nations en Pologne (4/2) et un beau podium de manche à la finale de L’ADAC à Holzgerlin­gen, en bagarre avec des pilotes comme Liam Everts ou Mclellan (champion d’europe). « Il commence à aller mieux même si rien ne s’oublie, ajoute Anthony Boissière. À l’avenir, son histoire pourrait devenir une force. J’y crois vraiment, c’est un jeune qui ira loin avec la technique et l’envie qu’il a. » La route est encore longue et passe d’ores et déjà par un premier titre l’an prochain chez les Espoirs. Puis viendra le temps du 125 avant d’entrer dans la cour des grands, mais cela ne semble absolument pas l’inquiéter, bien au contraire. « Je roule déjà avec une 125 et je préfère, sourit Max. Elle me permet d’aller plus vite dans les trous et c’est mieux dans les sauts. » Quand on lui demande ce qu’il rêverait de faire plus tard « J’aimerais intégrer un bon team en Mondial MX2 et faire quelques saisons pour ensuite partir aux États-unis. Mais avant, je dois bien parler anglais et Anthony m’a dit que je devais rouler dans le sable. On va aller souvent à Lommel pour que je progresse. S’il pleut, je mets un K-way pour m’entraîner et même s’il neige, je veux rouler. » Au soir de Foolz, Max est allé déposer sa coupe sur la tombe de sa maman et partager avec elle sa belle victoire. Il y en aura d’autres assurément. Tiens pour Noël, ce n’est pas un jeu vidéo qu’il aimerait sous le sapin mais un vélo de route pour s’entraîner…

À 12 ans, Max marque déjà les esprits quand un Musquin ou Pourcel l’ont fait à 13 ans.

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 ??  ?? Sa taille de guêpe n’est pas un handicap pour Maxime qui dispose d’une très belle technique sur sa HVA.
Sa taille de guêpe n’est pas un handicap pour Maxime qui dispose d’une très belle technique sur sa HVA.
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Coach sur les terrains et ami dans la vie, Anthony Boissière a joué et joue un rôle très important pour Maxime et sa famille.
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Maxime a des rêves plein la tête mais sait aussi que la réussite dans ce sport passe par le travail et la discipline.

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