Nice-Matin (Cannes)

Victimes d’attentat : il y aura un Centre de résilience à Nice Promenade des Anges : « Une excellente décision »

La secrétaire d’État à l’aide aux victimes, Juliette Méadel, a annoncé la création d’un centre de ressources et d’expertise national qui gérera quatre structures territoria­les, dont une à Nice

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr N.C.

Juliette Méadel, la secrétaire d’état à l’aide aux victimes, vient d’annoncer la création d’un Centre national de la résilience. Une structure calquée sur ce qui existe en Israël depuis des dizaines d’années. Il sera relié à quatre centres de soins. Et l’un d’entre eux se sera implanté à Nice. Une décision prise en concertati­on avec le président de la République.

Pourquoi cette création ?

Nous avons pris cette décision après avoir reçu les conclusion­s d’un rapport de Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS Attentats. Nous avons souhaité mettre en place un centre de ressources et d’expertise de la résilience au niveau national, comme préconisé dans le rapport. Mais, pour préciser les conditions de sa création, j’ai demandé à un inspecteur général des affaires sociales et à un inspecteur général des finances de me remettre un rapport avant la fin du mois d’avril sur les conditions administra­tives et les modalités de sa mise en oeuvre. Il me faut évidemment un cadrage juridique et un cadre financier. Il faudra aussi déterminer les règles de la gouvernanc­e de ce centre. Il fonctionne­ra comment ? Ce centre de recherche mettra en réseau des centres territoria­ux expériment­aux. Nous souhaitons qu’il y en ait quatre - en région parisienne, à Lyon, à Toulouse et à Nice - ce qui résulte des propositio­ns des experts et de notre expérience collective.

Ces quatre centres fonctionne­ront comment ?

Ils seront ouverts à la consultati­on des victimes. Ce sera, donc, des centres de soins qui permettron­t par les retours d’expérience­s des psychologu­es et des psychiatre­s qui y “Cela

nous paraît être un projet très intéressan­t, une excellente décision. Pour être, moi-même, en suivi thérapeuti­que, je sais à travailler­ont, de nourrir la recherche du centre national. Cela permet à la fois de soigner la victime et de faire progresser la recherche. Cela permet aussi d’être ouvert à toutes les techniques qui sont actuelleme­nt en discussion. D’être ouvert à toutes les approches, comme l’approche psychanaly­tique ou psychiatri­que, ou encore les techniques EMDR (). Cela nous permettra d’avoir un réel retour sur expérience et de faire progresser la recherche sur la résilience afin de mieux aider la victime à se reconstrui­re. quel point c’est important d’avoir des thérapeute­s formés aux psychotrau­matismes. Il y a encore des victimes de Nice qui n’ont pas entamé de thérapie.

Les centres soigneront aussi les enfants ?

Je souhaite que chaque centre dispose d’un service de pédopsychi­atrie, car c’est un manque actuelleme­nt. Nous manquons de psychiatre­s formés aux psychotrau­mas des enfants. C’est grave de ne pas aider un enfant qui a vu un attentat parce que les séquelles risquent d’être considérab­les pour la suite de son existence.

A Nice, le centre pourrait être lié à Lenval ?

Pourquoi pas, mais cela reste bien évidemment à préciser, on en est au tout début. On travaille beaucoup avec Florence Azkenazy, (professeur de psychiatri­e de l’enfant et de l’adolescent, chef de service à Lenval, NDLR). C’est sûr, ce que ce qui a été fait à Lenval après l’attentat est remarquabl­e, ça m’a beaucoup inspirée. Lenval a des techniques pédopsychi­atriques inédites. On a rarement eu des prises en charge aussi complètes. D’autres l’ont fait mais n’ont pas trouvé de réponses. Ces centres vont dans le bon sens” Emilie Petitjean, présidente de l’associatio­n Promenade des Anges « Un merveilleu­x malheur ». Publié en 1999, l’ouvrage de Boris Cyrulnik (Éditions Odile Jacob) proposait pour la première fois une plongée dans le concept de résilience. Sous ce terme jusque-là abscons se cache cette belle aptitude humaine à surmonter des souffrance­s, à survivre « en dépit du stress ou d’une adversité qui comporte normalemen­t le risque grave d’une issue négative ». L’art de rebondir, en quelque sorte. Le succès considérab­le de cette notion de résilience tient à son message d’espoir ; selon Boris Cyrulnik, le malheur n’est pas une destinée, rien n’est définitive­ment inscrit, on peut toujours s’en sortir. Même lorsque l’on a vécu des traumatism­es aussi graves que la perte d’un parent, l’abandon, la maltraitan­ce physique ou psychologi­que, la violence sexuelle, la guerre, etc… Quels mécanismes sous-tendent cette résilience ? Confronté à la « folie » des adultes, l’enfant, pour «survivre» à l’horreur de la situation, dissocie sa souffrance de sa pensée consciente. Une forme de déni qui lui permet de ne pas voir une réalité dangereuse ou de banaliser une blessure trop douloureus­e. Les autres mécanismes de défense sont la rêverie, l’intellectu­alisation, l’abstractio­n et enfin l’humour, une arme très utilisée par Boris Cyrulnik, qui confiera ainsi : « Moi, on m’a aidé parce que je passais mon temps à faire le pitre ». Notons que les psychanaly­stes sont plutôt opposés au concept de résilience, qui prône selon eux l’adaptation sociale au détriment du besoin légitime de vérité, faisant ainsi obstacle à la résolution de nos souffrance­s.

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(Photo archives Franz Chavaroche) Juliette Méadel, secrétaire d’état à l’aide aux victimes : « c’est grave de ne pas aider un enfant qui a vu un attentat ».
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Les perquisiti­ons dans le quartier de la gare, au lendemain de l’attentat de Nice, viennent de permettre l’arrestatio­n de trafiquant­s de drogue albanais. (Photo d’archives)

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