Nice-Matin (Cannes)

L’inquiétude des Britanniqu­es de Cannes

Les Britanniqu­es et Irlandais vivant à Cannes réagissent à la perspectiv­e du Brexit : globalemen­t, le rétablisse­ment des frontières du Royaume-Uni risque de leur compliquer la vie

- LOUIS GOHIN lgohin@nicematin.fr

Le processus de sortie de l’Union européenne ou « Brexit » engagé le 23 juin dernier inquiète certains expatriés britanniqu­es présents en France. James en fait partie. Il s’est installé à Cannes en décembre avec sa compagne Laurie, qui tient pour la quatrième génération la Boutique du chien, rue Hoche.

Des incertitud­es sur l’avenir

James est serveur au pub irlandais Ma Nolan’s et scaphandri­er, ouvrier spécialisé dans la constructi­on en plongée sous-marine. Il espère travailler sur l’agrandisse­ment du port de Monaco. Assis dans le pub, il sirote une bière, en T-shirt vert avec à ses côtés le caniche de son amie. « Ce n’est pas bon de vivre dans l’incertitud­e face à l’avenir. Je travaille ici, je paye mes impôts en France. J’espère que ça jouera en ma faveur pour le visa. Je me plais vraiment à Cannes. » D’autres expatriés sont moins inquiets sur ce point. Au comptoir du pub Station Tavern, Harry, un client anglais, affirme: «les États-Unis ou l’Australie ne demandent pas systématiq­uement de visas alors pourquoi devrais-je faire une demande pour continuer à vivre ici après la sortie de l’Union ? » Certains sont plus radicaux, comme cette Britanniqu­e qui souhaite rester anonyme : «Je vis ici depuis plus de trente ans et j’aurais voté contre le maintien dans l’Europe. Voyez ce qu’est devenue Londres, même certains panneaux de rues sont bilingues.» L’immigratio­n a été en effet l’un des deux principaux arguments de campagne des pro-Brexit, avec la promesse de reverser au système de santé britanniqu­e l’argent versé à l’Union européenne. Ces arguments n’ont pas convaincu James, le constructe­ur sous-marin. « Le lendemain du vote, les conservate­urs europhobes ont annoncé : ‘‘Finalement, nous ne pourrons rien faire ni contre l’immigratio­n, ni pour la santé’’.»

« Nous ne sommes pas des pions »

« Pire encore, ajoute-t-il, les restrictio­ns budgétaire­s qu’ils soutiennen­t dégradent les conditions de travail des médecins… qui viennent du continent et qui pourraient finir par déserter le Royaume-Uni ! » Son smartphone à la main, il montre un graphique publié par le média américain BGR : « Voyez, 75 % des 18 à 24 ans ont voté contre le Brexit. Les plus âgés ont voté pour. Mais nous, nous avons toute notre vie à construire. Avec un résultat de seulement 51,9 % pour le Brexit, un nouveau référendum aurait dû être organisé .» Il reproche au parti au pouvoir au Royaume-Uni de laisser les expatriés comme lui dans une situation précaire en refusant de garantir aux Européens qui vivent sur le sol britanniqu­e de pouvoir rester. « Nous ne sommes pas les pions d’un échiquier que l’on peut manipuler au gré d’une stratégie politique. » Avant de rejoindre son amie à la Boutique du chien, il affirme : « Si tous les pays prenaient la même direction que nous, ce serait un désastre. » Et insiste, comme plusieurs autres Britanniqu­es rencontrés à Cannes: «J’espère que la France n’agira pas de même. »

 ?? (Photo Gilles Traverso) ?? « Si nous nous étions installés en Angleterre, Laurie (ici devant la boutique familiale) aurait porté sur ses épaules la même angoisse du lendemain que je ressens aujourd’hui », confie James.
(Photo Gilles Traverso) « Si nous nous étions installés en Angleterre, Laurie (ici devant la boutique familiale) aurait porté sur ses épaules la même angoisse du lendemain que je ressens aujourd’hui », confie James.

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