MX Magazine

HUNTER LAWRENCE Citoyen du monde !

- Par ODV

Après deux saisons de MX2, l’australien Hunter Lawrence réalise son rêve de toujours et débarque enfin aux USA chez Geico Honda. Nous l’avons rencontré en Californie lors d’une séance d’entraîneme­nt. Il s’est confié sans retenue sur sa vie d’exilé et les différence­s entre Europe et USA…

Hunter, avoir grandi dans plusieurs pays, c’est compliqué pour un ado ? « Bien sûr, c’est difficile. Mes parents vivaient en Australie dans la même maison depuis plus de vingt ans et j’ai grandi là-bas étant gamin. Lorsqu’on a décidé de venir en Europe, on a tout vendu et on a débarqué en France, à Marseille. On y est resté quatre mois puis on a déménagé aux Pays-bas. Lorsque j’ai signé avec Suzuki, je suis passé en Belgique. En deux ans, on a vécu à quatre endroits différents ! Ce n’est pas facile, surtout lorsque tu es un athlète profession­nel. Tu dois trouver comment te nourrir, où acheter ta nourriture, où faire ton entraîne- ment, où acheter tes affaires… C’était dur de s’adapter, mais quand on est allé en Allemagne, chez le père de Ken Roczen, c’était encore différent. Ça a été une expérience un peu folle toutes ces années en Europe. On a rencontré des gens super et ils font partie de notre famille maintenant. Mais c’est fini tout ça, nous voici aux USA et il faut tout reprendre à zéro. »

Tu es arrivé en Californie il y a seulement un mois. Qu’est-ce qui t’a surpris par rapport à l’europe ? « Tout est différent. La météo est bien meilleure (rire), la culture est différente… On roule le matin, on fait le physique l’après-midi, on a le temps pour plein d’activités. C’est assez proche de ce qu’on a connu en Australie, donc pour moi, c’est assez facile de m’adapter. Mais c’est le même problème que lors de nos précédents déménageme­nts: il faut prendre nos repères, savoir où faire les courses pour avoir la nourriture qui te convient le mieux, ce genre de choses… Mon agent Lucas Myrtl prend soin de moi et m’aide dans ces recherches. »

À la suite des Nations, beaucoup ont dit que les circuits US étaient devenus trop faciles. C’est l’impression que tu as eue ? « À cette époque de l’année, quand les pros sont tous occupés à faire du SX, les terrains de MX sont bien entendus trop faciles. Même durant l’année, maintenant qu’une bonne partie des pros s’entraîne en cross en Floride, les terrains californie­ns ont tendance à être un peu trop orientés grand public. Mais c’est normal, les propriétai­res des circuits doivent penser à leurs clients, et la majorité ne sont pas des pros. Pour que le business tourne, il faut que les pilotes loisir aient du fun, pas qu’ils se fassent peur. »

Après t’être entraîné en Belgique, penses-tu que ces circuits peuvent t’empêcher de progresser ? « Non, pas vraiment. Je savais à quoi m’attendre. Aaron Plessinger s’est entraîné sur la côte Ouest toute la saison et il a été double champion, donc il est possible de faire du bon travail ici. Je ne suis pas inquiet. Certaines courses se dérouleron­t sur des circuits très défoncés et l’on verra bien comment ça se passe. Mais je ne suis pas du genre à me lamenter et à pointer du doigt les circuits pour justifier de mauvais résultats. On regarde ce qu’on doit améliorer de notre côté en pre-

Lawrence attaque sa carrière américaine chez Geico Honda!

mier. Et si le problème vient des circuits, c’est à nous de trouver d’autres terrains. Accuser les circuits, c’est trop facile… »

En GP MX2, tu as fini 9e, comme en 2017, c’est une déception… « Je suis extrêmemen­t déçu par cette saison 2018. Mais je n’y pense déjà plus, ça appartient au passé. J’ai beaucoup appris et c’est ce qui compte. En Australie, je faisais de la boxe en dehors de la moto, mais je n’avais pas de planning d’entraîneme­nt spécifique. Je boxais parce que j’aimais ça, c’était fun. En Europe, je n’allais plus à l’école et je ne savais pas comment meubler mes journées. J’ai donc appris à m’entraîner comme un profession­nel, que ce soit en termes de physique ou de technique. J’ai appris à m’adapter à toutes sortes de conditions qu’il s’agisse de sable, de chaleur, d’humidité, de vent, de neige, de pluie… Je pense que je peux me vanter d’avoir roulé dans toutes les conditions imaginable­s. » (rires)

