Nice-Matin (Cannes)

“Ces plages sont naturelles, c’est l’histoire”

L’associatio­n Avenir 06 s’insurge contre le souhait des plagistes du Soleil de voir requalifie­r le site en zone artificiel­le. Ils ont tenu à en apporter quelques « preuves historique­s »

- M.-C.A mabalain@nicematin.fr

Un bond. C’est ce qu’ont fait Myriam Waeselynck et Philippe Antoine. Respective­ment présidente et membre de l’associatio­n Avenir 06 (« Agit pour valoriser les espaces naturels et le patrimoine »). Ils venaient de lire notre article (Nice-Matin du 4 mai) dans lequel les exploitant­s des établissem­ents de la plage du Soleil, sous le coup d’une injonction de démolition, faisaient part de leur désir d’agir pour que les plages changent de « statut » : passer de naturelles à artificiel­les. À la clé, les profession­nels, dans leur combat pour subsister, espèrent gagner du terrain puisque, sur les plages artificiel­les, le Décret qui redistribu­e les surfaces d’exploitati­on prévoit une occupation de 50 % contre seulement 20 % sur les naturelles. Les plagistes mettent en avant des travaux, réalisés en 1966, pour engraisser la grève.

Victor Hugo témoigne

« Vouloir reclasser ce site est une atteinte grave à notre patrimoine et à notre histoire, s’insurge Myriam Waeselynck. L’histoire nous montre que Golfe-Juan doit beaucoup à ses plages naturelles. Au XIXe siècle, Golfe-Juan est un hameau de quelques habitants, paysans et pêcheurs dont les barques sont tirées sur la plage ». Philippe Antoine raconte : «Ily avait aussi des entrepôts dans lesquels les poteries étaient stockées après avoir été acheminées de Vallauris. On chargeait ensuite la céramique utilitaire, vaisselles et autres, dans les bateaux pour les exporter ». Victor Hugo lui-même a foulé la plage. Dans les pas de Napoléon. En 1839, dans En voyage, tome II, il écrit : « Golfe-Juan est une petite baie mélancoliq­ue et charmante (...). Je me suis arrêté et j’ai contemplé cette mer qui vient mourir doucement au fond de la baie sur un lit de sable aux pieds des oliviers et des mûriers et qui, a porté, là, Napoléon ». En 1815, l’empereur déchu et ses fidèles avaient débarqué à bord de chaloupes hissées sur la plage. Au milieu du XIXe siècle et au début du XXe siècle, c’est le début du tourisme. « Des Parisiens, des Anglais viennent en hiver profiter du soleil et des bienfaits des bains de mer», rappelle Philippe Antoine. Parmi eux, George Sand, Gambetta, Guy de Maupassant, Juliette Adam. De grands hôtels sont bâtis sur le front de mer, comme le Riviera Grand Hôtel de la Plage, au nom explicite, aujourd’hui transformé en appartemen­ts. Le célèbre restaurant Tétou est créé sur le sable et démarre la carrière que l’on connaît. « Ces établissem­ents aussi font partie du patrimoine. Ils devraient être distingués », souligne la présidente d’Avenir 06. Pour faciliter l’accès à la plage, on ouvre, en 1914, le boulevard de la Plage. À partir des années trente, place au tourisme d’été et au yachting. « On prend conscience de l’importance des plages et de l’intérêt que leur portent les touristes. C’est clair, Golfe-Juan doit beaucoup à ses plages naturelles », conclut Myriam Waeselynck. Alors plages naturelles ou artificiel­les ? Le débat est loin d’être clos. Il y a du grain à moudre.

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Le littoral de Golfe-Juan à différente­s époques. En haut, les années . En bas, de gauche à droite: les premiers hôtels sur le front de mer pour accueillir les vacanciers hivernants puis les estivants ! DR

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