MX Magazine

Romantique, le MX ?

-

Le premier confinemen­t a été synonyme d’apprentiss­age à la maison pour tous : enfants, ados et aussi leurs parents, soucieux de soutenir la jeune génération dans ses études perturbées. Je n’ai pas échappé à la règle et me suis ainsi retrouvé immergé dans les programmes lycéens, oubliés depuis longtemps… Cette redécouver­te de l’Histoire, en particulie­r, m’a intéressé. Ainsi, en classe de première, on balaye la période couvrant la Révolution Française et le siècle qui l’a suivie où, par un mouvement de balancier, le pays a oscillé entre vieux système monarchiqu­e et régime républicai­n, ce dernier finissant par s’imposer.

C’est parallèlem­ent à ces événements (je l’avais totalement oublié) que s’est développé, dans les années 1800, le mouvement romantique dont la définition donnée par le programme m’a interpellé : « Le romantisme est un courant philosophi­que et artistique privilégia­nt la passion à la raison » .À ce stade, cruellemen­t privé d’actualité crossiste, mon esprit pas pu s’empêcher, je l’avoue, de délirer un peu : « Si le MX avait existé au XIXe siècle, me suis-je ainsi demandé, ne se serait-il pas clairement inscrit dans ce mouvement ? Tels des Monsieur Jourdain modernes, ne ferions-nous donc pas dans le romantisme, sans le savoir » ? Il ne m’était jamais venu à l’esprit d’aborder le MX sous cet angle culturel mais je me suis alors dit qu’un jour, dans le cadre de cette chronique, je le ferais. Et donc, nous y voici !

Puisque cela fait partie de mon métier, j’apprends à mon lycéen de fils qu’un sujet de dissertati­on s’aborde sous un format classique : thèse, antithèse, synthèse. Problème : dans le cas présent, de prime abord, je ne vois qu’une thèse : oui, le MX est romantique car il est… 100 % passion et 0 % raison. Qu’y a-t-il de raisonnabl­e à pratiquer un sport réclamant, la plupart du temps, qu’on y claque l’essentiel de son blé pour se faire globalemen­t mal voir en société et, au final, prendre des risques insensés, voire tragiques ? Par les t e mp s q u i courent, aucun esprit sensé ne peut décemment faire ce type de choix ! À ce moment de la dissertati­on, me voilà bien embêté car l’expérience de la vie m’a convaincu, sur les autres sujets qui la c omposent, que pragmatism­e et modération valaient définitive­ment mieux qu’idéologie et extrémisme. Mais alors, quid de ce dicton éminemment rock’n’rollien – le rock m’a accompagné tout autant que le cross, depuis mon plus jeune âge – qui m’a toujours fait marrer et que je n’ai nulle envie de remettre en question : « Si la musique est trop forte, c’est que tu es TROP VIEUX » ?!

Un moment déstabilis­é par ces pensées perturbant­es, j’ai fini par dépasser ces apparentes incohérenc­es. Évidemment qu’il y a, par-dessus tout, les sensations uniques procurées par le pilotage d’une moto de cross, que seule notre confrérie peut comprendre… Mais on reste là purement dans la passion. Cependant il y a un aspect auquel on pense moins et qui, tout aussi fondamenta­l, peut se ranger dans la case « raison », alimentant ainsi ma fameuse « antithèse » : le MX est une école de la vie et, à ce titre, il apporte d’emblée aux jeunes une flopée de choses rares et précieuses. J’aime aussi les sports collectifs et leur reconnais une valeur formatrice fondamenta­le sur le plan social. Mais dès lors qu’il se trouve derrière une grille, l’apprenti crossman se retrouve face à lui-même et RESPONSABL­E ce qui, dans le monde d’aujourd’hui, me paraît un atout formidable !

S’il joue au c… il peut se blesser ou blesser quelqu’un d’autre. Il peut à tout instant faire un choix payant ou au contraire désastreux. Il doit analyser un nombre incroyable de paramètres techniques (adhérence, plage de moteur utilisée, réaction de la suspension, profil du terrain) autant qu’aléatoires (liés au comporteme­nt de ses adversaire­s, qu’il lui faut jauger et anticiper) et réagir en une fraction de seconde. Il doit apprendre à gérer ses capacités physiques, parfois à les dépasser, à ignorer la douleur, en puisant dans sa force mentale, qu’il lui faut donc cultiver. Il doit faire reculer sa peur ou plutôt développer son courage. Il doit accepter la réalité d’une situation lorsqu’elle le dépasse mais tout l’incite à développer ses atouts personnels pour un jour ne plus la subir. Il doit être à la fois prudent et intrépide, humble et ambitieux, réaliste et capable de se sublimer… La synthèse coule donc de source : oui, le cross est une affaire passionnel­le donc relevant, avant tout, du romantique. Mais, tirant son pratiquant vers le haut dans tout un tas de domaines fondamenta­ux, il possède aussi une dimension utile irremplaça­ble, or ce qui est utile est forcément raisonnabl­e. C’est bien pour toutes ces raisons que c’est le plus beau sport du monde !

« Il ne m’était jamais venu à l’esprit d’aborder le MX sous cet angle culturel mais je me suis dit qu’un jour… »

 ??  ?? Sport individuel ultraexige­ant, le motocross demande un investisse­ment conséquent et une passion sans faille. N’est-ce pas Mathys Boisramé ?
Sport individuel ultraexige­ant, le motocross demande un investisse­ment conséquent et une passion sans faille. N’est-ce pas Mathys Boisramé ?
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France