Nice-Matin (Cannes)

Des frappes américaine­s visent une base syrienne

Dans la nuit de jeudi, 59 missiles américains ont été tirés depuis deux destroyers basés en Méditerran­ée contre la base d’Al-Chaayrate causant la mort de neuf personnes et d’importants dégâts matériels

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Trois jours après une attaque chimique présumée ayant choqué le monde, les États-Unis ont bombardé jeudi, dans la nuit, une base aérienne en Syrie, une décision unilatéral­e dénoncée par les alliés russes et iraniens de Damas qui ont parlé d’«acte irresponsa­ble ». Moscou a demandé une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU quelques heures après la première action militaire américaine contre le régime du président Bachar al-Assad, après plus de six ans d’une guerre très meurtrière. En 2013, l’ex-président Obama avait renoncé au dernier moment à frapper en Syrie après une attaque chimique imputée au régime. Une volonté portée par la France et le président Hollande à l’époque. Les frappes ont été ordonnées ce jeudi soir par le président américain Donald Trump, qui s’était pourtant toujours prononcé contre toute interventi­on directe en Syrie. Vers 3h40, cinquante-neuf missiles de croisière Tomahawk ont été tirés par deux navires américains en Méditerran­ée vers la base aérienne d’Al-Chaayrate (centre). Quelques heures plus tard, l’armée syrienne a fait état de «six morts, des blessés et d’importants dégâts matériels », sans préciser si les victimes étaient des militaires ou des civils. L’agence de presse officielle Sana a annoncé ensuite la mort de neuf civils dans des villages environnan­ts. L’Observatoi­re syrien des droits de l’Homme (OSDH) a pour sa part indiqué que sept soldats avaient été tués et que l’aéroport militaire « a été presque totalement détruit: les avions, le tarmac, le dépôt de fuel et le bâtiment de la défense aérienne ont été pulvérisés ». Neuf avions ont été détruits, a de son côté affirmé la télévision russe en diffusant des images de hangars et d’une piste d’atterrissa­ge modérément endommagés.

Une réponse à l’attaque chimique

Dans une adresse solennelle à la télévision, Donald Trump a expliqué que ces frappes étaient « associées au programme» d’armes chimiques de Damas et «directemen­t liées » aux événements « horribles » de mardi. Ce jour-là, un raid imputé à l’armée syrienne contre la localité rebelle de Khan Cheikhoun (nord-ouest) a fait au moins 86 morts, dont 27 enfants. Les images de victimes agonisante­s ont choqué le monde. Les services de renseignem­ent américains ont établi que les avions ayant mené l’attaque étaient partis de la base d’al-Chaayrate, connue comme un lieu de stockage d’armes chimiques avant 2013, selon le Pentagone. Le visage grave, le président Trump a appelé les « nations

Par DENIS JEAMBAR La guerre et le terrorisme se sont invités en quelques heures dans la campagne présidenti­elle française avec la frappe américaine contre la base aérienne syrienne de AlChaayrah­te après l’attaque chimique de Kahn Cheikoun, décidée semble-t-il par Bachar El Assad, et ce camion-bélier lancé pour tuer, comme à Nice en juillet dernier, dans la foule à Stockholm. Des événements qui viennent rappeler aux 59 missiles 4 à 6 tués *Heures syriennes. Sources : Syrian Civil War Map, OSDH, médias. Image : Google Earth.

civilisées » à mettre fin au bain de sang en Syrie.

Poutine : « C’est une agression contre un État souverain »

Le président russe Vladimir Poutine a lui estimé qu’il s’agissait d’une « agression contre un État souverain ». « Cette action de Washington cause un préjudice considérab­le aux relations russo-américaine­s », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. L’autre allié de Damas, l’Iran, a accusé les ÉtatsUnis d’utiliser de « fausses allégation­s » pour attaquer la Syrie et d’être « aux côtés »

candidats que l’histoire est tragique et que la course à l’Élysée ne se résume pas à des catalogues de mesures. La présidence de la République exige en premier lieu une vision du monde et du rôle de la France dans les relations internatio­nales. Notre fauteuil permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies, aux côtés des États-Unis, de la Russie, de la Grande-Bretagne et de la Chine, nous confère un rôle singulier. Il ne doit pas pour autant nous aveugler. Que pesons-nous vraiment face aux grandes puissances, notamment dans le dossier proche-oriental.? L’affaire syrienne est éclairante. En , François Hollande voulait des frappes contre le régime d’Assad mais la France 86 tués

des djihadiste­s comme le groupe État islamique (EI). La France par la voix de François Hollande a estimé que la « réponse » des ÉtatsUnis devait « maintenant être poursuivie au niveau internatio­nal, dans le cadre des Nations unies si c’est possible ». Bachar al-Assad porte « l’entière responsabi­lité » des frappes américaine­s, ont estimé la chancelièr­e allemande Angela Merkel et le président français dans un communiqué commun. La Chine a appelé à « éviter toute nouvelle détériorat­ion de la situation » en Syrie, tout en condamnant « l’usage d’armes chimiques, par n’importe quel pays ». Londres a annoncé « soutenir pleinement l’action des États-Unis ». En Turquie, le président Recep Tayyip Erdogan a jugé les frappes américaine­s «insuffisan­tes» et estimé que d’autres mesures sont requises, après que son porte-parole les a qualifiées de «réponse positive aux crimes de guerre du régime syrien.» Autre allié de poids des États-Unis dans la région, l’Arabie saoudite a salué la décision « courageuse du président (Donald) Trump» et assuré qu’elle « soutenait pleinement » les frappes n’était pas assez forte pour s’embarquer ? Évidemment, non. La frappe seule dans une telle aventure. décidée jeudi par Donald Trump a Le président français dut été largement saluée par la communauté s’incliner devant la décision, alors internatio­nale. Comment mal comprise, de Barack Obama. ne pas s’indigner devant la monstruosi­té Tirant sans doute les leçons de l’interventi­on de cette attaque chimique en Irak en , Obama et ne pas se féliciter du coup de semonce renonça à châtier le pouvoir syrien. américain adressé à Bachar Il savait el-Assad ! qu’aucune solution Cette décision

« C’est surtout la preuve politique appelle

que le président américain crédible n’était prête. malgré

n’a ni boussole ni vision. » La chute d’Assad tout aurait certes quelques été une satisfacti­on remarques. Il y a une semaine Donald émotionnel­le mais les conséquenc­es Trump s’accommodai­t encore en eussent été imprévisib­les. du régime syrien. Il a donc réagi Fallait-il renouveler le scénario irakien d’abord, comme il l’a dit, sous le : une opération militaire certes coup de l’émotion. Certes, la cible réussie mais aucun plan pour l’avenir qu’il a choisie ne peut guère déstabilis­er

Assad, preuve qu’il a tout de même évalué les conséquenc­es de sa décision. Reste qu’il est préoccupan­t que le chef de la première puissance du monde agisse sous l’empire de ses émotions. Il pouvait frapper après avoir consulté tous ses alliés. Il les a simplement informés. Il aurait pu demander dans l’urgence une réunion des Nations Unies. Il n’en a rien été. C’est le retour de l’Amérique impériale, cellelà même que critiquait le candidat Trump, partisan d’un repli. C’est surtout la preuve que le président américain n’a ni boussole ni vision. Il agit au fil de ses humeurs. Même si, dans cette affaire, sa décision est compréhens­ible, elle n’est pas rassurante sur sa manière de gouverner.

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