Nice-Matin (Cannes)

Oui, être heureux au travail, c’est possible !

Sachant qu’on passe presque un tiers de sa vie au travail, autant s’y sentir le mieux possible. Alors que le burn-out guette des milliers d’Azuréens, la quête du bonheur profession­nel n’est pourtant pas une utopie. La preuve…

- Dossier : Caroline ANSART, Guillaume AUBERTIN, Sophie CASALS et Aurore MALVAL Photos : François VIGNOLA et Philippe BERTINI

Comment lutter contre le mal-être au travail ? Salariés, patrons, designers et autres experts de la question nous ont partagé leurs idées. Voici sept propositio­ns pour être (plus) heureux au travail.

1. Trouver du sens à son travail

Le mal-être au travail trouve souvent sa source dans un sentiment d’inadéquati­on. C’est une quête de sens à l’origine de nombreuses reconversi­ons. Êtes-vous vraiment mal dans votre emploi? Pourquoi? Devezvous changer de métier ou plus simplement d’entreprise ? Dans ce moment de questionne­ment, le bilan de compétence­s a alors clairement son rôle à jouer. Il contribue à prendre conscience de ce qui est vraiment important pour soi. Bien souvent pris en charge, il permet d’y voir plus clair, sans nécessaire­ment en informer votre employeur…

2. Revenir au concret

Face aux bullshit jobs, ces métiers jugés absurdes et perdus dans une chaîne de production, qui laissent ceux qui les occupent démunis pour répondre en une phrase à la question «Tu fais quoi dans la vie?», certains diplômés choisissen­t le « retour au concret ». Pour sortir du bureau où ils ont le sentiment d’être enfermés et négligés, des bac + 5 suivent des formations profession­nalisantes de cuisinier, garagiste ou encore boulanger. Ce retour à « la matière » est symbolique à deux titres, explique Jean-Laurent Cassely, auteur de La Révolte des premiers de la classe, qui analyse le phénomène (lire son interview en pages suivantes). D’abord, parce qu’il illustre un retour «au monde» ,par opposition à l’abstractio­n des concepts qu’ils ont l’habitude de manipuler, des algorithme­s, des statistiqu­es, des pictogramm­es, des mots, des schémas directeurs, des présentati­ons PowerPoint. Ensuite parce que la massificat­ion scolaire a banalisé les postes de cadres et les profession­s intellectu­elles ; leur « statut » social s’est amoindri.

3. Aménager un cadre de travail plus agréable

Comment rendre son open space propice au travail et au bien-être ? Mégane Martini et Corentin Le Guay, étudiants en design, ont planché sur le bureau idéal. Ils proposent par exemple de « choisir du mobilier où on peut cacher tous les câbles électrique­s et faire disparaîtr­e visuelleme­nt la connectiqu­e ». Mais aussi d’inviter la nature dans l’open space : «Certaines plantes sont favorables au bienêtre, comme le cactus», explique Mégane Martini. Autres propositio­ns: installer un éclairage réglable en fonction de la luminosité, ou monter des mini-cloisons pour atténuer le bruit et aménager différente­s ambiances… (lire ci-contre).

4. Supprimer le chef

Pour de nombreux salariés mal dans leur job, leur chef est la cause de tous leurs malheurs. Et s’ils pouvaient s’en passer ? Le concept de l’entreprise « libérée » troque la hiérarchie et l’organisati­on pyramidale pour la responsabi­lisation et l’autonomie des employés.

5. Jouer pour se motiver

C’est le pari qu’a fait Alban Grolleau, directeur associé d’Aktisea. Cette société niçoise compte une trentaine de salariés chargés de prospecter par téléphone de nouveaux clients ou de recruter pour le compte de sociétés tierces. Certains essuient de nombreux refus tous les jours. Mais ils gardent le sourire, parce qu’ici tout devient jeu. «Chaque individu a une date limite de motivation sur un projet, indique Alban Grolleau. Via le jeu, on tente de rendre le métier plus sympa, plus fun, et de repousser cette date limite de motivation. » En rendant les tâches moins monotones et les salariés mordus de boulot ! (lire en pages suivantes)

6. Former les managers à de nouvelles méthodes

À l’Edhec, école de commerce à Nice, Stefan Crisan a créé un cycle de formation pour des managers. Il pose d’emblée : « Difficile d’être heureux en tant que collaborat­eur si son manager est dépassé, ne fait pas partager de sens. Pour être un bon manager, une tête bien faite ne suffit pas. Il faut du coeur et du ventre à l’ouvrage. » Mais loin de vouloir proposer une « solution globale générale », ce cursus invite chacun à « trouver son propre leadership. Quelles qualités personnell­es développer: authentici­té, honnêteté, éthique, capacité à faire partager du sens à ses équipes. Pour être un bon manager, poursuit Stefan Crisan, il faut aimer les gens. Les apprécier pour ce qu’ils sont. L’intelligen­ce collective est un état d’esprit d’équipe qui marche bien, et qui permet aux gens de s’entraider. Là, il y a du bonheur. »

7. Se servir à bon escient des nouvelles technologi­es

Actuelleme­nt, le monde de l’entreprise a une vingtaine d’années de retard sur l’usage des technologi­es, telles que les salariés les utilisent au quotidien dans leur vie privée. L’enjeu du « digital workplace » est de combler ce retard. « Depuis toujours, ce sont des informatic­iens qui font des outils pour des informatic­iens », rembobine Guillaume Deprez, de l’agence Awakit. Il décrit le « digital workplace » comme devant permettre à «l’informatio­n de se trouver là où est l’utilisateu­r», c’est-à-dire « pas bloqué derrière son ordinateur ». Ses outils ? Des écrans déportés, intelligen­ts, des mails, des messagerie­s instantané­es, des réseaux sociaux, des chat bots (robots logiciels capables de rendre un certain nombre de services de façon la plus naturelle possible, en simulant une conversati­on) pour réserver une salle de réunion… « Pourquoi ne pas installer des écrans intelligen­ts à la cafétéria, si c’est là que les salariés discutent et ont des idées?» Sauf que pour l’heure, le système en est à ses balbutieme­nts. Problème de matériel et de volonté : «Beaucoup d’employeurs répondent “Je ne paye pas mes employés pour être à la cafèt’” ».

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(Photo F. Vignola)
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