Nice : prostituées victimes ou prostituées proxénètes ?
Des voisins ont donné l’alerte après avoir assisté à des violences sur de jeunes Nigérianes, mineures pour deux d’entre elles, contraintes de se prostituer à Nice après avoir été récupérées à Vintimille. Le commerce de leurs charmes se déroulait dans un modeste appartement loué par Naomi Sunday, 26 ans, et son compagnon rue Dante. Les jeunes filles importées devaient rembourser jusqu’à 30 000 euros, prix de leur liberté. Elles s’acquittaient également auprès de Naomi Sunday d’un loyer. Le compagnon de Naomi, à la tête du réseau, a fui à l’étranger. Il est toujours recherché par la police. Naomi Sunday comparaissait hier pour proxénétisme aggravé. A ses côtés, Kate, 30 ans, devait répondre du même délit. Peine encourue : « Dix ans d’emprisonnement », rappelle le procureur Brigitte Labeille qui regrette l’absence des victimes, qualifiées « d’esclaves », « d’objets sexuels ». Le parquet parlera en leur nom et demandera finalement un minimum de deux ans de prison ferme et une interdiction définitive du territoire contre chacune des jeunes femmes. Le tribunal correctionnel de Nice, présidé par David Hill, se montrera beaucoup plus clément. Naomi, défendue par Me Michele Esposito, a été condamnée hier soir à huit mois de prison ferme à exécuter immédiatement. Quant à Kate, pour laquelle Me Olivia Marangoni, son conseil, a insisté sur l’absence de charges suffisantes, elle a été relaxée.
Plusieurs mois de surveillance
Les policiers de la brigade des moeurs étaient intervenus en mars dernier après plusieurs mois de surveillance, notamment dans le secteur Gambetta à Nice où des Nigérianes ont l’habitude d’arpenter les trottoirs. Ils avaient repéré des mouvements d’argent suspects vers l’Italie ou le Nigéria. Kate, qui a le statut de réfugiée politique, était-elle dans le secteur Gambetta pour surveiller les filles ou pour les convaincre de se libérer du joug de leur proxénète ? « Elle terrifie, du haut de son 1,60 m et de ses 50 kg, toute la communauté nigériane si l’on en croit les policiers. Mais une seule femme l’implique et ce n’est pas suffisant », s’indigne Me Maragoni. L’avocat insiste: « En quoi est-ce anormal qu’elle fréquente ses anciennes copines de prostitution ? Elles se retrouvent bien à l’église. On ne peut la condamner sur des on-dit.» Naomi, considérée elle aussi comme une « mama », c’est-à-dire une ex-prostituée affranchie, était-elle, à l’instar de son compagnon, un proxénète ? Me Esposito en doute « puisqu’elle continuait à se prostituer ». Dès lors, la prévenue n’est-elle pas elle aussi victime ? C’est toute l’ambiguïté de la prostitution nigériane.