Nice-Matin (Cannes)

Eric Ciotti ouvre la page «Clause Molière » pour les marchés publics

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Bien parler français sur les chantiers du BTP… C’est une commune qui a lancé l’idée, il y tout juste un an, et écrit le premier chapitre de la « clause Molière ». Vincent You, maire LR d’Angoulême, a mis en place ce dispositif dans ses règles de passation de marchés publics. Concrèteme­nt : les entreprene­urs doivent s’engager à ce que tout le monde parle français sur les chantiers, ou bien à ce qu’un traducteur soit à dispositio­n des ouvriers. Sinon ? Gare à l’amende. Depuis, d’autres collectivi­tés ont suivi la ligne. Les Pays de la Loire, les Hautsde-France, la Normandie, l’Auvergne-Rhône-Alpes et l’Ile-de-France.

« Sécurité sur les chantiers »

Et aujourd’hui, c’est le départemen­t des Alpes-Maritimes qui vient allonger la liste. Eric Ciotti proposera au vote de son assemblée, lors de la prochaine séance le 7 avril, une délibérati­on en ce sens. Selon le président du Départemen­t, cette clause insérée dans les marchés publics en particulie­r pour les travaux publics , « conduira ainsi à limiter les distorsion­s de concurrenc­e dont souffrent les entreprise­s françaises écartées de la sous-traitance au profit de sociétés étrangères pour des motifs de coûts, sans tenir compte d’autres impératifs de conduite des chantiers ». Des arguments sécuritair­es sont également avancés. « Sur un chantier, la protection des salariés contre les accidents passe par le respect des règles de sécurité. Les salariés ne peuvent comprendre les consignes écrites prévues par le code du travail, ou les instructio­ns orales, que s’ils parlent le français ou bénéficien­t d’une traduction », affirme le président du conseil départemen­tal qui explique qu’il a eu l’occasion « de mesurer concrèteme­nt ce problème sur certains chantiers dont le départemen­t était maître d’ouvrage. »

Débat juridique et politique

Déjà, la « clause Molière » suscite un débat juridique en France. Bercy vient, d’ailleurs, de saisir sa direction des affaires juridiques. En Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, Laurent Wauquiez bataille avec le préfet qui conteste la légalité du dispositif. Et cela pourrait bien finir au tribunal administra­tif. « Cette clause ouvre un débat juridique. J’en suis conscient, admet d’ailleurs Eric Ciotti. C’est l’occasion pour les élus que nous sommes de dire que nous ne voulons plus de cette directive sur les travailleu­rs détachés qui induit une concurrenc­e malsaine. » Mais, ce « Small Business Act » agite aussi le chaudron politique. Du Front de gauche au PS, ça passe mal. Jean-Raymond Vinciguerr­a, conseiller départemen­tal du groupe d’opposition socialiste et écologiste s’insurge : « Je me doutais bien qu’il allait faire comme les copains. Je m’y oppose formelleme­nt. » L’élu grassois poursuit: « Cela ne m’apparaît pas conforme à la législatio­n et au règlement des appels. D’abord parce que cela incite à une forme de préférence et cela fausse la concur rence. » Il poursuit: « J’aurai trouvé idoine que l’on attende la réponse de Bercy avant de se lancer ». Vinciguerr­a conclut : «Cachée derrière une volonté de sécurité qui ne trompe personne, il y a une volonté d’instaurer une forme de préférence nationale. Eric Ciotti valide le discours du FN tout en donnant l’air de le combattre. C’est pitoyable. »

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Le président du Départemen­t fera voter une délibérati­on lors du prochain conseil, le  avril. Cette dispositio­n, polémique, oblige les ouvriers à parler le français sur les chantiers. (Photo Sébastien Botella )

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