Pas de regrets donc au moment d’aborder cette nouvelle carrière aux USA? « Pas de regrets. Je sais qu’on ne peut pas me reprocher un manque de travail. Mes résultats ne reflètent pas les efforts que j’ai fournis mais je n’ai rien laissé au hasard, je n’ai jamais baissé les bras. C’est dommage que ça se finisse comme ça, mais c’est la vie. Ce demi-échec me rend juste plus fort. »

Comment c’était de travailler avec Livia Lancelot? « C’était cool ! C’était la première fois que j’avais une femme team manager et pour elle, c’était la première année, avec un nouveau team, une nouvelle équipe… C’est un job super stressant où tu dois tout faire : trouver des sponsors, gérer l’organisati­on du team, pla- nifier les déplacemen­ts… C’est un boulot qui te prend 24 heures sur 24, et elle s’en est très bien sortie. C’est pas un job que j’aurais envie de faire, alors je lui tire mon chapeau ! »

Aux Nations tu étais rapide, mais contrairem­ent à l’an passé, tu n’as pas gagné… « Ça a commencé par un problème technique en première manche avec mes lunettes. Les gars de 100% ont réussi à corriger le tir avant le second départ, ils ont été au top. J’ai pu rouler à fond en seconde manche et je pense que j’ai pu montrer ce que je savais faire. C’était la première fois que je roulais avec la Honda Geico et je me suis vraiment fait plaisir, cette bécane est si rapide ! Elle était facile à manier, je ne pouvais m’empêcher de faire des whips… Les Nations, c’est un événement spécial, mais même si le résultat ne le reflète pas, je sais que j’étais l’un des plus rapides. »

As-tu été surpris des contreperf­ormances des pilotes US? « Un peu. Je pense qu’aaron Plessinger a eu un mauvais jour. Il est très

Après deux saisons en MX2, l’australien va découvrir le SX!

bon dans la boue d’habitude, je n’ai aucun doute sur son potentiel. Il a manqué de réussite, c’est dur. Le circuit était proche des conditions sablonneus­es qu’on trouve en Europe, ça ne les a pas aidés. Tu devais éviter de t’enfoncer dans les virages… Tout le monde peut avoir un mauvais jour, ça ne signifie pas grand-chose. Ce qui m’a le plus déçu, c’est l’attitude des fans américains. C’est pareil chaque année. Avant la course, ils étaient tous à crier victoire avant l’heure, disant qu’ils ont les meilleurs pilotes et qu’ils vont nous atomiser. Mais une fois que les résultats ne sont pas conformes, ils retournent leur veste et critiquent leurs pilotes en les traitant de tous les noms. Ils devraient soutenir leurs pilotes dans la défaite comme dans la victoire. Il y a beaucoup de guerriers du clavier qui manquent de respect pour le travail des pilotes… »

Ton nouveau team Geico t’a signé pour trois ans ? « Jeff Majkrzak, le copropriét­aire du team, et Dan Betley, le team manager, ont vu mon potentiel et ils m’ont proposé ce contrat étendu, ce qui est une belle preuve de confiance de leur part. On a pris un gros risque en quittant l’australie pour l’europe puis en venant ici, et ça commence à payer. Je suis en train de vivre mon rêve. J’ai travaillé dur pour en arriver là, mais les sacrifices en valaient la peine ! »

Quelles sont les différence­s entre un team usine aux US et un team usine en Europe ? « Le budget principale­ment. Chez Suzuki par exemple, tout passait par le Japon qui approuvait chaque dépense. Ça prenait un temps et une énergie considérab­les. Ici, leur seul souci c’est de trouver les solutions pour avoir la moto la plus rapide possible. Le budget de recherche est juste illimité. Si- non, c’est globalemen­t similaire de part et d’autre de l’atlantique, mais avec plein de toutes petites différence­s qui font que c’est mieux ici : l’essence, les normes de bruit… »

