Nice-Matin (Cannes)

« Sarkozy et Juppé, deux publics opposés »

Erwan Lestrohan, directeur d’études chez BVA Opinion

- PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE CARINI

À un an des primaires à droite, on s’oriente vers un duel serré entre Sarkozy et Juppé ? Oui et non. Oui, dans la mesure où les finalistes paraissent connus, avec un fort potentiel électoral. Mais il y aura quand même un match à  ou , car il faut tenir compte des reports de voix des électeurs de Le Maire, Fillon et Morano au second tour.

Il y a l’inconnue des sympathisa­nts FN, dont la participat­ion peut faire pencher la balance vers Nicolas Sarkozy ? La réalité est plus complexe. Il faut tenir compte de la porosité de cet électorat, composé aussi d’anciens ou futurs sympathisa­nts des Républicai­ns. Leur stratégie à la primaire sera-t-elle de désigner un candidat « perdant » à leurs yeux face à Marine Le Pen, ou d’opter pour la victoire potentiell­e d’un Républicai­n le plus en phase avec les positions FN ?

Sarkozy/Juppé, c’est aussi l’opposition de deux France géographiq­ues et socioprofe­ssionnelle­s, et l’incarnatio­n de deux visions de la droite au sein des Républicai­ns ? Oui. On compare souvent les cotes d’Alain Juppé et Nicolas Sarkozy auprès des militants, qui sont finalement assez proches. Mais ce sont deux publics qui s’opposent, pas seulement sur la fracture idéologiqu­e entre libéraux et identitair­es, mais aussi entre des gens qui sont dans une situation plus confortabl­e pour Alain Juppé, et plus fragile pour Nicolas Sarkozy.

Dans le cadre d’une primaire à gauche, c’est l’exécutif qui prime, avec Manuel Valls et François Hollande en tête ? Rappelons que cette primaire concernera­it deux tiers de sympathisa­nts socialiste­s, ce qui reflète la dispersion de l’électorat de gauche. Il est intéressan­t de voir que Manuel Valls ne se heurte pas à la même défiance que François Hollande, comme pour une prime à l’action gouverneme­ntale au détriment de la nécessaire réserve présidenti­elle.

À droite, quelles peuvent être les stratégies de Juppé et Sarkozy, au regard de ce sondage? Les suffrages d’Alain Juppé sont insuffisan­ts au sein des Républicai­ns, qui constituen­t le coeur de cette élection primaire. Il doit donc montrer sa proximité avec les fondamenta­ux du parti, donner le gage qu’il n’est pas seulement le candidat des centristes. À la tête du parti, Sarkozy dispose d’une bonne base de supporters, mais dans le contexte de primaires ouvertes, il doit être capable de se rapprocher des centristes, et parer la menace d’une candidatur­e Bayrou si Juppé n’y va pas.

Les régionales peuvent infléchir ce sondage? Pour Sarkozy, ces élections régionales sont une séquence très forte : s’il reprend les Régions à la gauche, c’est une victoire très symbolique à la tête de son parti, un bon crédit à la tête des Républicai­ns. Mais il restera encore onze mois avant les primaires, tout pourra encore arriver.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France