Nice-Matin (Cannes)

MOUGINS Campelière­s : le message d’amour de Latifa Ibn Zaiten

- ISABELLE VARITTO

Quand Latifa Ibn Zaiten s’est assise en face du groupe d’ados, dans la salle d’audiovisue­l du collège des Campelière­s, c’est un silence grave qui l’a accueillie. Pas d’agitation ni une once d’impatience, pas de doigts tapotant sur un téléphone ni de regard vague se perdant par la fenêtre. Non. Le moment était trop important. Trop intense pour en manquer une miette.

« Merah a tué mon fils bien-aimé »

Cette mère courage, musulmane, qui brise les a priori et parcourt la France avec son message d’amour en guise de revanche méritait toute leur attention volontaire. « Mohamed Merah a tué mon fils bien aimé. Et pourtant, je lui ai pardonné, lui, mais pas ce qu’il a fait. » C’était à Toulouse, en mars 2012. La tuerie a commençé par le meurtre de son fils, Iman. Le militaire a préféré mourir plutôt que de s’agenouille­r comme le lui avait ordonné Merah. « Ce dernier acte, son désir de dignité, je dois le respecter », dit-elle. Les jeunes n’osent pas l’interrompr­e. Pourtant, ils ont du mal à comprendre. Elle les invite et ils s’expriment. «Comment pouvezvous pardonner ? ! » Elle explique sa recherche. L’enquête qu’elle a menée pour comprendre qui était le meurtrier. « J’ai rencontré son coiffeur, ses voisins, les gens qui l’ont connu. Il était abandonné. Toujours seul et silencieux. Personne ne lui a tendu la main jusqu’à ce qu’il soit devenu un monstre sans coeur. »

« Daesh veut nous séparer »

Depuis, elle a écrit un livre que le groupe a lu : « Disnous Latifa, c’est quoi la tolérance ? » Et elle rencontre beaucoup de jeunes pour que la haine les épargne. « J’ai sauvé pas mal de jeunes qui ne sont pas partis en Syrie… Ce que fait Daesh n’a rien à voir avec l’Islam, affirme-t-elle, ils veulent nous séparer et profitent de jeunes gens fragiles. Il y a trop de laissés pour compte. Mais si chaque personne en France donne 5 % de son temps pour le dialogue, le sourire, le regard de l’autre, alors, nous sauverons la France. » La rencontre était organisée par l’associatio­n d’éducation populaire ELV de Valbonne en collaborat­ion avec des professeur­s dont Céline Brighini du collège des Campelière­s. Les autres établissem­ents participan­ts au projet intitulé « Tolérance . » sont le CIV de Sophia, le lycée Renoir de Cagnes-sur-Mer et le collège Picasso d’Antibes. « L’objectif est de produire un film sur la tolérance et le vivre ensemble qui sera diffusé sur Internet, a indiqué Thierry Lespinasse, responsabl­e de l’associatio­n. Le film ne portera que sur les sketchs imaginés et interprété­s par les élèves sur la base du livre de Mme Ibn Zaiten. »

Newspapers in French

Newspapers from France