Marine Le Pen et son père visés par le fisc et la justice Anticor saisit la Haute autorité pour la transparence au sujet de Macron Voyage à Las Vegas: une enquête ouverte
Ils sont soupçonnés d’avoir largement sous-évalué leur patrimoine immobilier
Décidément, jamais campagne présidentielle en France n’aura autant été placée sous le signe des affaires politico-financières. Hier, outre François Fillon et Emmanuel Macron (lire par ailleurs et cidessous), c’est Marine Le Pen qui s’est à nouveau retrouvée sous le feu des projecteurs. Déjà visée par des soupçons d’emplois fictifs parmi les assistants parlementaires d’eurodéputés FN, la présidente du parti d’extrême droite ferait l’objet, selon Le Monde, de deux procédures de redressement fiscal. En cause : le patrimoine immobilier qu’elle détient avec son père, Emmanuel Macron va-t-il lui aussi être rattrapé par la patrouille ? On n’en est pas là. Pour l’heure, l’association Anticor, qui lutte contre la corruption en politique, vient juste de saisir la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Elle s’interroge en effet sur la véracité de la déclaration de patrimoine effectuée par le ministre de l’Economie en octobre 2014, comme la loi l’impose désormais à chaque membre du gouvernement, dans les deux mois qui suivent sa nomination. Anticor s’étonne, en fait, d’un certain manque de cohérence entre les revenus perçus et le patrimoine déclaré. Jean-Marie Le Pen, et qui serait largement sous-évalué.
Deux propriétés concernées
Il s’agit, d’abord, du célèbre domaine familial de Montretout, à Saint-Cloud (Hautsde-Seine). A travers une société civile immobilière, le fondateur du Front national en possède 75%, le reste étant détenu par Marine Le Pen (12,5 %) et sa soeur Yann (idem). Problème : alors que sa valeur déclarée à l’administration fiscale est de 2,5 millions d’euros, la réalité se situerait aux alentours de 5 millions d’euros selon Bercy, voire nettement plus (le journaliste Olivier Beaumont « De 2009 à 2014, Emmanuel Macron a perçu 3,3 millions d’euros de revenus avant impôts, dont 2,8 millions de mai 2009 à mai 2012, date de sa nomination au secrétariat général adjoint de la présidence de la République, note Jean-Christophe Picard, le Niçois président national d’Anticor. Or, sa déclaration fait état d’un patrimoine de 1,2 million d’euros et d’un endettement d’un million d’euros, soit un patrimoine net de seulement 200000 euros.» Le responsable d’Anticor prend bien soin de préciser que son association ne porte pour l’instant aucune accusation : «Par notre démarche, assure dans son livre Dans l’enfer de Montretout qu’elle a été évaluée en 2006 à 6 millions d’euros, et qu’elle vaudrait désormais 9 millions d’euros). Dans cette affaire, une procédure nous voulons seulement vérifier la sincérité et l’exhaustivité de la déclaration de M. Macron, pour y trouver une cohérence.»
Rémunération divisée par quinze
Pour le candidat à la présidentielle, il n’y a pas de loup. Il a livré son explication au quotidien La Croix : «Comme banquier d’affaires, j’avais le statut d’indépendant. J’ai donc payé, sur le montant brut de ma rémunération, des cotisations sociales patronales, salariales, puis l’impôt sur le revenu. Ces cotisations ont augmenté et frappé mon dernier revenu de référence, au point que je de conciliation est en cours, qui pourrait déboucher sur un accord entre les deux parties d’ici à la fin du mois. Second point de désaccord entre le Trésor public et la famille Le Pen : une demeure à ne gagnais plus assez pour payer mes impôts», a-t-il indiqué. Et de préciser que lorsqu’il a quitté la banque Rothschild pour l’Élysée en 2012, « sa rémunération a été divisée par quinze», alors qu’il a procédé dans le même temps « à des travaux dans la maison de famille de [son] épouse, partiellement financés par des emprunts bancaires qui ont tous été déclarés en 2011 et en 2012». « Tout cela est connu de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui aurait transmis au parquet depuis longtemps si elle avait relevé un problème », a-t-il conclu. Rueil-Malmaison (également dans les Hauts-de-Seine), rachetée par Marine Le Pen, avec l’aide de sa soeur Yann et de son père, à Jany Le Pen, épouse de ce dernier. Elle serait également sous-évaluée, selon le fisc, ce que conteste la présidente du FN. Celle-ci assure au passage qu’elle a, pour cette acquisition, eu recours à un emprunt, précision d’importance car cela pourrait lui éviter de se retrouver assujettie à l’impôt sur la fortune – elle ne l’est pas actuellement, mais pourrait le devenir du fait de la réévaluation de ces biens.
Enquête en cours
Le quotidien du soir rappelle par ailleurs que Bercy n’est pas seul à s’y intéresser. Saisi par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, le Parquet national financier a en effet ouvert une enquête préliminaire en janvier 2016 au sujet des mêmes faits : père et fille auraient procédé à la même sous-évaluation sur leurs déclarations de patrimoine, auxquelles ils sont tenus en tant qu’eurodéputés. Des faits, s’ils étaient avérés, passibles de 3 ans de prison et de 45000 euros d’amende, voire d’une interdiction de droits civiques pour 10 ans aux maximum, et de l’interdiction d’exercer une fonction publique. Pour l’entourage du candidat d’«En marche!», il ne s’agit en rien d’une «affaire Macron». Mais l’existence d’une enquête sur l’organisation d’un déplacement d’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, à Las Vegas en janvier , vient forcément troubler l’image du favori actuel des sondages. Le parquet de Paris a en effet ouvert lundi, a-t-on appris hier, une enquête préliminaire pour favoritisme, complicité et recel de favoritisme. Elle fait suite à un rapport de l’Inspection générale des finances du mars qui soupçonne des dysfonctionnements dans l’organisation de cette opération, confiée au géant Havas sans appel d’offres par Business France, l’organisme de promotion de la «French Tech» dépendant de Bercy. Selon Le Canard enchaîné, qui avait révélé l’affaire, le coût de la soirée aurait atteint euros, dont euros rien qu’en frais d’hôtel. Ce n’est «en aucun cas une affaire Macron. C’est une affaire Business France», a insisté hier son entourage, faisant valoir que le choix du prestataire «n’incombait aucunement au ministre ou à son cabinet». Emmanuel Macron, son cabinet et le ministère de l’Economie «sont totalement hors de cause» dans cette affaire, avait affirmé le mars l’actuel ministre de l’Economie, Michel Sapin, assurant que «c’est un dysfonctionnement de Business France». L’organisme a depuis reconnu sa responsabilité.