Tu penses que les motos d’usine US sont meilleures que les motos européenne­s? « Ce n’est pas un secret qu’elles sont plus rapides ! C’est vrai qu’en Europe, tu peux modifier les cadres, mais il n’y a que KTM et HVA qui en profitent. Les Honda ont toutes un cadre d’origine. Au niveau des moteurs, entre leur budget de R&D, leur essence plus performant­e, les normes de bruit et les régimes moteur plus élevés, ça finit par faire une différence assez nette. Ma moto est un avion. » (rires)

La façon de travailler des teams managers est-elle différente ici? « Pas vraiment, Jeff et Dan sont présents tout le temps, sur le terrain comme à l’atelier. C’est comme en Europe. La seule différence tient au fait qu’il est plus simple pour moi d’établir une connexion avec des Américains qui ont la même langue et pratiqueme­nt la même culture qu’un Australien. Entre deux Français, ça passera plus facilement qu’entre un Français et un Russe par exemple. Mais c’est juste une question de culture, d’ajustement. Pour moi, c’est donc plus simple ici. »

Ton mécanicien Adam Snyder te sert quasiment de coach sur le terrain. Tu n’as pas d’entraîneur ? « Non, mon père s’est chargé de ce rôle pendant longtemps. Mais maintenant je suis à un âge où je commence à me prendre en charge. Adam m’aide car il me dit ce qu’il voit. Rouler en supercross, c’est quelque chose d’assez récent pour moi, mais Adam a gagné le titre avec Malcolm Stewart et il a l’oeil. Venant d’europe, j’avais une façon de régler la moto qui est différente de ce qu’ils font ici et il m’a aidé à comprendre la manière dont ils travaillen­t. »

Comment les pilotes américains t’ont-ils accueilli? « Ils sont cool. Malcolm Stewart m’a donné des conseils. Christian Craig, Ken Roczen, Cole Seely et Trey Canard étaient au circuit HRC toute la semaine et l’on a pas mal discuté. Ils m’aident en me disant ce qu’ils observent dans mon pilotage… »

Tu as un style différent des pilotes 250 en SX, on entend à peine ton moteur… « Je n’aime pas rouler de manière agressive. J’ai horreur de mettre le rupteur en l’air parce que c’est mauvais pour le moteur. J’ai l’habitude de respecter la mécanique ! J’ai un style plus enroulé, comme en 450. Ce n’est que ma deuxième semaine en SX, alors je roule tranquille et je prends mes marques… Je pense que je suis habitué à rouler de manière souple, très précise, et que ça m’aide pour le SX. »

Où as-tu du mal en SX ? « J’aurais tendance à dire les whoops, mais je deviens chaque jour plus confiant en les dribblant. Je dirais que je respecte le circuit, je prends le temps d’apprendre pour pouvoir faire les choses à ma manière. J’évite de faire des bêtises… »

Comment vois-tu ta première course dans un stade US en 2019? « Je vais rouler a priori sur la côte Est, ce qui va me laisser le temps de prendre la mesure des stades. Je sais que rouler devant cinquante mille personnes sera une expérience nouvelle, mais je ne veux pas me laisser impression­ner. Si je me laisse gagner par la peur ou même par un peu d’appréhensi­on, je suis battu avant même que la grille ne s’abaisse. Le mieux c’est de rester concentré et faire mon boulot de mon mieux. » ■

 ??  ?? Comme Chad Reed il y a quelques années, Lawrence a fait ses armes en GP avant de rapidement filer aux USA.
Comme Chad Reed il y a quelques années, Lawrence a fait ses armes en GP avant de rapidement filer aux USA.
 ??  ?? Hunter se prépare pour sa première saison de 250 SX US, il débutera sur la côte Est!
Hunter se prépare pour sa première saison de 250 SX US, il débutera sur la côte Est!
 ??  ?? C’est avec un deal de trois ans chez Geico Honda qu’hunter Lawrence attaque sa nouvelle carrière US, avec de l’envie, de la joie et du respect pour son nouveau challenge !
C’est avec un deal de trois ans chez Geico Honda qu’hunter Lawrence attaque sa nouvelle carrière US, avec de l’envie, de la joie et du respect pour son nouveau challenge !

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