-Juillet : la Ville dit oui à un musée du souvenir
Cindy Pellegrini et Anne Murris, de l’association Promenade des Anges, ont emporté l’adhésion de Christian Estrosi. Le centre de la mémoire est sur les rails. Une victoire pour les victimes
Au bord des larmes. De joie, cette fois-ci. Cindy Pellegrini ne cache pas son émotion, hier. Elle qui a perdu six membres de sa famille sur la promenade des Anglais, elle qui a fait du devoir de mémoire un combat vital, vient d’obtenir satisfaction. Et quelle satisfaction! Le musée du souvenir du 14-Juillet qu’elle appelait de ses voeux devrait voir le jour. Un musée pour ne jamais oublier. Un musée pour préparer un avenir meilleur. «Je ne peux qu’accepter un aussi bon projet…» Tels ont été, en substance, les mots de Christian Estrosi mercredi, face à Cindy Pellegrini et Anne Murris, autre porte-voix de l’association Promenade des Anges-14 juillet 2016. Le président de la Métropole et le maire de Nice, Philippe Pradal, participaient à une réunion en mairie consacrée aux commémorations de l’attentat. Cindy et Anne y ont longuement développé leur projet de mémorial-musée. Elles ont emporté l’adhésion de Christian Estrosi, selon elles «séduit par le projet et son côté pédagogique».
Inspiré du mémorial du -Septembre
Ce projet, c’est un centre de la mémoire, basé à Nice, qui rendrait hommage aux 86 victimes tuées un soir de fête nationale, et sensibiliserait les futures générations à la lutte contre la radicalisation. «Un lieu de mémoire pour nos disparus et un message d’espoir pour ceux qui restent», clamait Anne Murris dans nos colonnes le 6 avril. Pour elle, ce musée s’imposait comme « une évidence». Anne Murris se souvient de l’émotion de sa fille Camille, décédée le 14-Juillet, après la visite d’un musée de la mémoire en Argentine. Cindy Pellegrini, elle, a eu l’idée en songeant au mémorial du 11-Septembre de New York, qui avait tant marqué son frère Mickaël, lui aussi victime du camion fou. Cette fois, l’idée prend corps. Et le projet de centre de la mémoire est sur les rails. À l’instar du rectorat, de la Fondation de France, de l’association Entr’autres et de la secrétaire d’État Juliette Méadel, Christian Estrosi a apporté son soutien à cette démarche mémorielle. «Il nous a expliqué avoir vu, lors des voyages de la Mémoire à Auschwitz, combien ceux-ci changeaient le regard des élèves. Dès lors, il voit un vrai potentiel dans ce musée. Et il voit grand ! », s’enthousiasme Cindy.
«Être précurseurs»
La Ville va donc aider l’association à définir un cahier des charges, évaluer les besoins du musée, ses dimensions, son emplacement. Restera à définir son financement. Le plus dur commence peut-être. Mais l’élan est bien là. «C’est un geste très fort envers les victimes. Un beau symbole envoyé à la France et au monde entier», salue Cindy Pellegrini, «émue et honorée». «C’est fort au niveau humain et très courageux politiquement, renchérit Anne Murris. M. Estrosi a bien compris la portée scientifique et éducative de ce musée. C’est tout à son honneur et à l’honneur des Niçois d’être précurseurs en matière de lutte contre la radicalisation.»
Le Département aussi
Reçues dans l’après-midi par Eric Ciotti, Anne Murris et Cindy Pellegrini ont aussi reçu «l’adhésion» du président du conseil départemental, qui s’est engagé à les aider sur les plans financiers et logistiques. «Je trouve cette idée de mémorial très pertinente », salue Eric Ciotti. Et de suggérer d’accueillir dans un premier temps le musée dans la Maison du Département, avenue des Phocéens. C’était l’une des principales missions du Comité pour la Mémoire, à sa création en octobre : imaginer le juillet . Une journée – et une soirée – évidemment placées sous le signe de la commémoration, et dont le déroulé est en cours d’élaboration. Une journée découpée en plusieurs temps forts, en plusieurs endroits de la ville. Des célébrations pour rendre hommage aux victimes, mettre à l’honneur le dévouement des services de secours, de sécurité et de santé, distinguer les héros de cette tragique soirée. Pour des problématiques de sécurisation des événements, la Ville souhaite par ailleurs que toutes les initiatives spontanées qui pourraient être proposées par les Niçois ce jour-là soient soumises au Comité pour la Mémoire des victimes.
Hier, Anne et Cindy ont le sourire retrouvé. À leurs yeux, «rester associées au projet est une belle marque de confiance ». La légitimité des victimes, leur inaltérable volonté de convertir leur drame personnel en énergie positive, seront des atouts essentiels pour donner jour à ce musée du souvenir. Cela pourrait prendre des années. Cela ne manquera sans doute pas de susciter débats, interrogations, cas de conscience. Mais l’idée est belle. Et la mémoire est à ce prix.