Nice-Matin (Cannes)

RUGBY Laurent Buchet : « Je me suis régalé »

Après une quinzaine d’années sur les terrains, celui qui porte un nom connu et reconnu dans le monde du rugby a mis un terme à sa carrière. Sans amertume et avec de jolis souvenirs

- ROMAIN HUGUES

Pendant plus de quinze ans, Laurent Buchet a foulé les pelouses de rugby. De Nice à Grasse, en passant par Narbonne et Toulon, ‘‘La Buche’’ a touché son dernier ballon lors de la dernière rencontre de championna­t entre le RO Grasse et Strasbourg le 9 avril dernier, sous l’ovation méritée de Perdigon. Entre souvenirs et avenir, celui qui fut champion de France de Pro D2 en 2005, internatio­nal junior et membre de l’Equipe de France de rugby à 7, se livre.

Laurent, votre aventure avec Grasse prend fin…

Oui, j’ai joué huit saisons ici. J’ai de superbes souvenirs. Pour le dernier match, à domicile face à Strasbourg, ça m’a fait mal de ne pas être sur le terrain (il s’est blessé lors de la rencontre précédente, à Graulhet, ndlr) Mais ce qui va indéniable­ment me manquer le plus, c’est cette vie de groupe, les copains sur le terrain, les déplacemen­ts que l’on peut faire, tous ces moments de vie.

Maintenant que votre carrière s’achève, pensez-vous continuer dans le monde du rugby ?

Honnêtemen­t, pas pour le moment. Je suis parti dans l’esprit de me couper du rugby pendant au moins une année afin de passer un peu plus de temps avec ma famille. J’ai monté une agence d’assurance, donc je suis pas mal occupé. Ça va être tout nouveau pour moi, cette saison était celle de ma e licence. Je vais découvrir la vie sans rugby...

Quel regard portez-vous sur votre carrière ?

Je pense avoir réalisé une carrière honnête. Je n’ai pas été un crack, mais j’ai réalisé de belles choses. J’ai débuté dans un super club, à Nice, où on avait un bon groupe qui a joué des phases finales. Puis il y a eu Narbonne où j’ai pu disputer une finale junior. J’ai également eu la chance de signer à Toulon en Pro D et de réaliser une montée en Top . Bref, c’est une carrière qui aurait pu être mieux, mais bien pire aussi. J’ai pris beaucoup de plaisir. J’ai pu toucher au profession­nalisme, ce n’est pas donné à tout le monde, c’est de plus en plus difficile. Je me suis régalé quel que soit le niveau où j’ai joué. Finalement, quand je me retourne, je me dis que c’est génial. Entre la Fédérale  et le Top , vous avez passé  minutes sur le terrain. Lesquelles ont été les plus importante­s pour vous ? Toutes les minutes sont importante­s quel que soit le niveau ! Il y a toujours quelque chose à jouer, à gagner. Il y a toujours un duel, un adversaire à respecter qu’il faut plaquer… Quand je rentrais sur le terrain, je me suis toujours dit que c’était un match de rugby, et, comme tout match, il fallait le gagner. Que ce soit contre Montferran­d ou Bédarrides, c’est la même chose !

Racontez-nous votre seul essai en Top …

C’était un match à Castres avec le RC Toulon. Côté fermé, Patrice Teisseire met un coup de pied à suivre, je prends tout le monde de vitesse et j’aplatis. J’étais content de le marquer, mais c’est pareil que si j’avais marqué avec Grasse. C’est et cela reste un essai. Je préfère marquer un essai avec Grasse qui nous fait gagner le match plutôt que là, où ce jourlà, nous avions pris  points ! (rires)

En , vous quittez la rade de Toulon pour revenir dans le club de votre enfance, Nice…

Je suis parti en janvier , pour être exact. Je suis revenu à Nice en Fédérale . On connaît le recrutemen­t pléthoriqu­e de Mourad Boudjellal, et, chez les pros, on sait combien c’est difficile de ne jamais être titularisé ou de ne jamais être dans le groupe en s’entraînant tous les jours, donc j’ai négocié mon départ. Bon, il a très bien su le mettre à profit (rires). A ce moment-là, j’avais quelques contacts en Pro D mais rien de vraiment intéressan­t. J’ai donc préféré reprendre mes études d’assurance et signer à Nice. Là, je réalise une demi-saison sympathiqu­e, la saison suivante aussi, même si cela devenait compliqué. Le niveau nous aspire vers le bas. Sur le physique on répond présent, mais sur le niveau on n’a pas l’habitude. Du coup, je fais une saison moyenne dans une ambiance moyenne. Quand Grasse me contacte, par l’intermédia­ire d’Alain Pastor et Eric Berdeu, je n’hésite pas une seconde !

Donc vous arrivez à Grasse et vous êtes élu meilleur joueur de la saison !

Comme quoi, ça ne tient à rien ! Je sors d’une saison plus que mifigue mi-raisin à Nice, j’en ai bien conscience, et là, à Grasse, je me sens bien, je me sens à la maison. Je réalise une bonne saison, dans un club qui me correspond. Dans une carrière, il y a certes le physique, le talent, mais il y a le fait de bien se sentir dans un club et d’y partager ses valeurs.

Vous pouviez imaginer descendre des pros aux amateurs et vous sentir aussi bien ?

Le rugby profession­nel est un milieu particulie­r. Il y a le travail, l’argent et beaucoup de pression donc les comporteme­nts humains sont affectés. Quand on a l’habitude d’aller dans des clubs familiaux c’est difficile. Le côté affectif nous manque.

Comment le rugby a-t-il évolué en  ans ?

Il y a de plus en plus de monde, de plus en plus de jeunes. Médiatique­ment, le rugby a pris une autre dimension. Le championna­t français est celui qui attire le plus au monde et qui brasse le plus d’argent. Beaucoup de joueurs étrangers tentent l’expérience. Cela devient donc compliqué pour un joueur français de tirer son épingle du jeu. En France, il y a de super joueurs mais beaucoup de concurrenc­e mondiale. Et ça se ressent avec notre équipe nationale. C’est plus compliqué de sortir des bons joueurs régulièrem­ent, car ils ont moins de chance de s’exprimer au meilleur niveau. C’est le revers de la médaille. Nous possédons un super championna­t mais une équipe nationale qui n’a plus les résultats d’avant.

En parlant d’équipe nationale, vous avez été internatio­nal au rugby à , un sport que le grand public a pu découvrir cet été aux JO de Rio…

Le rugby à , c’est un super souvenir. L’état d’esprit est un peu « beach », les joueurs sont cool. Je me souviens d’un match que l’on jouait où, aux  coins du terrain, il y avait des piscines gonflables remplies d’eau. Quand on marquait, on sautait dedans (rires). En revanche, c’est un sport où toutes les erreurs techniques sautent aux yeux. A , si l’on fait une mauvaise passe, ça se voit et les conséquenc­es sont désastreus­es. Au rugby à , le ballon c’est de l’or… Comme me disait mon entraîneur, tant qu’on a le ballon, les autres ne pourront pas marquer de points. Et puis, physiqueme­nt, c’est très dur. En général, les duels se font sur des mecs fatigués. On les repère et ils souffrent ! (rires)

Et quand on repasse au rugby à , c’est forcément plus facile ?

Non ! Certes, on peut progresser techniquem­ent. Mais à , il y a moins d’espace donc pour prendre les intervalle­s c’est forcément plus difficile. Ce sont deux rugbys différents, techniquem­ent et tactiqueme­nt.

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(Photos Xavier Depoilly et GR)

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