«Nos jeunes, ces oubliés de l’élection»
Ils viennent boire leur café et parler politique à l’« Auberge dou Casteou » à Saint-Laurent. Un bistrot tenu par un patron fan de « Méluche », situé tout près des HLM du Point du Jour
Bleu – marine – ou pas, rose, rouge… Peu importe. À l’Auberge dou Casteou ,à Saint-Laurent-du-Var, on commente la présidentielle tous les jours, au coin du zinc. Toutes tendances politiques confondues. Il faut dire que le patron gouailleur est une invitation à se lâcher sur la présidentielle. Dans ce bistrot, situé à côté de la cité du Point du Jour, les Laurentins étalent leurs inquiétudes et leurs aspirations. Et ce sont celles de citoyens pas nés avec une cuillère d’argent dans la bouche qui craignent pour l’avenir de leurs enfants.
Entre deux petits jaunes ou deux petits noirs, ça fuse en Technicolor à l’Auberge dou Casteou, à Saint-Laurent-duVar. Véritable marmite politique, dissimulée derrière la mairie. Gérard, militant rouge, est le patron des lieux. Rouge peutêtre, mais, chez lui, la parole est libre. Nice-Matin en main, ses clients – fidèles – commente l’actu. Et les débats sont vifs, parfois, surtout lorsqu’il s’agit de « causer » présidentielle. Qu’ils votent pour Macron, Hamon, Mélenchon, Le Pen ou Fillon, ils estiment, tous, que les jeunes sont les grands oubliés de cette élection. « Et c’est la Marine qui ramasse. D’ailleurs, on se demande pourquoi, elle parle jamais des jeunes», s’agace Gégé. Lui est revenu de la rose, et va voter «la Méluche» des deux mains. Hamon? C’est pas pour lui. «Ils ont trop merdé dans le gouvernement avec les Cahuzac et les Leroux. Qu’ils fassent le tri dans leurs poubelles et on verra.» Sinon ? « Eh bien, ce sera Macron », lâchet-il, faisant éclater de rire Simon, qui lui votera blanc, « comme depuis des dizaines d’années». Si Fillon et Le Pen se retrouvent face à face, alors, il « osera Fillon »… Mais du bout du bulletin. Pas comme Andrée Guillot, conseillère municipale de la majorité LR à Saint-Laurent. «Ce sera Fillon, bien sûr, on est famille ou on ne l’est pas. » Les affaires, ça la gêne un peu, « surtout l’importance des sommes ». Mais pour elle, il n’est pas coupable. Et prophétise : «Vous verrez, il sera élu. » «Un président mis en examen, génial ! », la titille un client. L’élue grimace. « Tout ira bien. Ce déchaînement contre lui, c’est louche.» Finalement, les affaires, peu importe. C’est le programme du candidat Fillon qui lui parle. «Il est sensé. Notamment sur le contrôle de l’immigration. On n’a pas les moyens de les recevoir dignement, les migrants. Il y a tellement de jeunes sans logement, chez nous. » Nathalie est d’accord. Enfin, pas sur tout. Elle a 49 ans et ne dira pas pour qui elle va voter. Mais sa préoccupation première ce sont, aussi, les jeunes. « Regarder le nombre de jeunes au chômage, c’est pas normal. Ils n’ont plus d’avenir. On n’en parle pas assez dans cette campagne. On dirait qu’ils s’en fichent, les candidats. » François Martinez, 62 ans, a toujours voté à gauche. « Fillon, Le Pen, jamais. Mon père se retournerait dans sa tombe. Lui qui a été ministre de l’Éducation nationale en Espagne dans les années 30. » Et comme les autres, il s’inquiète. «Que va-t-on laisser à nos enfants ? » Louis habite au Point du Jour. Il dodeline. « Dans les cités, les jeunes sont désespérés. Qu’ils viennent traîner par chez nous leurs costards à 12 000 euros, les candidats ! Ils verront des jeunes qui n’ont plus de rêves dans la tête. »
Ce sera Fillon. On est famille ou pas… ”