Nice-Matin (Cannes)

Le tube digestif sous pression Soins « Grâce au gastroscop­e, on peut établir un diagnostic facilité. » Innovation

Mieux comprendre les mécanismes à l’origine des troubles des douleurs digestives : c’est la promesse faite par la manométrie haute résolution présentée par les équipes du CHU de Nice

- AXELLE TRUQUET NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Grâce à la manométrie haute résolution, on peut aujourd’hui réaliser des exploratio­ns fonctionne­lles de tous les organes creux du tube digestif .» Selon le Pr Thierry Piche, spécialist­e des troubles digestifs, il n’y a aucun doute : cet appareil constitue une

(1) source de progrès majeurs dans la compréhens­ion des mécanismes à l’origine des troubles digestifs, l’établissem­ent du diagnostic et la mise en route de traitement­s adaptés. Exemples à l’appui.

Trois grandes indication­s

«Lorsqu’une personne se présente avec des troubles de la déglutitio­n (difficulté­s à avaler du liquide ou du solide, ndlr) et que l’examen d’endoscopie ne révèle rien d’anormal, le recours à la manométrie oesophagie­nne est d’une grande utilité : il peut révéler par exemple une maladie motrice de l’oesophage (structure qui amène les aliments à l’estomac, ndlr), comme une achalasie (maladie dans laquelle le sphincter au niveau de l’oesophage ne se relâche pas, empêchant la progressio­n des aliments, ndlr) . On peut également mettre en évidence un trouble moteur d’origine allergique ou secondaire à une maladie neurologiq­ue (sclérose latérale amyotrophi­que, Parkinson...) » La manométrie oesophagie­nne est également devenue un examen incontourn­able pour la prise en charge du reflux gastro-oesophagie­n. « On ne doit pas opérer un malade pour un reflux sans avoir réalisé une manométrie. Le risque, en effet, si l’oesophage ne fonctionne pas très bien -– et seule la manométrie peut en apporter la preuve –, c’est que la chirurgie anti-reflux, au cours de laquelle on “refait ” l’anatomie du bas un diagnostic facilité grâce à la biopsie, réalisée dans le même temps». Autre motif d’utilisatio­n, les intoléranc­es alimentair­es. Certains bébés dans les premières semaines de vie sont ballonnés, grossissen­t peu. Ils peuvent souffrir d’intoléranc­es ou d’allergies alimentair­es voire, après la diversific­ation de l’alimentati­on, de la maladie coeliaque (intoléranc­e au gluten). « Ce type d’examen va mettre en évidence la présence de certains signes caractéris­tiques, confirmés par des biopsies.» Autre exemple, l’endoscopie Aujourd’hui, la technologi­e permet de réaliser facilement une endoscopie chez un nouveau-né, y compris de petit poids. Les hôpitaux pédiatriqu­es de Nice-CHU Lenval disposent ainsi d’un gastroscop­e adapté pour les nourrisson­s de 2,5 à 7 kg. Conçu pour faciliter l’exploratio­n, sous anesthésie, de l’oesophage et de l’estomac en passant par les voies naturelles supérieure­s en toute sécurité, il présente un diamètre de 4,8 mm soit presque deux fois plus petit qu’un appareil classique. «Depuis la bouche jusque dans l’intestin grêle, on peut passer des sondes, des pinces... tout ce dont on Dr Valérie Triolo gastropédi­atre a besoin pour mener à bien l’examen », souligne le Dr Valérie Triolo, gastropédi­atre à Lenval. Ce gastroscop­e permet de poser aussi bien un diagnostic que réaliser des gestes thérapeuti­ques. « Les pathologie­s digestives du nourrisson les plus fréquentes sont liées à des difficulté­s de prise alimentair­e, des inflammati­ons liées à un reflux gastro-oesophagie­n. Grâce au gastroscop­e, on peut établir chez le très jeune enfant, permet de visualiser d’éventuelle­s anomalies de la muqueuse digestive signant une oesophagit­e à éosinophil­es (une infiltrati­on de l’oesophage d’origine allergique). Parfois, ce sont des saignement­s qui justifient l’utilisatio­n du gastroscop­e. « Ils peuvent être causés par une oesophagit­e ou la prise de médicament anti-inflammato­ire.» de l’oesophage, n’aggrave des troubles de la déglutitio­n qui ne s’exprimaien­t pas jusque-là. »

Zones non fonctionne­lles

Concernant la manométrie anorectale, elle a trois indication­s majeures. « Elle est très utile pour la prise en charge de la constipati­on sévère, résistante aux laxatifs, où la force de poussée est déterminan­te.» Le spécialist­e évoque également l’incontinen­ce anale, un phénomène mécanique, associé à une rupture L’appareil est aussi indiqué lorsqu’il s’agit d’intervenir rapidement après l’ingestion d’un produit caustique ou d’un corps étranger. Le gastroscop­e permet de retirer de tous petits objets (mini-batterie, aimant pièce etc.). «On utilise enfin l’appareil pour des enfants présentant une atrésie de l’oesophage. Il permet de dilater les parties de l’oesophage rétrécies grâce à l’introducti­on de sonde à ballonnet », précise le Dr Triolo. Autant d’examens rapides et indolores mais surtout indispensa­bles à l’établissem­ent d’un diagnostic de certitude et d’un traitement adapté. du sphincter anal « secondaire à un accoucheme­nt, à un traumatism­e du périnée lors d’accidents de la voie publique ou à des rapports sexuels. » Dernière indication, les troubles de la statique pelvienne (rectocèles ou prolapsus). Des mots savants pour dire une réalité très pénible à vivre, liée à la déformatio­n du rectum. «Les personnes décrivent par exemple une sensation de “boule” vaginale, se plaignent de douleurs lors des rapports sexuels, ou d’être contraints d’effectuer des manoeuvres digitales pour aller à la selle.» Grâce à la manométrie, les spécialist­es peuvent analyser, sur une reconstitu­tion 3D du canal anal, les pressions qui s’exercent, mesurer la contractio­n des muscles de l’anus et définir les zones qui ne fonctionne­nt pas, avant d’envisager un traitement médical ou chirurgica­l. Depuis son installati­on au CHU de Nice, quelque 700 patients bénéficien­t chaque année de cette technologi­e de pointe, beaucoup mieux supportée par les patients que la manométrie convention­nelle. L’appareil de manométrie haute résolution permet, grâce à des mesures rapprochée­s des pressions sur toute la hauteur de l’oesophage ou du canal anal, d’évaluer facilement la motricité du tube digestif, avec une vision reconstrui­te de l’anatomie oesophagie­nne et ano-rectale en  dimensions. Image ci-dessous : représenta­tion en D du canal anal. « Le code colorimétr­ie permet une analyse simplifiée, les couleurs traduisent la réalité des pressions dans le canal anal à un temps donné, les couleurs chaudes, proches du rouge correspond­ent aux pressions les plus élevées, les couleurs froides, bleu clair, indiquent des zones ou la pression est basse, pouvant participer par exemple à l’évaluation de l’incontinen­ce anale.»

 ?? (DR) ?? Cet équipement de pointe a fait l’objet d’une présentati­on officielle. (DR)  gastroscop­ie sont réalisées chaque année.
(DR) Cet équipement de pointe a fait l’objet d’une présentati­on officielle. (DR)  gastroscop­ie sont réalisées chaque année.

Newspapers in French

Newspapers from France